Si vous n'avez pas joué au premier épisode, vous savez que vous risquez de vous spoiler la tronche en lisant ce test. Ne vous plaignez pas que personne ne vous a prévenu.

Une fois que l'on s'est découvert le pouvoir de remonter le temps, que fait-on ? On continue à vivre sa vie d'étudiante douée et un peu introvertie, mais pas sans garder certaines choses dans un coin de sa tête. Tout ce qui a pu se produire auparavant, de la tentative de meurtre avortée aux problèmes sous-jacents d'autres gens croisés à Arcadia Bay et au sein de son université, est encore ancré dans la mémoire de Maxine. Et elle compte bien mener quelques enquêtes. Tout en renouant avec une meilleure amie d'enfance un brin sceptique à l'évocation d'une capacité spéciale qui semble plus capricieuse qu'escompté.

Attrape-coeur

Rien de ce que l'on a pu apprécier dans l'épisode initial ne s'est évaporé. On retrouve toujours cette atmosphère de fin d'adolescence, teintée de nostalgie, bercée par des mélodies folk d'une beauté insolente, qui nous fait penser à ces dimanches à regarder Dawson ou Les Freres Scott au chaud sous son plaid. Il y a cette patte envoûtante, cette intrigue et ces interactions humaines - et thèmes, comme le harcèlement, les moyens de se défendre ou l'usage malveillant des réseaux sociaux - tout ce qu'il y a de plus réel et actuel sur quoi plane cette faculté à la Butterfly Effect. La formule a l'air bien parti pour fonctionner. Si le rythme de l'exploration peut s'avérer assez lancinant et que la plupart des interactions et retours en arrière ne semblent avoir aucune autre importance que de se donner bonne conscience ou connaître davantage des personnages de plus en plus intéressants, il faut toujours se méfier. Le moindre détail peut compter. Et quelques séquences vont très vite faire accélérer notre palpitant. Renforçant l'idée que les développeurs tiennent le bon bout.

Under Pressure

On note ainsi, après une phase de recherche d'objets rallongeant artificiellement une durée de vie estimée à deux heures environ, un moment sous très haute pression. En vue de sauver une âme assez mal barrée, il faudra se remémorer que le rewind, principale mécanique de gameplay pour les dialogues comme les "puzzles", a différentes vertus. Il permet de conserver les objets récupérés et maintenir sa position présente dans le (nouveau) passé. Pas question pour le jeu de se montrer punitif et frustrant, mais juste ce qu'il faut pour qu'on ressente un minimum de stress en activant sa matière grise. Il y a aussi des choix de répliques implacables, du genre à faire froncer les sourcils et chatouiller le haut du crâne, notamment à l'approche de la conclusion, après la scène la plus réussie. Celle-ci démarre avec un effet visuel carrément sympathique et s'achève alors que Max réalise qu'elle ne maîtrise plus le temps. Coincée, dos au mur, sans possibilité de réparer un couac grâce à sa magie, elle doit alors s'en remettre à vous. Avez-vous pris soin de ceux qui le méritaient ? Saurez-vous trouver les mots ? Ferez-vous la tronche en regardant les statistiques de vos amis après l'épilogue ? Mais surtout : saurez-vous attendre patiemment la suite ?

Max avait besoin de faire ses preuves, de confirmer. Voilà qu'elle passe le second acte avec mention Très Bien. Les forces du premier épisode demeurent immuables et on ne peut que constater que Dontnod est en train de bâtir un titre aussi envoûtant que solide. Pas si minimaliste et gagnant en assurance à mesure que son intrigue se dévoile, Life is Strange pourrait bien, au final, figurer parmi les plus belles surprises de l'année. On y croit fort.