Le Seigneur des Anneaux : La Guerre du Nord part plutôt d'une bonne idée, celle de vous faire découvrir une aventure parallèle à celle de la Communauté de l'Anneau (dont vous croiserez les membres), avec trois personnages partant défier de leur côté les forces de Sauron, et en particulier un de ses lieutenants, Agandaùr. Vous pouvez ici incarner au choix Farin, un nain (forcément barbu), Eradan, un rôdeur Dunedain (forcément agile) ou Andriel, une magicienne elfe (forcément bonnasse). A chaque personnage son arbre de compétences, qui peut se résumer en gros à : jouer les tanks pour le nain (cri de guerre pour attirer les ennemis, plus grande résistance, spécialisation possible au bouclier...), cribler de flèches les ennemis pour le ranger (qui peut aussi faire très mal au corps à corps en se battant en ambidextre, et qui est capable d'éviter les coups des adversaires en mode "évasion") et jouer les rôles de protectrice et de soigneuse pour l'elfe (pas maladroite non plus avec un bon bâton entre les mains ; ses projectiles magiques font aussi très mal). Bref, que du classique, mais l'univers du Seigneur des Anneaux étant un peu à la base des univers fantasy, on évitera de crier au scandale.

Le debugging pour les nuls

On a beau appréhender cette Guerre du Nord avec les meilleures intentions du monde, les premiers pas dans le jeu ne sont pas accompagnés de sensations d'émoi particulières. De l'auberge du Poney Fringant, on ne retiendra au final pas grand-chose : quelques quêtes d'une banalité affligeante ("J'aime la fille du forgeron, portez-lui ce médaillon qui appartenait à ma mère"... Zzzz...), et une zone de jeu extrêmement réduite, avec à peine une rue principale. Un monde pas vraiment ouvert donc, mais qu'importe les couloirs, pourvu qu'on ait l'ivresse... Ici, ce sera surtout l'ivresse des combats, féroces, qui réclament que vous donniez le meilleur de vous-mêmes. Les affrontements, résolument bourrins et pas toujours très heureux du côté de la gestion des collisions, ont le mérite de profiter d'une belle énergie, avec enchaînements de coups, esquive (la roulade est un must), possibilité de démembrer les ennemis si l'attaque est portée au moment opportun, etc. Les raccourcis (gâchettes + touches) permettent eux d'utiliser rapidement les différents sorts/compétences de son perso. Ca va vite, ça a la pêche, c'est réactif... Avec un peu d'habitude, on en vient à gérer sans problème des affrontements contre deux, trois ou quatre adversaires - les orques, gobelins et autres Uruk-hai sont toujours en surnombre - même si les moments les plus chauds se résument à des courses à la Benny Hill (je fuis, j'arrose à distance les ennemis, je fuis encore, j'arrose de nouveau, etc.). Bref, sans toucher au firmament du hack and slash (Snowblind avait su faire mieux avec Baldur's Gate : Dark Alliance ou Champions of Norrath en leur temps), les sensations se révèlent plutôt bonnes. Gros bémol toutefois : le jeu regorge de bugs en tous genres. Sur PS3 en tout cas, j'ai eu droit, en vrac, à des persos qui parlent sans bouger les lèvres, un PNJ qui a disparu/réapparu le temps d'un loading, un son de mécanisme assourdissant qui s'est répété en boucle (obligé de reprendre une sauvegarde pour le faire disparaître), une araignée qui a tourné en rond comme une folle pendant 30 secondes avant de s'en aller, quelques ennemis amorphes qui se faisaient cribler de flèches sans vraiment réagir... Ah, et ne vous laissez pas berner par la carte globale des Terres du Milieu que vous pouvez afficher, et qui vous donne l'impression que vous allez explorer plusieurs dizaines d'endroits différents (la Moria, le gouffre de Helm, le Mordor...). La plupart ne sont là qu'accompagnés de descriptions, pour "l'enrobage". La durée de vie du titre flirte, en réalité, avec la quinzaine d'heures (un "New Game +" permet de recommencer l'aventure à un niveau de difficulté supérieur, en gardant tout son équipement... faut être motivé). En même temps nous étions prévenus : ce n'est pas pour rien que le jeu s'appelle La Guerre du Nord.

J'aime les moches

Le Seigneur des Anneaux : La Guerre du Nord, c'est un peu cette fille un peu vilaine que vous n'osiez pas présenter aux copains mais qui, dans l'intimité de votre nid douillet, vous faisait des choses qui vous incitaient à oublier son physique ingrat. On a beau traverser le jeu en faisant souvent la moue, il y a ici un souffle épique, un vrai petit quelque chose, qui donne envie de s'accrocher pour évoluer et connaître la suite de l'aventure. En solo, rester motivé se révèle toutefois assez compliqué : non seulement vos compagnons ne réagissent pas toujours comme vous l'entendez (moi qui joue Andriel je ne les vois par exemple jamais se réfugier dans mon "Sanctuaire", une espèce de bulle magique qui soigne et stoppe les flèches ennemies, c'est ballot), et ce ne sont pas les deux ordres de base que vous pouvez leur donner ("attaquez cette cible" et "aidez-moi") qui y changent grand-chose. De surcroît, la gestion de l'inventaire se révèle assez obscure : vous pouvez donner des armes ou armures à vos compagnons mais n'avez pas accès à leur inventaire. Ou plutôt si, mais il faut reprendre une sauvegarde, changer de perso, et même de cette façon, vous n'avez pas la main sur la façon dont les deux héros restants gèrent leur équipement. Vous pouvez bien donner un super bouclier au nain, par exemple, s'il a décidé de ne pas le mettre et de se battre avec juste une arme à une main, vous ne pouvez rien faire. Curieux, et ce n'est là qu'un point de détail parmi d'autres. En split-screen - option bienvenue - on s'amuse davantage mais l'écran partagé verticalement ne laisse plus qu'une visibilité étroite, et gâche un peu le plaisir. Dans l'action, on n'y voit souvent plus rien. Reste la coopération en ligne, à trois, qui semble la seule bonne façon d'appréhender le jeu, en dépit de quelques bizarreries lorsqu'il y a du lag (ennemi mort pour l'un et pas pour l'autre, effet de "téléportation", etc.). En discutant via micro-casque, et en mettant en place de vraies tactiques de combat, l'expérience vécue prend une nouvelle dimension. Une condition sine qua non pour profiter réellement de ce titre par ailleurs perclus de défauts que certains, moins indulgents que moi, jugeront impardonnables.