Même si l'on ne présente plus Resident Evil 2, un rappel de son scénario s'impose. Après les événements racontés dans le premier Resident Evil, les choses dégénèrent et le virus se répand dans la ville de Raccoon City. Comme la version originale, Resident Evil 2 met en scène deux héros : Leon S. Kennedy et Claire Redfield. Leon est une jeune recrue de la police de Raccoon City en route vers sa nouvelle affectation lorsqu'il se rend compte qu'une catastrophe sans précédent a eu lieu. Claire est quant à elle la jeune soeur de Chris Redfield, un des héros du premier Resident Evil, dont elle est sans nouvelle depuis un moment. Afin de tenter de retrouver sa trace, elle se rend à Raccoon City, ville dans laquelle ce dernier travaille au sein d'une unité spéciale de la police. Rapidement, les deux jeunes gens vont faire connaissance et décider de s'entraider. Mais le sort fait qu'ils sont séparés dès leur arrivée dans le centre-ville de Raccoon City.

Voyage en terrain connu

Resident Evil oblige, leurs affaires respectives vont aller de mal en pis. Et il va être nécessaire pour eux d'affronter des horreurs sans nom pour parvenir à s'enfuir, et accessoirement comprendre ce qu'il s'est passé. Pour les personnes qui ont joué au jeu original, il est évident qu'il s'agit d'un remake. La plupart des scènes-clés sont là, même si elles ne sont pas toujours là où on les attend, et l'histoire reprend bien celle du Resident Evil 2 original. À noter tout de même que si le jeu respecte énormément l'intrigue du Resident Evil 2 de 1998, certains éléments, comme la séquence avec le Chef de la Police Brian Irons et la fille du maire Warren ont été mis de côté dans cette nouvelle version du jeu.

Comme nous vous l'avions indiqué dans notre dernière preview, Resident Evil 2 propose bel et bien des séquences inédites. Si certaines d'entre elles mettent logiquement en scène les deux héros du jeu, d'autres permettent d'incarner les seconds rôles, Ada Wong et Sherry Birkin. Si la présence de ces séquences est appréciable, aucun ajout effectué ici par Capcom n'a réellement d'impact sur la narration dans son ensemble. Même si certaines scènes inédites sont particulièrement réussies, comme le passage au Kendo Gun Shop, il est regrettable que l'éditeur nippon n'ait pas réussi à intégrer à l'intrigue un élément inédit aussi marquant que ne l'a été Lisa Trevor dans le remake du tout premier Resident Evil.

Le B.A.-BA du Survival Horror

Dans les interviews données par les producteurs de Resident Evil 2 après la présentation du jeu à l'E3 2018, y compris dans l'interview accordée à votre serviteur, ces derniers avaient assuré que la campagne du remake ne reprendrait pas la structure Leon A-Claire B et Claire A-Leon B qu'utilisait le Resident Evil 2 original. Ce n'est pas totalement vrai. Lors de la première partie sur ce remake, le jeu demande effectivement de choisir entre Leon et Claire. Mais une fois la campagne terminée une première fois, le joueur a alors la possibilité de traverser une campagne "Bis" avec le personnage qu'il n'a pas choisi la première fois.

Au cours de cette dernière, qui démarre beaucoup plus vite que la partie initiale, l'ordre des événements est sensiblement modifié et certaines scènes sont remplacées par d'autres. Pour voir la fin complète de Resident Evil 2, et obtenir l'expérience complète proposée par le jeu, il est nécessaire de terminer le scénario principal ainsi que le scénario "Bis." Si l'idée est bonne et globalement bien exploitée, il est malheureusement possible de noter de petites incohérences lors du passage du scénario principal au scénario "Bis," comme la nécessité de refaire certaines énigmes par exemple. Cela ne gâche absolument pas le plaisir mais méritait d'être souligné.

Un joueur habitué aux Resident Evil mettra moins de sept heures pour boucler le scénario principal lors de sa première partie en mode de difficulté "Normal". La campagne "Bis" demandera quant à elle une heure de moins. De plus, ce remake réalise des sauvegardes automatiques en "Normal" et permet de sauvegarder à volonté. En difficulté "Extreme", les sauvegardes automatiques disparaissent et les rubans encreurs limitant le nombre de sauvegardes possible font leur retour (en plus d'augmenter la résistance des zombies). Les fans de la série qui désirent vivre une expérience encore plus authentique et ardue ont donc tout intérêt à jouer en "Extreme". Comme l'ont montré des screenshots et bandes-annonces diffusées par Capcom, Hunk et Tofu sont eux aussi de retour et offrent un challenge corsé à ceux qui désirent faire face à un défi toujours plus relevé.

