Quelle est, à votre avis, la spécialité de la Suisse?
Les horloges?
Oh oh! C’est tellement cliché…
Allez, deuxième chance.
Voler l’or des juifs et offrir des billets d’avions pour l’Argentine aux nazis?
Ouais ça aussi, c’est bon, mais vous n’y êtes pas.
La vraie spécialité de la Suisse, c’est le mercenariat.
Marignan, 1515! Qui ici, pourra dire, si il est français, que ces mots n’ont pas résonné à ses oreilles?
De cette bataille des Guerres d’Italie, nous retiendrons que les Suisses font toujours grand cas de leurs mercenaires que l’on disait redoutables.
Le souverain pontife n’est-il pas défendu encore aujourd’hui par ces courageux helvètes qui se battent toujours à la hallebarde à l’époque des Sig Sauer et des Glocks ?
Respectant farouchement cette tradition de neutralité et d'indépendance, la Suisse en 1988 est bien décidée à montrer à l’Eurovision (et donc accessoirement à l'univers) que si ils veulent gagner, ils le peuvent.
Ne reculant devant rien, ils n’hésiteront pas à franchir leurs Alpes imprenablement neutres pour se transporter jusqu’au Québec pour chercher LE talent et le faire venir en Europe.
Céline Dion, devenue pour l'occasion véritable mercenaire de la chanson, va vendre sa voix à la Confédération et les conduira, laborieusement, sur le chemin de la victoire.
La France, faisant pour une fois preuve de clairvoyance, ne donnera qu’un point à la québécoise, comme si le pays qui aligne Gérard Lenorman cette année, se doute que son destin sera intimement lié à cette chanteuse pour le meilleur et surtout le pire.
Avec "Ne partez pas sans moi" se pose l’avertissement lancé à la face du monde d'un pays qui est prêt à défendre sa neutralité jusqu’au bout.
Si les autres pays, en cette fin de Guerre Froide, arborent la puissance de la dissuasion nucléaire pour asseoir leur prépondérance à l'international, la Suisse, elle, préfère prouver qu’ils sont capables de tout, même de faire 6179 km pour réveiller l'un des pires fléaux de l'humanité et gagner l’Eurovision sur un caprice.
C’est des fous, ces mecs…