Asura's Wrath est à l'image des créatifs qui lui ont donné vie, et se présente comme la somme de centaines d'inspirations et de références tirées du shônen, de Dragon Ball Z à Saint Seiya, en passant par One Piece et Naruto, et en s'écartant du genre sus-cité, de Ken le Survivant, Princesse Mononoké ou encore Star Wars (!). Le tout à la sauce védique.

Quand Brahma fusionne avec Végéta...

De manière simplifiée, Asura's Wrath, dans sa direction artistique et son intrigue, c'est la mythologie indienne turbo-remixée façon DBZ. Et Le Courroux d'Asura s'explique de la manière suivante. Huit généraux divins, descendants d'humains génétiquement modifiés, des demi-dieux aux pouvoirs inouïs, combattent les Gohmas. Il s'agit d'une entité maléfique prenant le plus souvent la forme d'animaux, générée par Gaea, la planète que protège les Généraux, en répercussion aux souffrances qui ont été infligées à l'écosystème de ce monde par une technologie destructrice et polluante, la même qui a amené la civilisation des dieux jusqu'à son niveau de sophistication et de puissance phénoménal. Voulant en finir définitivement avec la menace Gohma et ayant besoin en cela d'une très grande quantité de manthra (une énergie infinie fournie par les prières des croyants), Deus, le tout puissant général en chef des Huit, va organiser un coup d'état, dans lequel Asura, lui-même membre des Huit Généraux, va être accusé d'un meurtre qu'il n'a pas commis et où sa femme et sa fille vont lui être enlevées. Trahi par ses sept camarades (y compris son beau-frère Yasha), Asura va être banni au Naraka, limbes entre Gaea et l'enfer Gohma, où il passera 12.000 ans, des siècles et des siècles durant lesquels les sept généraux, désormais appelés les Sept Divinités, auront considérablement gagnés en puissance. Mû par la rage, Asura n'a désormais alors que pour seuls objectifs de retrouver sa fille captive et de se venger de ceux qui l'ont trahi.

Le meilleur du shônen

S'il était important de s'intéresser en détail à l'histoire d'Asura's Wrath, c'est parce que vous le savez bien, ce titre CyberConnect2 / Capcom se rapproche bien plus du dessin animé interactif que d'autres jeux vidéo. Ainsi, soyons clairs là-dessus, c'est de cette manière que nous l'envisagerons dans cette critique. Il s'agit bien de juger un titre par rapport à ce qu'il est, et non par rapport à ce que l'on croyait qu'il était ou ce que l'on voulait qu'il soit. C'est pour cela aussi qu'il est essentiel de s'intéresser à la direction artistique, la mise en scène et la musique d'Asura's Wrath, avant d'aborder bien évidemment en détails son gameplay, ce à quoi nous nous emploierons plus loin dans ce texte. DA, musique et mise en scène sont les trois points forts d'Asura et permettent d'établir d'emblée, par votre adhésion ou non, votre propension a apprécier le titre. Les personnages crées par Yosuke Tokitsu possèdent une classe folle et un charisme qui emballeront à coup sûr n'importe quel amateur d'anime. D'autant plus que la puissance des divinités est mise en scène d'une manière totalement démesurée, avec certaines attaques qui traversent Gaea d'un pôle à l'autre ! A côté des affrontements titanesques que l'on trouve dans Asura's Wrath, ceux de Goku, même quand il fait appel au Genki Dama, paraissent presque raisonnables ! Enfin, les thèmes de Chikayo Fukuda sont absolument sublimes, métissage d'influences asiatiques, et l'on est agréablement surpris par le thème western de Yasha ou encore la Symphonie du Nouveau Monde qui résonne de toute sa grandiloquence lors du combat contre Augus, des compositions qui amènent au final une certaine variété et en tout cas, une personnalité indéniable à l'ensemble. Cependant, après toutes ces louanges, on reconnaîtra que la narration si elle gagne en spectaculaire au fil du jeu, perd aussi un peu en intensité dramatique, à l'image d'une fin finalement assez convenue. Si l'univers d'Asura's Wrath, sa démesure hors du commun, en font d'emblée un titre séduisant, intéressons-nous maintenant au gameplay, celui même qui semble faire polémique depuis que beaucoup d'entre vous ont pu s'essayer à la démo.

