Dans quatre jours sortira enfin en France le dernier épisode de la trilogie constituée autour de Final Fantasy XIII. Non que l'attente des joueurs soit à son comble, et pour cause : en mars 2010, de nombreux débats ont animé les forums suite à la publication du titre fondateur de la Fabula Nova Crystallis. Fans comme profanes, tous alors ont exprimé leur opposition au nouvel épisode canonique. Plus qu'aucun autre volet, FF XIII a été accusé de trahison. Qu'il fût un bon ou un mauvais jeu n'avait plus d'importance : du fait qu'il se détournait de ses origines, qu'il bafouait son nom, ce volet avait tout du blasphème ! Jay est l'un des rares à l'avoir défendu, je l'ai donc interrogé à ce sujet et voici sa réponse : "Si FF XIII n'est pas un Final Fantasy alors les autres non plus ; en particulier les épisodes "PlayStation" à savoir du VII au X. On va faire un jeu pour tenter de comprendre. Levez les yeux vers le plafond et projetez-y une image d'un décor de FFXIII. Remplacez la 3D par une 2D à la FFVI ou du pré calculée époque PS1. Si vous n'avez aucune imagination, regardez la vidéo ci-dessous, elle vous aidera à entrevoir à quoi aurait pu ressembler FFXIII s'il était sorti en 1994 et/ou si Square avait délibérément choisi de rester bloqué à l'époque 16 bits. Le jeu est donc le même (personnages, histoire, univers, systèmes), mais avec une représentation graphique différente. Il ne change pas. Que vous préfériez le pixel art à la 3D "réaliste" n'est pas le débat et à vrai dire, on s'en fout. En réfléchissant davantage, vous découvrirez avec stupeur qu'en dehors de l'absence de villages (pour les besoins du scénario) et d'une carte (déjà retranchée de Final Fantasy X), FFXIII expose certains choix hérités de FFVI (par exemple) avec notamment les "séparations" régulières du groupe. Final Fantasy a toujours été une somme de couloirs. Mais avant personne ne s'en rendait compte via tout un tas d'astuces visuelles - un décor en second plan, une position spécifique de la caméra, la taille des personnages dans les décors - qui masquaient du reste les problèmes techniques. D'ailleurs, être sur une carte dans un FF ne signifie pas toujours « aller où on le souhaite » même si la place/la hauteur de la caméra suggère l'inverse. Reprendre tout FF avant le VII pour le constater.

Faisons maintenant l'exercice inverse et appliquez la représentation graphique de FFXIII à FFVII (le grand fantasme de notre époque) ou le VIII tiens : un résultat similaire à savoir "de faux couloirs" avec des embranchements, des ennemis sur la route et des coffres dans des endroits souvent périlleux. La carte en moins (trop complexe) et le PEGI 18 en plus. Le SD amoindri considérablement l'impact de certaines scènes. Le poids de la représentation graphique. Le procès fait à FFXIII est donc factice et illégitime. Qu'on ne l'apprécie pas pour ce qu'il raconte ou son univers, je peux le concevoir ; qu'on le renie parce qu'il déshonore la série ou qu'il n'est pas un Final Fantasy est, en revanche, totalement irrecevable, car cela n'a pas de sens. Affirmer que Final Fantasy XIII n'est pas un Final Fantasy reviendrait à dire que les épisodes N64 de The Legend of Zelda ne sont pas des "Zelda ", pas plus qu'Adventure of Link (Zelda II) parce qu'il est en scrolling.

N'oublions pas que vingt-six ans séparent Final Fantasy premier du nom de Lightning Returns. Que vous soyez d'accord ou pas, il était évident que nous ne combattrions pas des sprites sur fond noir toute notre vie ou que les cartes dans les RPG resteraient en mode 7. Que certains le regrettent peut se comprendre ; qu'ils passent à côté de jeux extraordinaires sous ce prétexte - la remise en question - est juste dommage. D'autant qu'à force de râler sur tout et n'importe quoi, les joueurs envoient des messages incohérents et assez paradoxaux aux développeurs : surtout ne toucher à rien, ne rien changer, ne rien faire évoluer dans une série aussi appréciée que Final Fantasy, mais en même temps, pas trop quand même, car sinon tous les jeux deviendraient des énièmes Mario ou Dragon Quest ; deux sagas parmi les plus importantes du jeu vidéo et qui le sont, justement, parce qu'elles capitalisent sur des repères. Après, on s'étonne que les studios et les éditeurs évitent le plus possible de prendre des risques...

Si vous trouvez que tel Final Fantasy ou tel Castlevania (nous allons-y venir) n'en est pas un et alors ? Cela vous empêchera de le trouver bon ? De vivre de grands moments ? Qu'y a-t-il de grave à ce qu'un homme ou une équipe donnent une vision ou cherchent à revisiter, tant que l'âme d'une série est respectée ? Car il s'agit bien de poursuivre - toujours - la recherche du jeu parfait dans le cas de FF par de nouveaux leaders, anciennes petites-mains qui ont fait leur preuve sur plusieurs Final Fantasy, avant d'avoir des responsabilités ; et/ou l'hommage par des fans qui tentent de sublimer une oeuvre culte (dans le cas de MercurySteam pour Castlevania). Il ne s'agit à aucun moment d'un studio qui s'empare d'une marque pour faire de l'argent en consentant un "viol" spirituel ; contrairement à Hollywood.

C'est bien dans son rapport aussi universel qu'intime avec les joueurs que Final Fantasy a acquis ses lettres de noblesse et ce statut à part dans l'univers du jeu vidéo. On peut donner le sens que l'on souhaite aux choses, rien que par la force de son esprit, de son imagination voire de son admiration. Il suffit de simplement le vouloir et de concéder que c'est tellement précieux que cela n'a pas besoin d'être partagé, simplement vécu. Et ça, personne ne pourra jamais vous l'enlever."