Cela étant dit, même en l'absence de ces bonus, le jeu ne se laisse pas ranger si facilement. Une des forces de Resident Evil 2, c'est qu'il laisse le joueur avec une forte envie de recommencer l'aventure dès que cette dernière a été bouclée une première fois. Le traditionnel système de classement de fin de partie et le désir de recommencer en optimisant ses déplacements et sa gestion des affrontements/des objets pour grappiller quelques minutes sur le temps de complétion final font que Resident Evil 2 se prête aux parties répétées. Et ce, sans aucune sensation de redondance. Comme les épisodes originaux, ce remake donne envie de faire du speedrun même aux joueurs qui ne sont pas du tout intéressés par cette pratique.

Entre tradition et modernité

Lorsque le développement de ce remake de Resident Evil 2 a été confirmé par Capcom, la question du choix du type de gameplay a logiquement été immédiatement soulevée par les joueurs. Au sortir de Resident Evil 7 et sa vue à la première personne, il était cohérent de se demander ce que l'éditeur nippon allait choisir pour cette refonte si longtemps demandée. Comme tout le monde le sait désormais, Capcom a fait le choix de la vue à la troisième personne avec caméra au-dessus de l'épaule. Pour qui à l'habitude de ce type de vue, la prise en main de Resident Evil 2 se fait très rapidement. Les automatismes se créent dans les premières minutes, et le gameplay ne devrait pas perturber les joueurs.

L'arrivée du gameplay de type TPS moderne dans Resident Evil 2 faisait craindre à certains la simplification du jeu. Pour compenser cela, Capcom a revu la hargne et la résistance des ennemis à la hausse, tout en limitant les munitions mises à disposition du héros. Autant le dire tout de suite, une personne qui compte traverser le jeu (en Normal ou Extreme) en tirant dans le tas risque de ne pas aller très loin. Même en prenant soin de viser la tête des ennemis et en évitant si possible le combat, il n'est pas rare de se retrouver à court de munitions. Les traditionnels zombies, autrefois faibles et patauds, sont devenus extrêmement résistants et particulièrement affamés. Même en visant correctement, vider un chargeur sur un seul zombie est une situation qui peut se produire fréquemment dans ce remake. Et histoire de bien faire les choses, la moindre attaque de zombies, de chien, de Licker, etc. fait des dégâts considérables.

C'est bon d'avoir les boules

De base, la sentiment de danger permanent est bel et bien là dans Resident Evil 2. Et les choses ne font qu'empirer lorsque débarque le génial Tyrant T-103, plus communément appelé Mr. X, ennemi massif envoyé par Umbrella pour éliminer tous les témoins de la catastrophe. Alors qu'il était à l'origine cantonné aux scénarios B dans le Resident Evil 2 original, il est ici présent dans toutes les versions de l'intrigue. Extrêmement résistant et puissant, ce dernier traque Leon et Claire pendant toute l'aventure tel un rouleau compresseur en imperméable et chapeau et avec un charisme silencieux bien à lui. Et ce, peu importe les situations ou l'éventuelle présence d'autres ennemis. De par son look, son comportement, et la mise en scène dont il bénéficie (plus d'informations à ce sujet plus bas dans le test), Mr. X est un des gros points forts de la version 2019 de Resident Evil 2. Sa présence à l'écran est évidemment redoutée, et il ne facilite pas la vie du joueur. Mais s'il n'avait pas été là, le jeu n'aurait pas été aussi réussi.

Pour terminer avec le gameplay, il convient de noter que sa modernisation n'est pas totale. Pour faire face à des ennemis beaucoup plus hargneux et résistants que par le passé, ainsi qu'à Mr. X, Capcom aurait pu ajouter un bouton d'esquive similaire à celui de Resident Evil 3. Cela étant dit, il est tout à fait possible que l'éditeur se soit volontairement abstenu d'ajouter ce mouvement afin de ne pas trop simplifier la tâche des joueurs. De son côté, la possibilité de faire un demi-tour rapide est toujours bien présente. Et pour ce qui est de la gestion des objets et des énigmes, les fans du titre original devraient se trouver en terrain connu malgré l'ajout d'éléments venus d'épisodes sortis après ce dernier (comme les mélanges de poudres pour créer des munitions par exemple). Du point de vue de l'expérience manette en main, Resident Evil 2 est une vraie réussite pour les fans de Survival Horror de la première heure. Lors de sa découverte initiale, le jeu fait peur, stresse, et ne doit pas être envisagé comme un jeu de tir à la troisième personne. Capcom a ici prouvé qu'il était capable de reproduire une expérience à l'ancienne, avec les sensations qui vont avec, tout en modernisant le gameplay du jeu.

