Mais Shadows of the Empire, c'est aussi un antagoniste : Xizor. Peu dépeint lors des scènes plus ou moins cinématiques du jeu, l'humanoïde verdâtre de la race des Falleens est pourtant omniprésent dans les différentes compositions de Joel McNelly, qui s'amuse à le présenter dès la visite auditive d'Imperial City, où le personnage s'annonce à travers des choeurs viennent apporter toute la dramaturgie qui sied à un grand méchant dans l'univers de Star Wars :

Mais la pièce la plus intéressante est sans doute le Thème de Xizor en personne, dans lequel McNelly reprend comme tant d'autres le concept de leitmotiv cher à Wagner, qui consiste à répéter une phrase musicale au sein d'une ou plusieurs oeuvres, et que les amateurs de J-RPG ne connaissent que trop bien grâce à l'utilisation régulière qu'en fera Nobuo Uematsu à partir de Final Fantasy IV. C'est ainsi d'autant plus dommage que le personnage de Xizor n'apparaisse pas plus dans l'adaptation vidéoludique de Shadows of the Empire, puisque son thème nous laisse entrevoir un personnage chaotique, en témoigne ces cuivres en pagaille auxquelles succèdent des vents tout aussi paniqués.

Après deux cycles, l'oeuvre prend une direction bien différente, menaçante mais bien plus structurée, et c'est précisément ce passage qui sera utilisé pour l'avant-dernier stage de Shadows of the Empire. En revanche, les équipes de LucasArts auront jugé utile de couper comme des sagouins le passage arabisant (entre 3:45 et 4:03), qui vient pourtant offrir un peu de respiration : dans un niveau où le joueur va être conduit à blaster à tout va, c'est malheureusement l'action et l'urgence qui doivent dominer...

Night Skies est intéressante à plus d'un titre, puisqu'elle reprend justement cette mélodie au hautbois, lancinante, avant qu'une célèbre Marche Impériale ne vienne rappeler à l'auditeur que dans cet univers lointain, très lointain, l'ombre de l'empire n'est jamais loin... Heureusement, le thème de Luke (qui deviendra a posteriori celui d'Anakin également) vient apporter un peu de lumière, le temps d'une brève parenthèse (de 3:10 à 3:45). Quel dommage que toute cette variété intelligemment entremêlée n'ait pas figuré dans la bande-son du jeu.

L'album comme l'aventure vidéoludique de Dash Rendar se concluent quoi qu'il arrive par The Destruction of Xizor's Palace, qui se permet de décrire sur une dizaine de minutes la chute du prince, mais seul le passage situé entre 5:37 et 6:22, aux accents dramatiques à souhait (merci aux choristes qui ajoutent une touche certaine de dramaturgie) sera chirurgicalement extrait pour être bouclé encore et encore dans la bataille spatiale qui sert de boss final au jeu de 1996. Si l'on pardonnait allègement aux compositions des années 1980 leur brièveté, faute de disposer d'assez de mémoire pour élaborer un phrasé musical complexe, on ne peut que s'attrister devant ce choix, tant cette fresque avait de choses à nous proposer, y compris un parfait entremêlement avec le thème de Darth Vader à partir de 7:50, suivi d'une jolie reprise dans les aigus...

Autant vous dire que si LucasArts se décide un jour à pondre un remake, ou donner suite aux aventures de ce bon vieux Dash (qui a survécu hein, il suffisait de terminer le jeu à un certain niveau de difficulté), il y aurait très largement de quoi faire avec ce seul enregistrement de 1996, qui renferme bon nombre de pépites.