Papo & Yo est un jeu qui a installé sa com' petit à petit au fil de récents événements vidéoludiques, comme l'E3. Il fait parti de ces jeux indépendants rachetés par les constructeurs pour valoriser leur plate-forme dématérialisée. C'est Sony qui s'est payé ce jeu pour en faire une tête d'affiche du PSN Play 2012 (l'équivalent du Summer of Arcade). Le jeune studio Minority est fondé par plusieurs anciens d'Electronic Arts dont Vander Caballero, directeur designer sur FIFA et Army of Two. On part donc dans ce petit jeu avec une volonté de s'éloigner des jeux classiques dans un univers sud-américain.

Le pinard, ça devrait être obligatoire !

Malheureusement, il est impossible d'amener progressivement une critique constructive d'un jeu qui ne fait même pas l'effort d'amener son sujet en douceur... Le jeu débute avec une petite note de son directeur créatif, Caballero remerciant sa sœur et sa mère de l'avoir éloigner du « monstre qui habitait son père ». Bon ben voilà, c'est réglé, l'aventure nous narre les aventure imaginaires d'un petit garçon qui tente de s'éloigner de son père violent. Le petit Quico se retrouve dans un monde ressemblant aux favellas sud-américaines comme tant d'autres à ceci près que des mécanismes, plate-formes et autres portails sont dessinés à la craie, permettant alors de donner vie aux bâtisses. Un clic sur des engrenages et les bâtiments s'élèvent, tirer sur une corde et le décors s'ouvre en deux. Un monde fantasmagorique donc qui va amener le joueur à avancer en cliquant machinalement sur ces mécanismes ressortant des petits espaces fermés. Vous vous déplacez au joystick, vous sautez avec croix dont vous n'aurez que rarement des séquences de plate-forme et vous activez les mécanismes avec carré. C'est simple, facile, n'importe qui peut boucler ce jeu.

Rapidement, vous ferez connaissance avec le dit « Monstre », un gros personnage paradoxal dont la carrure et la corne nasale instaure la peur mais dont la couleur rose et le gros bide tend à dévoiler une certaine douceur. Et le dit « Monstre » n'est pas méchant en vérité, il vous suivra sans trop de problèmes. Certaines scènes vous obligeront à amener le fameux Monstre vers la sortie du niveau. Pour cela, il suffit de l'attirer avec des fruits pour lui faire poser son cul dans les zones d'interaction pour ainsi ouvrir une porte et avancer. Le jeu est très linéaire et répétitif, vous ne ferez qu'activer des mécanismes très simples sans vous casser la tête puisqu'il vous suffira de cliquer à chaque élément du décors dessiné pour débloquer la sortie... Plus vous avancez, plus vous comprenez que le petit Quico doit amener le Monstre vers un certain temple pour le soigner. Soigner de quoi ? Ben, le Monstre a beau être tout sympa quand il vous sauve d'une mort certaine écrasé par des piliers ou quand il ronfle après s'être gavé de fruits pour se servir de son bide comme trampoline... Mais quand le Monstre ingurgite des grenouilles, et il ne peut s'en empêcher, il monte dans une colère noire et frappe tout ce qui bouge. Lors de ces séquences, le héros devra s'éloigner de lui rapidement ou atteindre les hauteurs. Ça ajoute de petits coups de stress dans ce rythme mou, linéaire et simpliste. Du moins au début, puisque le petit Quico se fait défoncer par le Monstre sans GameOver. Ce qui nous gênera le plus, c'est le moteur physique aux ras des pâquerettes qui fait voltiger le héros comme une feuille de papier, à part ça, cela n'ajoute pas de contraintes à l'avancée de l'aventure.

C'est l'histoire d'un mec...

Si le propos de départ était louable, en illustrant l'évasion d'un enfant maltraité, le résultat est quelque chose de terriblement simpliste, premier degré, sans une once de subtilité ou d'intensité. Dès le départ, on nous explique textuellement que le Monstre est le paternel et le long du jeu, rien ne nous fera créer de l'empathie, de la peur ou de l'angoisse pour la simple et bonne raison que nous avons un gameplay basique consistant juste à débloquer la suite des petits niveaux répétitifs en cliquant sur tous les mécanismes que vous rencontrez... On enchaine mécaniquement les niveaux, à répéter les séquences, à faire manger des fruits au Monstre, tout ça pour arriver à un pseudo-temple en plein milieu des trois décors qui se répètent sur les trois heures et demi de jeu... C'est pénible, répétitif, pas dynamique pour un sou et par conséquent sans surprises. Difficile alors de s'attacher à cette histoire censé être poignante... Et ne parlons même pas de ce gameplay binaire qui n'a au final rien à voir avec le propos du jeu. On aurait pu concevoir des niveaux en forme de labyrinthe à fuir le Monstre par exemple, ça aurait eu le même effet que de créer trois interactions évidentes dans des décors fermés... Pourtant, il y a quelques passages forts jolis, vers la fin du jeu, très simples et épurés sur fond de soleil éclatant et de musique latine entrainante... Mais ça essaye plus de tirer la larme facile que de nous amener à créer des tensions, des découvertes, bref un vrai travail de rythme. A partir du moment que vous balancez toutes vos cartes dès la première minute de jeu, il est fort peu intéressant de continuer.

Papo & Yo est un jeu vidéo finalement très creux, très fade, où les mécanismes ludiques sont trop évidentes pour se faire plaisir et se surprendre. Le propos du jeu étant révélé dès le début, avec une fin tristounette mais sans aucun punch et ne dépassant pas le simple postulat de départ de la métaphore basique « Monstre = Père », aucune émotion ne parvient au joueur à cause de cette mise en scène aussi simpliste que son gameplay. Le jeu étant inspiré de l'enfance du directeur Caballero, on se demande bien quel était l'intérêt de concevoir un jeu auto-biographique si on ne dépasse pas ce simple cadre personnel. En effet, le jeu n'est pas écrit pour y investir le joueur, pensant naïvement qu'une simple histoire personnelle suffirait à toucher un étranger de la même façon qu'elle touche son auteur... A partir de là, le joueur se sent totalement étranger à ce jeu, il perd ses trois heures à enchainer des mécanismes vu milles fois et à suivre la relation binaire entre le héros et son « Monstre ». Difficile d'y accorder quelconque intérêt à partir du moment que rien n'est fait pour nous sentir concerné.

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