En quoi se démarque-t-il des précédentes productions de Dontnod ?

Xavier Spinat : Twin Mirror est le premier jeu auto-édité par DONTNOD. Twin Mirror est un thriller psychologique et c'est un des points qui le démarque de nos autres productions. Nous avons cherché à accompagner l'histoire que nous voulions raconter en mettant en scène des gameplay spécifiques qui amplifient l'immersion et offrent une synergie entre la narration et l'action propre à cette histoire. Twin Mirror a pour héros un ancien journaliste d'investigation dont l'esprit possède des capacités hors du commun. Chaque jeu DONTNOD des personnages et des intrigues particulières, ce qui permet à la vision créative de chaque équipe d'embarquer les joueurs dans une expérience originale.

Comment va s'articuler l'enquête ? De quelle manière pourra-t-on façonner sa propre expérience ? Manquera-t-on des indices ou des éléments avec possibilité d'altérer nos conclusions ? Aura-t-on un impact sur la personnalité de Sam ?

Florian Desforges : Il est vrai que c'est une idée séduisante et dans l'air du temps d'avoir une enquête avec des résolutions bonnes, fausses ou partielles qui modulent la suite d'un jeu mais nous sommes partis sur une autre orientation car nous ne voulions par faire un jeu d'enquête complexe, mais plutôt souligner les capacités de notre personnage à travers des phases d'investigation. L'investigation n'est qu'un aspect de Twin Mirror, les choix s'orientent plus sur la façon dont Sam fait évoluer ses relations avec les autres personnages. Sam a une personnalité complexe qui fait qu'il peut légitimement orienter ses actions et réponses de différentes façons. C'est là que le joueur intervient, en orientant le parcours de Sam.

La mécanique de Palais Mental est-elle toujours prévue ? D'autres fonctionnalités à part sont-elles à prévoir ?

Florian Desforges : Oui le Palais Mental ou Mind Palace est toujours présent pour certaines phases d'investigations mais nous l'avons fait évoluer dans son utilisation et dans ses différentes manifestations pour coller encore plus aux événements narratifs. Il représente le monde intérieur de Sam, un refuge qu'il a construit, qu'il utilise autant pour se remémorer des souvenirs que pour reconstruire des scènes. Nous avons retravaillé cette feature du jeu, nous en dévoilons plus, plus tard.

À quel degré de liberté peut-on s'attendre dans la ville de Basswood (déplacements, progression de l'histoire) ?

Florian Desforges : L'expérience de Twin Mirror est rythmée par les découvertes de Sam à travers son périple et les différents lieux qui composent Basswood et ses environs. Le jeu comporte une part d'exploration, mais la structure narrative impose un rythme spécifique sur lequel on se calque ce qui fait qu'on reste dans le canevas classique des jeux narratifs de DONTNOD. Twin Mirror n'est pas un open world.

On imagine qu'il y aura plus d'un dénouement possible, combien en avez-vous prévu ?

Xavier Spinat : Nous ne souhaitons pas dévoiler le nombre de fins possibles pour l'instant.

Dans le trailer, le Double insiste sur le fait que Sam n'aura pas à être seul ? Sera-t-il le seul protagoniste jouable ? Le Double sera-t-il autre chose qu'un petit diablotin qu'un « conseiller » ?

Hélène Henry : Cette particularité du jeu est toujours présente et est évidemment fondamentale à l'expérience de jeu. Elle a aussi évolué, mais il est encore un peu tôt pour en parler.

Avant de le revoir il y a quelques jours, Twin Mirror avait pour le moins disparu. En dehors de la réalisation qui semble avoir pris un sérieux coup de boost, qu'est-ce qui a changé dans le jeu depuis l'annonce du report en 2019 ?

