Nouvel effort des équipes d'Ubisoft Québec, qui ont semble-t-il eu du mal à quitter la mythologie grecque déjà largement évoquée dans Assassin's Creed Odyssey, cette nouvelle aventure nous projette dans les spartiates de Pit Fenyx, le héros des dieux du panthéon local, chargé d'exécuter pour ces flemmards célestes la délicate mission de mettre fin aux agissements de Typhon, le Titan des tempêtes, désireux d'imposer sa vision quelque peu dictatoriale des choses.

Qui dit Carus ?

Dès les premières minutes, il apparaît assez clairement que Kid Icarus n'est pas la seule série dans laquelle les québécois sont allés chercher l'inspiration : ouvert, coloré et environnemental, Immortals : Fenyx Rising sonne également comme une relecture à peine voilée d'un certain Breath of the Wild, et ce ne sont certainement pas ces deux premières heures passées dans le domaine des dieux qui nous aura laissé penser le contraire. Dès les premières minutes, le parallèle est troublant : positionné au sommet d'une colline surplombant une région ou les couleurs rivalisent de saturation, Fenyx peut librement explorer les environs comme bon lui semble : à pieds, en déployant ses ailes pour planer le plus longtemps possible, ou encore se dissimuler dans les hautes herbes pour dompter un... cheval sauvage. Troublant, on vous dit.

Dès les premières foulées, l'affichage de la barre de stamina achève de nous convaincre de ces emprunts qui ne cherchent même pas à s'en cacher, même si les premiers extraits de gameplay ayant fuité par mégarde laissaient entrevoir un affichage encore plus semblable, y compris lors des phases d'escalade. Parlons-en, tiens, de l'escalade : la parenté avec la série opposant les Assassins aux Templiers ayant désormais disparu des communiqués officiels, cette dernière s'affranchit de bien des conventions pour elle aussi se calquer sur celle des dernières aventures de Link : dans Immortals Fenyx Rising, il est ainsi possible de tout escalader, pour peu que votre réserve d'énergie ne le permette.

Statler & Waldorf

Pourtant, le titre d'Ubisoft Québec ne semble pas jouer la carte de la bête copie. Les emprunts sont certes nombreux, mais les habituelles recettes de l'éditeur ont ici et là perduré, et l'on découvre en ouvrant pour la première fois sa world map l'influence d'Assassin's Creed sur le développement, puisqu'apparaissent immédiatement les objectifs de la quête principale, mais aussi de nombreux collectibles et autres défis optionnels qui font encore et toujours la signature d'Ubisoft.

Dans la droite lignée de Valhalla, le zoom permet d'ailleurs de découvrir avant même d'y avoir mis les pieds l'existence d'épreuves ou de loot légendaire cachés dans certains recoins de la map. Ubisoft nous l'a assuré : l'unique zone ici accessible n'est pas représentative du jeu final, qui devrait laisser dès les premières heures une liberté quasi-totale aux aventuriers en sandales. Pour l'heure, la Forge d'Héphaïstos nous servira de terrain de jeu, afin de joyeusement alterner entre puzzles, combats et exploration, le tout sur fond de narration méta-divine, puisque Zeus et Prométhée squattent régulièrement le micro, pour expliciter certains détails de l'environnement, tenter d'orienter la stratégie durant les affrontements les plus dantesques, ou simplement se chercher des poux, juste pour le plaisir, ce qui n'est pas sans rappeler l'ambiance régnant au sein d'une certaine rédaction. Nous sommes évidemment loin des inventives trouvailles d'un Bastion ou d'un The Stanley Parable, mais le duo apporte une légèreté bienvenue à l'ensemble.

CSI : Salamis

Car malgré des teintes éclatantes et des couleurs volontairement saturées, Immortals : Fenyx Rising nous projette dans un univers vraisemblablement tourmenté, puisqu'en plus du bestiaire greco-fantastique systématiquement antagoniste, on croisera sur sa route enveloppes spectrales et autres humanoïdes figés dans la pierre, qui parviennent à créer une ambiance un peu plus travaillée que ce que l'on aurait pu soupçonner. A l'instar de Breath of the Wild (encore lui), les points d'intérêts se distinguent de loin : du temple fièrement érigé au cratère en passant par un caillou insulaire, la géographie des lieux reste lisible, et invite à l'exploration.

La mobilité aérienne de Fenyx permet d'ailleurs de rapidement se jouer des distances, une fois le système de vol maîtrisé, ce qui demandera tout de même quelques essais. C'est d'ailleurs l'un des principaux reproches que l'on pourra adresser à Immortals : Fenyx Rising : soucieux de proposer une grande variété d'approches, le jeu se perd en combinaisons de touches infinies, obligeant les joueurs à mémoriser et jongler avec de nombreux raccourcis assez peu digestes, jusqu'à empêcher de manier correctement la caméra en courant, puisqu'il faudra maintenir une pression continue sur X tout en jouant du stick droit, un exercice bien peu pratique. Voilà sans doute pourquoi il ne nous aura pas été possible de nous rendre au Hall des Dieux, qui permet de personnaliser et de faire progresser son personnage, une absence bien dommage qui nous amène à penser qu'une troisième heure de jeu n'aurait pas été de trop.

Pour ou contre la Titanomachie ?

Les combats illustrent assez bien cette profusion de manipulations : héritage encore bien visible de la première orientation du jeu, les commandes se claquent sur le schéma des derniers Assassin's Creed en date. Ainsi, les attaques faibles et fortes sont respectivement assignées à RB et RT, tandis que l'arc de Pit Fenyx se dégaine logiquement avec LT. Les "ennuis" commencent avec LB, qui rend alors accessible un menu d'attaques spéciales à combiner avec les boutons de façade, mais aussi d'autres gâchettes. Les habitués de la capuche n'y verront rien de problématique, mais le public plus jeune visé par cette nouvelle licence aura sans doute besoin d'un peu de temps pour dompter cette pléthore d'actions qu'il faudra correctement doser dans le feu de l'action.

C'est que la démo qui nous a été présentée ne permettait pas d'améliorer son personnage, malgré les nombreux items récoltés en chemin. Il fallait donc composer avec une barre de stamina qui a tendance à se vider aussi vite que la batterie d'une DualShock 4, ce qui s'avère un peu frustrant lorsque l'on espère tester toutes les possibilités offertes, et elles sont nombreuses. Il faut dire que du mob de base au boss fight, les adversaires invitent à plus de réflexion qu'un bourrinage en règle, puisque certaines attaques s'avéreront bien plus efficace que d'autres, et permettent de vite remplir leur barre de stun, une mécanique décidément bien à la mode cette année. Pour ne pas se faire écraser comme une mouche grecque, il faudra également jouer de l'esquive, un move qui permet de partiellement remplir sa jauge de stamina tout en ralentissant le temps, ce qui confère un supplément de classes à ces phases déjà efficaces, d'autant plus que le bestiaire, sympathique mais prévisible, profite de la même direction artistique lumineuse que les décors environnants. Quel dommage dans ces conditions de se voir régulièrement obligé de s'éloigner pour simplement recharger ses jauges : une mécanique qui rend parfois les combats hachés et peu crédibles.

ON L'ATTEND... AVEC CURIOSITÉ !
Si Immortals : Fenyx Rising ne brille pas franchement par son originalité, Ubisoft semble avoir compris ce qui a fait du dernier Zelda un succès. À défaut de surprendre, les aventures ouvertes et bien rythmées de Fenyx pourraient tout à fait servir de véritable palliatif aux épéistes chagrinés, qui savent désormais que la suite des aventures de Link et Zelda se fera attendre encore quelques temps...