Ambition démesurée ?

Concrètement, Asura's Wrath possède un gameplay divisé en trois genres, qui se retrouvent associés dans les phases de jeu, qui elles-mêmes se découpent en dix-huit chapitres, trois actes et six heures de jeu. Le QTE (on appuie rapidement sur un bouton, on martèle une touche), le beat'em all (on tabasse à tout va, enchaînant coups de pied et de poing) et de rail shooter (on alterne le tir rapide et on verrouile des cibles multiples pour une attaque plus puissante). Il n'y a pas grand chose à dire des phases de QTE qui s'inscrivent dans des scènes évidemment très cinématiques. Assez tolérantes, ces phases de QTE sont en cela décevantes que le résultat de leur réussite ou de leur échec ne change rien au déroulement de l'histoire. Vous serez seulement récompensé d'un taux de "synchronisation" élevé à la fin du chapitre si vous avez appuyé aux bons moments et voilà tout. Et c'est là l'un des points les plus décevants d'Asura's Wrath, ce jeu qui se veut être une histoire interactive ne possède pas d'embranchements multiples, ce qui aurait donné par ailleurs une envie supplémentaire de refaire le titre une seconde fois, si ce n'est pour autre chose que d'obtenir des rangs "S" à plusieurs chapitres et ainsi s'ouvrir l'accès au "chapitre occulte", la vraie fin du jeu. Les phases de beat'em all sont elles aussi assez limitées et les coups proposés jusqu'à ce que notre barre de furie se remplisse et qu'ainsi l'histoire progresse, répétitifs.

Ce qui est assez dommage, c'est que les tous premiers trailers d'Asura donnaient à voir des prises, des enchaînements de coups qui finalement ne sont pas présents dans la version finale. Ainsi, si les combats très soignés dans leur mise en scène face aux Divinités sont vraiment grisants, les combats face aux troupes célestes ou aux Gohmas, se répètent bien souvent, les boss tortues géantes ou éléphants devant même être combattus plusieurs fois, une forme de recyclage assez malvenue. Enfin les phases de rail shooter, si elles sont assez spectaculaires dans leur mise en scène, proposent finalement un gameplay assez sommaire et ne donnent jamais la pleine mesure de ce qu'elles auraient pu être être dans un jeu à l'envergure tellement démesurée. Même la phase où l'on incarne Yasha, plutôt trépidante, ne saurait faire oublier que son maniement est finalement assez similaire à celui du protagoniste principal. De plus, bien que ne souffrant pas de lacunes rédhibitoires, la réalisation ne suit pas toujours vraiment l'ambition artistique très travaillée du titre. On sent que l'Unreal Engine a donné un peu de mal aux équipes de CC2 et le tearing se fait bien souvent sentir, ce qui est vraiment dommageable au regard d'une direction artistique de si haute volée.

A l'heure des comptes, il n'est pas simple d'avoir un avis tranché sur Asura's Wrath. D'un côté, la direction artistique somptueuse du titre, portée par une mise en scène titanesque et des musiques sublimes, suscitent l'adhésion immédiate et il bien difficile quand on est mordu d'animation japonaise, de ne pas s'incliner devant la somme de tant de références. Mais qu'en est-il au final du véritable intérêt ludique ? Dans un jeu qui se finit en six heures et dans lequel les scènes jouées mises bout à bout constituent à peu près deux heures de l'expérience, on peut s'interroger. Mais le problème n'est pas là, si on oublie les phases de beat'em all trop sommaires qui font un peu office de rallonge à la durée de vie dans une intrigue surtout intéressante pour ses combats de Boss. Le vrai souci, c'est que si Asura se voulait un vrai dessin animé interactif, il aurait fallu l'assumer totalement avec par exemple des embranchements selon les performances du joueur dans l'histoire. Ainsi, si c'est un bon moment que l'on passe avec Asura's Wrath, la regrettable sensation d'être passé à côté d'un jeu qui aurait pu être autrement plus abouti demeure. Surtout si c'est au prix fort que l'on s'est procuré le titre. Cependant, "Asura's" pose les jalons d'un univers fascinant dans lequel on aimerait de nouveau se plonger, dans un jeu qui aurait réellement trouvé ses marques et puisse donner toute la mesure de son ambition artistique.