Florian Desforges : Beaucoup de choses ont changé ou ont été améliorées. Nous avons eu la chance de disposer de plus de temps, ce qui a profité à tous les aspects du jeu. Les personnages et l'histoire ont été affinés. De nouveaux systèmes ou phases de gameplay ont été ajoutés pour accompagner la façon dont notre personnage principal, Sam, se sent et comment il agit. Nous avons également redéfini de nombreux éléments du projet pour renforcer encore son aspect thriller. Nous avons amélioré la cinématique, la direction artistique, la réalisation, la musique et la conception sonore, ainsi que la qualité d'animation de nos personnages. En résumé, nous en avons profité pour améliorer la qualité globale de chaque aspect du jeu pour toujours mieux renforcer l'aspect thriller psychologique et notre histoire. Nous avons aussi apporté de nombreuses fonctionnalités de gameplay spécifiques que Twin Mirror a maintenant à offrir. Nous sommes également passé d'un format épisodique à une expérience narrative complète. Parce que notre histoire pouvait s'y prêter, nous avons décidé de rassembler nos chapitres initialement prévus en une seule expérience complète. Nous espérons que ces changements renforceront l'immersion globale des joueurs.

Le passage de la propriété intellectuelle entre les mains de Dontnod, l'exclusivité Epic Games Store, l'arrivée de Shibuya à la production : comment est-ce que tout cela a impacté la progression du jeu ?

Xavier Spinat : Devenir notre propre éditeur est un défi de taille pour DONTNOD, mais la longue expérience accumulée pendant les projets précédents nous y a préparé. Travailler avec des partenaires reste selon nous la clé pour nous assurer que nos jeux trouvent leur public. Le jeu vidéo est une industrie basée sur le travail d'équipe : à de rares exceptions, une seule personne ne peut pas avoir tous les talents pour développer et distribuer un jeu complet. Et c'est également vrai au niveau des entreprises. Pour qu'une équipe de développement fasse un jeu, elle doit souvent faire appel à des partenaires pour le moteur de jeu, les tests, la traduction, l'enregistrement des voix... En devenant éditeur, nous avons maintenant de nouveaux partenaires, mais cela ne change pas la logique générale : nous travaillons tous ceux qui peuvent nous aider à aller au bout de l'aventure. Pour Twin Mirror, nos liens avec Epic Games Store, Bandai Namco et Shibuya font partie des éléments qui nous aident à mieux gérer notre entrée dans le monde de l'édition.

Comment expliquez-vous l'abandon du format épisodique ? Quelles répercussions cela a-t-il eu ? Aura-t-on néanmoins une sorte de "découpage" pour le scénario ?

Xavier Spinat : La structure épisodique convient parfaitement à certaines histoires. Mais pour Twin Mirror, avoir des épisodes impliquait des fins et des réouvertures partielles et cela cassait le rythme. Après plusieurs itérations, et parce que notre histoire s'y prêtait, nous avons estimé que le jeu fonctionnait mieux en une expérience unique plutôt qu'en plusieurs épisodes. Cela a nécessité quelques changements au niveau des personnages et de l'histoire, mais nous pensons que cela a renforcé les piliers du jeu.

Lorsque l'on pense à Dontnod, on pense à Life is Strange, forcément, et on repense aussi à Tell Me Why. Ce sont des jeux à messages et assez engagés. Peut-on s'attendre aussi à ce que Twin Mirror, qui prend place aux États-Unis, en Virginie Occidentale, aborde voire égratigne des problèmes politiques ou de société ?

Xavier Spinat : Nous ne cherchons pas à prendre une position politique particulière avec Twin Mirror, nous ne faisons que raconter une histoire dans un cadre réaliste. Comme tout art, les jeux vidéo peuvent faire réfléchir les gens, ils peuvent faire ressentir les choses ou permettre des remises en cause à travers les expériences qu'ils offrent. Cela peut certainement prendre la forme d'une protestation ou d'une critique de certains aspects de notre société. Ce n'est cependant pas spécifiquement l'intention derrière Twin Mirror qui est avant tout un thriller psychologique, centré sur un héros à l'esprit singulier.