Arrogante. Complexe. Trop chère. Les qualificatifs accompagnant les premiers mois de la PS3 n'avaient rien de particulièrement élogieux. Après deux générations de domination sans partage, Sony trébuchait... Un retard à l'allumage qui allait handicaper la console pendant de longues années. Car même si cela n'a rien de définitif, manquer son lancement n'a évidemment rien anodin.

Aujourd'hui, la PS4 avance avec une philosophie et dynamique diamétralement opposées.

Fini le media-center, place à une console de jeu. Finie l'architecture surpuissante mais complexe à optimiser, place à une machine équilibrée, pensée et réalisée avec les créateurs. "Une simple machine de jeu" dirons certains. "Sony n'ose pas assez" clameront d'autres. Ils auront probablement raison tant le constructeur ne fait finalement que proposer une "évolution" de la génération précédente. Reste que ce que la PS4 fait, elle le fait bien. Dans le même temps, la simplicité du message aura su trouver écho auprès des gamers, les fameux early-adopters, ceux qui font et défont un lancement.

La PS4, l'anti-PS3

Retour en arrière, le 20 février 2013 à New York. Oui, ils étaient nombreux ceux à railler la présentation initiale de la PS4. Il est vrai qu'il manquait une invitée de choix : la console ! Pourtant, rétrospectivement, cela aura permis au constructeur de se concentrer sur son message (une console par et pour des joueurs, ainsi que la fameuse fonction "Share"), tout en renforçant l'attente, permettant de raconter "une histoire" via quelques alléchants teasings, avant le bouquet final lors de l'E3. L'art de la montée en puissance et du story telling.

Le 10 juin 2013, en fin de journée, Sony a commencé à changer de braquet. Quelques heures plus tôt, Microsoft avait réussi sa conférence en effectuant une conférence rythmée et garnie en jeux diversifiés, mais rien n'y aura fait.

Pas de DRM. Pas de connexion permanente. L'anti Xbox One. En quelques minutes, là où Microsoft souhaitait défricher des nouveaux horizons, Sony réaffirmait son soutien au modèle traditionnel... De manière presque irrationnelle, ces annonces firent exploser le coeur des joueurs.

S'inscrire en creux de son concurrent (en se moquant ouvertement au passage), et miser 100% sur le jeu, aura permis à la PS4 d'emporter l'adhésion de la communauté des joueurs... qui oublia vite une conférence finalement pas si palpitante que cela (et l'annonce du jeu en ligne désormais payant. Bien joué Sony).

Ne nous y trompons pas, l'écho de ces annonces ont fait rentrer cette séquence dans l'histoire du jeu vidéo. Un cas à montrer dans toutes les écoles de communication.

Sur place, dans les travées du Convention Center, la tension était palpable dans le camp Microsoft. Difficile en effet pour la firme de Redmond d'accepter que, malgré sa belle conférence, son adversaire principal avait réussi à lui placer un redoutable Ippon. L'E3 était perdu pour MS. L'onde de choc fut d'une telle magnitude qu'à la surprise générale, Microsoft effectuait un profond remaniement des fondamentaux de sa Xbox One dès le 19 juin, quelques jours à peine après la clôture de l'E3. Du jamais vu.

Tout avait basculé.

Un lancement historique

Dès lors, Sony s'est mis à surfer admirablement sur sa vague de sympathie. L'axe numéro un : les joueurs. Et qu'importe si les jeux de lancement n'étaient ni très nombreux, ni très glorieux. Le message avait fait mouche... aidé par les premiers comparatifs techniques, tous à l'avantage de la PS4. Même minime, la fréquente différence de résolution (1080p/720p) cristallisait les débats. C'est d'ailleurs encore aujourd'hui le cas. La machine la moins chère (100€ de moins) était donc la plus puissante. Dévastateur.


VOIR LES DIFFERENTS COMPARATIFS PS4 vs XBOX ONE


Puissante, racée, et "cool"... la PS4 s'installait alors dans les esprits comme la console à avoir... et comme dans ce genre de cas, l'irrationnel s'invitant rapidement à la fête le buzz pris le relais déclenchant un cercle résolument vertueux.

Fin 2013, pour Microsoft la pilule est évidemment difficile à avaler. Le démarrage de la Xbox One se révèle en effet excellent. Bien meilleur que ceux réalisés en leurs temps par la Xbox et la Xbox 360. Malheureusement la concurrente, partie en même temps, ne se contente pas d'un beau démarrage... elle bat tous les records. Résultat, Sony remporta une bataille de plus, celle du lancement.

Un marathon...

Si la PS4 domine actuellement avec près de 3 millions de consoles d'avance sur la Xbox One, croire que la bataille est d'ores et déjà gagné pour Sony serait bien méconnaître les forces en présence et l'industrie du jeu vidéo.

Après avoir connu une année complexe à gérer, Microsoft n'a eu d'autres solutions qu'une nouvelle volte-face. Kinect, que nous n'hésitions pas de qualifier de "boulet de la Xbox One", est désormais officiellement accessoire. Résultat immédiat, la Xbox One aligne son prix sur celui de la PS4. En réalité, 6 mois après son démarrage officiel, la guerre va réellement pouvoir commencer... trop tard pour la Xbox One ?

Si différentes, et pourtant si proches

PS4 et Xbox One. Xbox One et PS4. Rarement deux consoles n'auront été aussi proches. Après les (nombreux) revirements de Microsoft, le coeur des deux machines est désormais quasi similaire, leur puissance et maintenant leurs prix aussi. Pour trancher, restera donc les exclusivités... qu'il s'agisse des jeux, et des services.