L'horreur sublimée

Outre le respect accordé à l'intrigue de l'oeuvre originale et les modifications apportées au gameplay, la réalisation est l'autre élément surveillé de près dès qu'il est question d'un remake de jeu. Dans le cas de Resident Evil 2, Capcom a fait les choses très bien. Son moteur RE Engine va à ravir à l'univers imaginé par Hideki Kamiya et compagnie à la fin des années 90. Les environnements sont, malgré les changements apportés pour les besoins du remake, à la fois reconnaissables au premier coup d'oeil et magnifiés (il suffit de regarder une vidéo du jeu original après avoir joué à ce remake pour s'en convaincre). Ces décors sont de plus grandement aidés par les travaux effectués par Capcom en manière de luminosité, d'atmosphère et d'effets. Les zones d'ombres nécessitant l'utilisation d'une lampe-torche pour y voir un peu plus clair, la lumière qui filtre de l'extérieur à travers des fenêtres, la pluie battante des séquences en extérieur ou encore les tirs de grenades incendiaires ne sont que quelques unes des réussites visuelles de Resident Evil 2. Lors des premières minutes de jeu dans le commissariat, la visibilité volontairement réduite et l'ambiance sonore poussent le joueur à avancer à tâtons par crainte de ce qui peut se trouver de l'autre côté d'une porte.

Du côté des personnages, le travail effectué est là aussi réussi. Le RE Engine permet des modélisations plus réalistes des protagonistes et le jeu en bénéficie clairement. Et c'est peut-être étrange à dire, mais Resident Evil 2 bénéficie certainement des plus beaux zombies vus jusqu'à présent dans un jeu vidéo. Absolument horribles, ces derniers subissent des dégâts localisés et voient leur état se dégrader au fur et à mesure qu'ils subissent des attaques de la part du héros. Et que dire du gore absolu de leurs morsures. Après des années de zombies génériques interchangeables, Resident Evil 2 redonne leurs lettre de noblesse aux morts-vivants vidéoludiques. Bien évidemment, les autres ennemis du jeu bénéficient d'une modélisation tout aussi soignée. Mention spéciale aux plantes-zombies qui sont aussi pénibles que dégoûtantes.

Pour chipoter, il n'est pas incongru de dire que certaines expressions faciales (celles de Claire en particulier) peuvent placer les personnages dans l'uncanny valley. De plus, un petit scintillement peut parfois être perçu sur certains environnements et sur l'eau. Et ce, y compris sur PS4 Pro. Il est également étrange de voir que les animations des ennemis éloignés du joueur sont saccadées et deviennent fluide lorsqu'ils sont à proximité du héros. Mais dans l'ensemble, Resident Evil 2 est une véritable réussite visuelle qui transporte avec brio en 2019 ce jeu de la fin du XXe siècle.

Discrètes musiques

Le son a toujours joué un rôle essentiel dans les Resident Evil. Il est donc essentiel de s'arrêter sur cet élément du jeu, en commençant par les dialogues. Comme les fans de la première heure s'en souviennent, les Resident Evil des débuts ne bénéficiaient pas de doublages particulièrement soignés. De ce côté-là, il y a clairement du mieux dans ce remake (certaines vulgarités inutiles et répliques de Sherry mises à part). De plus, le jeu a eu droit, contrairement à l'original, à un doublage en Français, ce qui est toujours bon pour les personnes allergiques aux sous-titres. Les zombies et autres créatures font à eux des bruits et autres cris qui participent à rendre l'ambiance pas particulièrement chaleureuse. Mais pour ce qui est des musiques, il y a d'autres choses à dire.

Comme son illustre prédécesseur, le Resident Evil 2 original bénéficiait de pistes qui, 20 ans plus tard, résonnent encore dans la tête des fans de la série. Malheureusement, les musiques du remake ne sont pas aussi marquantes et sont plus discrètes que ne l'étaient leurs illustres aînées. Dans le Resident Evil 2 original, les musiques correspondaient à des lieux précis et à des situations. Ici, elles servent principalement à accentuer des situations ponctuelles. Les salles de sauvegardes n'ont par exemple plus de musique attitrée. Le thème musical qui se déclenche lors de la première arrivée dans le hall du commissariat est absent lui aussi. Et pour les fans de la série, cette absence se fait sentir.

