Keiji Inafune, Hideo Kojima, Eiji Aonuma... Il fut un temps où toutes ces grandes signatures du jeu vidéo n’étaient même pas gratifiées de leur création. Seul l’éditeur pour lequel il travaillait avait le droit d’être cité sur les écrans et boîtes de jeu. Le culte absolu du consensus si cher aux traditions entrepreneuriales du Japon y est pour beaucoup, mais n’explique pas tout. Les acteurs de l’édition voyaient d’un mauvais oeil la starification rampante des développeurs doués alors qu’ils étaient considérés comme une simple et anonyme force de travail.
 
En attendant le vedettariat, ces ouvriers du code avaient trouvé dans l’insertion de messages cachés à l’intérieur d’un jeu vidéo un exutoire à leur soif d’existence sociale. Ceux-ci pouvaient prendre la forme de diatribe en direction de l’employeur voire d’annonce à caractère loufoque.
 
 
C’est ainsi que dans le portage du hit Commando sur Famicom, un programmeur n’a pas hésité à glisser une complainte, immortalisant sa frustration de n’avoir pu assister à un concert donné par une star de la chanson nippone des années 80, Mamiko Takai en raison du déménagement du quartier général de Capcom. Mieux, si le joueur parvenait à finir Commando avec trois et vingt-quatre grenades au compteur (la date de naissance du codeur, 23 mars), un message de remerciement l’invitait à acheter le prochain projet dans lequel il était enrôlé, Captain Higemaru.
 
Bien plus impertinent, un développeur du jeu Erika and Satoru’s Dream Adventure (Famicom) s’était lancé dans une violente et graveleuse charge contre ses collègues de travail en prenant à témoin le joueur. Après une heure trente de veille suivie d’une complexe combinaison de boutons, sa déposition sans nuance ni retenue se livrait au joueur. Dans un vocabulaire fleuri, le programmeur déplorait l’hygiène détestable de sa collègue de travail qui ne prend pas le soin de prendre « une douche après six rapports sexuels dans la même nuit ». Ou encore ce codeur arrivé en retard pendant la finalisation du jeu, qu’un geste d’excuse caractérisé par « tout le porno offert » n’effacera pas cette faute professionnelle. Quand ce n’est pas le débogueur du jeu « tournant autour du planificateur de projet » dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles...
 
 
Des détails bien salaces qui auraient fait désordre s’ils étaient portés à la connaissance du grand public et surtout des contrôles qualité de Nintendo réputés pour leur sévérité !