Benjamin Constant est surtout connu aujourd'hui pour son roman Adolphe. Une histoire d'amour où se mêlent le
cérébral et le sentimental. Même s'il est réducteur de résumer notre ami à ce seul titre, il faut convenir que le-dit livre renferme quelques
passages touchants où le style, précieux mais jamais maniéré,
arrive à retranscrire ces évolutions infimes des sentiments d'un être en proie à l'amour.

Dans le passage qui va suivre, notre narrateur/personnage évoque la
complexité de l'homme
et toute la difficulté d'aborder la femme que
l'on aime. Simple, juste, touchant.

Benjamin nous
parle de l'homme et de sa complexité

"Cette situation se prolongea. Chaque
jour, je fixais le lendemain comme l'époque invariable d'une déclaration positive, et chaque lendemain s'écoulait comme la veille. Ma timidité
me quittait dès que je m'éloignais d'Ellénore; je reprenais alors mes
plans habiles et mes profondes combinaisons : mais à peine me
retrouvais-je auprès d'elle, que je me sentais de nouveau tremblant et
troublé. Quiconque aurait lu dans mon coeur, en son absence, m'aurait
pris pour un séducteur froid et peu sensible; quiconque m'eût aperçu à
ses côtés eût cru reconnaître en moi un amant novice, interdit et
passionné. L'on se serait également trompé dans ces deux jugements : il
n'y a point d'unité complète dans l'homme et presque jamais personne
n'est tout à fait sincère ni tout à fait de mauvaise foi.
"