Le seul élément sonore qui sort vraiment du lot, et dans le bon sens du terme, ici est le traitement accordé à l'accompagnement sonore des passages dans lesquels figurent Mr. X. Lorsque ce dernier s'approche de la pièce dans laquelle se trouve le héros, il est possible d'entendre de lourds bruits de pas à travers les murs. L'arrivée du Tyrant à proximité immédiate du joueur est quant à elle systématiquement accompagnée du démarrage d'un thème musical spécial pour le moins angoissant. Ces deux éléments contribuent à accentuer la tension et la sensation de danger de la situation. Dans l'ensemble, le traitement accordé à cet ennemi est de premier choix et fait rêver sur ce que Capcom pourrait faire avec le Nemesis...

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L'AVIS DE LA RÉDAC' :

D'AUTRES MEMBRES DE L'ÉQUIPE VOUS DONNENT LEUR AVIS...

PLUME : Dans sa quête de faire à nouveau de Resident Evil une licence qui pèse de tout son poids dans le genre qu'elle a popularisé, Capcom s'en sort à nouveau très bien. Moderniser un monument comme Resident Evil 2 n'était pas une mince affaire. Mais la firme d'Osaka y est parvenu. Je ne compte plus les heures passées sur l'original, il y a plus de vingt ans. La peur qu'il m'a faisait ressentir alors - qui s'était muée en assurance à mesure que j'enchaînais les parties pour découvrir tous les scénarios - , elle, était toujours là, enfouie. Elle a resurgi rapidement. Je ne parle pas de la crainte de voir des zombies et autres créatures dégueulasses, de devoir supporter ces organes, ces membres et ces crânes qui se désintègrent sans concession. C'est cette trouille savamment entretenue de ne pas savoir ce qui m'attend au détour d'un couloir et si je tiendrai encore debout à l'issue d'un éventuel affrontement. Caméra derrière l'épaule et pénombre omniprésente font remonter cette sensation d'insécurité qui, à l'époque, tenait beaucoup à la rigidité et aux angles de vue fixes. Les jeux d'ombre et les bruitages ultra-malsains - tout comme leur absence - ainsi que la résistance peut-être un poil abusée des zombies poussent à bien gérer ses ressources, très maigres, fuir quand il le faut et sauvegarder fréquemment. On est constamment pris en étau entre la prudence exagérée et l'urgence. Ça jumpscare souvent. Les énigmes sont bien conçues. On backtracke avec les chocottes parce que Mister X rôde. On est dans un survival horror d'une efficacité redoutable. Et un remake fidèle, sublime visuellement, qui dispose de tous les aménagements (les points d'intérêts sur la map et les raccourcis d'armes en tête) pour s'imposer comme une réussite incontestable.

Il y a tout de même quelques regrets me concernant lors de cette échappée aux côtés de Claire et Leon. Puisqu'il y eu refonte, pourquoi ne pas avoir tenté davantage de différences concernant certains puzzles et affrontements dans les trames bis ? Ne pas avoir songé à des possibilités d'esquive ou d'instant kill lorsque l'on réussit à se faufiler à tâtons derrière un ennemi ? Certaines incohérences agaçantes (on est bloqué par une porte grillagée une seconde après avoir récupéré une pince coupante, on ne peut pas franchir un trou de moins d'un mètre de large...) ainsi que des dialogues et interprétations très série Z font aussi un peu mal, même s'il m'est impossible de dire que j'ai boudé mon plaisir durant les 16 heures passées sur Resident Evil 2. J'ai eu ce que je désirais et parfois plus. J'imagine que les fans n'en pourront plus d'extase. De mon côté, c'est un 8/10 qui frôle le 9.

THOMAS : Je n'ai jamais fait mystère de mon aberration philosophique pour les remakes, et j'ai pourtant passé un très bon moment sur Resident Evil 2, qui nous rappelle que la série n'avait pas besoin de devenir un pastiche de film de série Z pour continuer à exister. Malsain, bien rythmé et exploitant de fort belle manière la dualité entre l'obscurité et la lumière, le jeu s'en tient à ce qu'il était : un labyrinthe peuplé de zombis où la survie se joue souvent à peu de choses. Pourtant, il n'y a pour ainsi dire rien de neuf dans Resident Evil 2, et l'ajout d'un arc en forme de fil rouge comme l'histoire de Lisa se fait du coup ressentir.

Mais qu'importe au final : même avec son acting discutable et son character design impie, Resident Evil 2 gagne son pari en proposant une version complètement dépoussiérée du classique de 1998, et nous offre une belle occasion de tamiser les lumières et d'enfiler un casque pour se taper une bonne dose de stress comme à l'époque, avec quelques années de plus au compteur.