Dans ce domaine, on connaît la puissance de feu (financière) d'un Microsoft. Une profondeur de chéquier sans commune mesure avec un Sony toujours mal en point économiquement. Au-delà de leurs auras respectives, la puissance commerciale des grosses licences Xbox comme Halo ou Gears of War ne sont plus à prouver. Forza Motorsport n'a désormais plus à rougir avec Gran Turismo. Sans compter les surprises. En clair, dans le domaine pur du jeu, Microsoft a amplement les moyens d'accélérer. Sony semble l'avoir compris et tente de séduire de en plus en plus d'indépendants afin d'étoffer son catalogue et son image, sans avoir à sortir des millions. Et Sony a Naughty Dog. Le duel va donc se muscler sérieusement.

Sur le front des services, si de nombreux aménagements restent à effectuer pour améliorer l'expérience utilisateur, l'aspect media-center de la Xbox One pourrait encore nous surprendre à l'avenir. La Xbox 360 l'a prouvé, Microsoft sait faire évoluer très régulièrement sa machine d'un point de vue software... au point que la Xbox 360 de 2005 n'avait plus rien à voir avec celle de 2013. Doit-on s'attendre à la même chose avec la One ? C'est probable... même si Sony montre aussi depuis quelques mois de belles ambitions dans le domaine (Streaming, ShareFactory...)

Autre point non négligeable à souligner : la Xbox One n'est actuellement disponible que dans 13 pays... soit bien loin des 70 territoires couverts par la PS4. En septembre 2014, Microsoft livrera (enfin) sa console dans 27 pays supplémentaires, dont le Japon... et la Chine où la PS4 arrivera aussi plus tard. Autant dire que, mécaniquement, Microsoft devrait connaître une belle accélération des ventes de sa machine...

Les prochaines guerres

Si la génération précédente aura été longue, très longue, cette nouvelle ère n'est pas non plus amenée à se dissiper en 2 ans. Et pour tenir la pression, pour redynamiser ses machines, il semble acquis que les constructeurs devront partir défricher d'autres territoires en cours de route...

Avec l'excitant Project Morpheus, la réalité virtuelle s'annonce comme l'arme de Sony, là où Microsoft pourrait miser sur la réalité augmentée via des lunettes encore non-officialisées. A moins que le fameux IllumiRoom refasse parler de lui. Même s'ils restent encore évanescents, ces éléments n'ont rien d'anodins. Microsoft avait en effet su booster les ventes de la Xbox 360 grâce à l'introduction (réussie) de Kinect premier du nom.


A VOIR
Nous avons testé Project Morpheus sur PS4


Plus proche de nous, la maîtrise des réseaux s'annonce comme l'une des clef du succès. Microsoft a annoncé depuis le début miser gros sur le Cloud et les améliorations que cela pourrait apporter directement pour les joueurs. Nous attendons toujours...

De son côté, Sony s'apprête à lancer son service PlayStation Now avec une sorte de service de location de jeux. De la VOD pour les jeux. Du GOD en somme. Beaucoup de questions restent en suspend concernant cette offre comme son prix et sa qualité finale. Mais il est indéniable que le jeu avance vers cette voie.

N'oublions pas non plus que Nintendo n'a pas dit son dernier mot. Certes le géant de Kyoto n'est pas au mieux actuellement, mais la puissance de ses marques demeurent magique. Et si Nintendo renouait avec le succès grâce à de belles interactions en NFC ? Et si Nintendo se lançait plus vite que prévu dans la "next-next generation" ? Rien n'est acquis et le jeu vidéo prouve depuis ses origines qu'il est bien difficile de rester un éternel leader. Rien ne servirait de courir, il faudrait partir à point, dit-on...

Reste à savoir aussi lequel des trois sera le mieux armé pour ce Noël. Le report d'un The Order : 1886 fait ainsi désordre dans le line-up d'exclusivité PS4. Mais Quantum Break et Halo 5 ne sortiront pas avant 2015. Plus les semaines passent, plus il apparaît clair qu'il faudra attendre l'année prochaine pour un vrai, un franc démarrage ludique. En attendant, c'est un fait, les joueurs continuent à s'équiper. Massivement. L'attente monte. Reste qu'il est bien difficile de savoir qui sera leader dans 5 ans...

C'est indéniable, la PS4 a réussi un tour de force historique. Jamais une console ne s'était imposée aussi vite. Mais la route est encore longue et les batailles à remporter, certaines plus décisives que d'autres, ne manqueront pas.

Le Sony qui a su satelliser la PS4, a jusqu'à présent brillé par son intelligence (écouter joueurs et créateurs) et sa simplicité. Espérons que l'arrogance d'antan ne rejaillisse pas, car les vérités du jour peuvent vite s'évanouir.

Une certitude : Nintendo, Sony et Microsoft sont désormais lancés. Chacun avec leurs qualités et leurs défauts. Le succès de la PS4 est une chance pour tous. Il tire le média vers le haut, obligeant chacun à proposer le meilleur. Une concurrence plus féroce que jamais qui ne débouchera que sur une réalité : de meilleurs jeux et de meilleures expériences ludiques pour nous, les joueurs.

Vivement l'E3 pour le prochain Round. Vous pourrez évidemment le suivre sur Gameblog, dès samedi 7 juin, avec notre équipe sur place.


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