Le confinement ne vous empêche pas de vivre ? Mi'pu'mi vous en ressert une louche toute virtuelle en vous mettant dans la peau velue de Jorge, ex-flic cloué à son fauteuil roulant, ne pouvant quitter son appartement. Ruminant son passé, cet ex-flic acariâtre n'a pour seule occupation quotidienne, en dehors de la lecture du journal gentiment déposé sur son pallier par un des bambins de l'immeuble, que l'observation des alentours depuis son balcon. La petite place charmante du Barcelone de 1977 est son théâtre personnel. Ses jumelles ne manquent rien. Il connaît chaque habitant, sa petite histoire, ou presque. Mais par une nuit tempétueuse, ses certitudes vont voler en éclats. Un meurtre a été commis. L'irruption chez lui de Melinda, une jeune journaliste qui devait rencontrer la victime pour un article, va le forcer, à reprendre ses vieilles habitudes.

Le crime qui y va... Franco

Qui était le macchabée ? Qui lui a fait passer l'arme à gauche ? Hormis la petite mamie en face, qui a assisté à la scène ? D'autres riverains seraient-ils impliqués ? Du côté du troquet, de l'église, du cabaret ? Pas facile de mener une enquête quand on reste confiné à son deuxième étage, et qu'il faut donc tirer un trait sur la possibilité d'interagir avec d'éventuels témoins et indices. Heureusement, Melinda, qui veut tout autant que Jorge connaître le fin mot de l'histoire, a l'usage de ses jambes, de bons yeux, et une langue bien pendue. Le joueur limité dans ses déplacements va donc s'en remettre à elle pour suivre les maigres pistes et tirer les vers du nez de celles et ceux qui pourraient avoir une attitude un peu louche. La façon de procéder est simple, grâce aux lorgnettes grossissantes, un appareil photo et un talkie-walkie. De son domicile, Jorge guide l'intrépide reporter vers les points d'intérêt qu'il va débusquer, avec l'aide d'une liste d'objectifs inspirés par son expérience de policier, et prend des clichés pour appuyer ses convictions. Petit à petit, de façon assez balisée, les noeuds de l'intrigue se défont. Vos soupçons s'orientent Deux heures plus tard, environ, après quelques choix qui auront guidé la trame, on tire des conclusions (pas forcément probantes) sur son tableau. Et le constat général ne se révèle pas heureux.

Immersion impossible

Car hélas, si on apprécie l'idée de départ de The Flower Collectors, inspiré de Fenêtre sur Cour et Firewatch, saupoudré d'une touche de Blacksad pour sa galerie de personnages anthropomorphes, que son contexte géographique et politique justifient habilement certaines idées scénaristiques, il faut reconnaître que sa maladresse gâche un peu tout. Là où The Lion's Song maîtrisait son pixel art pour faire briller sa délicatesse et son ton mélancolique, le nouveau jeu de Mi'pu'mi se vautre sur la technique de manière déprimante, ne parvenant jamais à générer de tension ou de surprise, et encore moins entretenir son atmosphère de thriller - interactif dans une certaine mesure. Les doubleurs font ce qu'ils peuvent, tout comme la bande-son. Reste que les ambitions artistiques se heurtent malheureusement à un mur fait de modélisations trop sommaires et d'animations peu nombreuses, rigides, inappropriées, avec des transitions effroyables qu'on tolérerait déjà à peine dans un projet encore à la phase alpha de son développement. Impossible de se sentir réellement happé par cet univers sans vie, dont on voit un peu trop les coutures. Et dès lors que les séquences où le temps nous est compté et où l'on doit respecter une certaine discrétion souffrent d'un manque d'inspiration et d'encadrement flagrant, sans aucun effet de mise en scène pour jouer l'esbroufe, on éprouve beaucoup de peine à mener l'investigation à son terme.