Pris dans le tourbillon de sommergeeks, le retard de lecture (qui était déjà conséquent^^) a donné à ma table de chevet des allures dangereuses de Tour de Pise. Mais rien n’est impossible, et les nouveautés ont été dévorées en moins de temps qu’il ne faut à un Titan pour croquer de l’humain. Et il faut bien dire que la cuvée fut plutôt de bonne qualité, jugez plutôt:

  • Noragami (Pika, 3 tomes sortis, 12 tomes en cours au japon)

noragami-manga-volume-1-francaise-220497Yato est un loser. Gênant, surtout quand on est un dieu! Orgueilleux au possible, cantonné au    rôle de « divinité à tout faire », il va vite se retrouver acompagné d’Hiyori, une humaine capable de voir les ayakashis, des démons qui s’immiscent dans les failles du coeur des hommes pour en prendre possession et ainsi pénétrer dans le monde des humains. Trop classique dans son scénario et dans sa structure, Noragami a tout du shonen efficace mais sans génie. Seule la patte d’Adachitoka, qui oeuvrait sur l’excellent Alive last evolution, donne vraiment envie de voir si la suite fera sortir la série du lot.




  • Snow illusion (Komikku, One-shot)

snow-illusion-manga-volume-1-simple-224640Imaginez: une femme qui débarque de nulle part, sans défaut apparent, vous séduit. La vie à deux s’ecoule tranquillement, mais le doute et la jalousie s’installent, la faute à un homme mystérieux qui semble en savoir beaucoup sur cette femme, qui, brutalement, disparait… Cette relecture pleine de mystère d’une figure mythique du folklore nippon ne manque pas de fraicheur, et même si l’on aurait voulu un peu plus de developpement concernant certains personnages, ça ne remet pas en cause les qualités de ce one shot: trait délicat, narration fluide et mélange tranche de vie/suspense habilement dosé. Un josei qui ne vous laissera pas de glaçe en cette fin d’hiver!

  • Ladyboy vs yakuzas: l’île du desespoir (Akata, 1 tome paru, 3 tomes en cours)

ladyboy-vs-yakuzas-manga-volume-1-simple-225970Comment dire… Après Magical girl of the end et Le geek, sa blonde et l’assassin, Akata continue dans sa voie du « plus le titre est long, plus c’est con » avec cette série mettant en scène un yakuza queutard travesti « à l’insu de son plein gré » par son parrain cocufié. Ce dernier poussera même le bouchon de la vengeance encore plus loin en expédiant le garçon sur une île remplie de délinquants sexuels, prêts à se faire la « belle » à tout prix, quitte à s’entretuer…Une farce grossière et irréverencieuse, à l’humour gras totalement assumé mais qui va tellement loin qu’il perd un peu le lecteur en passant, faute de rebondissements vraiment convaincants pour le moment. La technique est du même acabit, ni bonne ni mauvaise, laissant au final un goût mitigé dans la bouche. Dommage, quand on se veut piquant…

  • Poison city (Ki-oon, 1 tome paru, prévu en 2 tomes)

PoisonCity_ANNONCETetsuya Tsutsui est passé maître dans l’art du thriller social via des séries telles que Manhole ou Prophecy. Il nous revient  avec cette histoire de mangaka  sur le point de percer dans le milieu avec un récit fantastico-gore. Mais tout ne se déroule pas comme prévu, puisque dans ce Japon qui a les yeux tournés vers les JO de 2020 qu’il organisera, la censure s’est renforcée pour lisser l’image que la culture nippone renvoie à l’international. On observe donc avec effroi les conséquences de ces atteintes à la liberté d’expression pour notre héros, tout en suivant le déroulement de son manga mis en cause, permettant à nous, lecteurs, de nous faire notre propre opinion sur ce vaste sujet. Un sujet qui résonne dans le contexte actuel et qui, sous la plume d’un Tsutsui au sommet de son art, pourrait faire de Poison city un must si le récit se clôture bien au prochain et dernier tome. Ayez confiance…

  • Innocent (Delcourt, 1 tome paru, 8 tomes en cours au Japon)

news_large_innocent_cutCharles-Henri Sanson aurait pû être un bourreau des cœurs, étant donné sa grande beauté. Il sera juste bourreau tout court, en tant qu’héritier de cette famille (maudite?), et qui aura vu certaines  des têtes les plus renommées de la Révolution française rouler à ses pieds…Tour à tour rejeté, reclus, cruel puis libertaire, c’est ce destin hors du commun qui nous est conté par Shin’ichi Sakamoto (Ascension, Nés pour cogner) de manière romancée via l’adaptation d’un best seller. Le design efféminé des personnages (qui rappelle Lady Oscar) ne plaira pas à tout le monde mais colle magistralement au récit et si les réactions des personnages semblent parfois disproportionnées voire caricaturales, la passion qu’insuffle l’auteur à son récit emporte tout sur son passage.

  • Revenge classroom (Doki-Doki, 1 tome paru, 3 en cours au Japon)

revenge-classroom-manga-volume-1-simple-225077Maltraitance à l’école: un sujet très (trop?) à la mode ces derniers temps, avec quelques titres majeurs ( Life, A silent voice…) et de nombreux ersatz. Revenge classroom fait clairement partie de la seconde catégorie, du fait d’emprunts un peu trop marqués à d’autres titres qui donnent cette désagréable sensation de « déjà-lu » qui nuit fortement à l’identité du titre. RC se défend avec ses armes: narration maîtrisée, dessin correct, rythme soutenu et un cliffhanger bien amené. Pas de quoi se relever la nuit, mais si on est pas trop regardant et que l’on cherche une petite série B sans prétention, pourquoi pas. Mais il y a vraiment mieux sur le marché actuellement…

 

    • Kuro, coeur de chat (Kana, 1 tome sorti, série terminée en 9 tomes au Japon)

kuro-un-coeur-de-chat-manga-volume-1-simple-220341Le monde de l’édition, c’est comme la mode: quand quelqu’un a trouvé le filon, tout le monde cherche à s’engouffrer dans la brèche! Chi, une vie de chat ayant été une belle trouvaille de la part de Glénat, on a vu défiler pas mal de mangas animaliers ces derniers temps allant du passable (Le paradis des chiens) au franchement médiocre (Globule). C’est donc avec appréhension qu’on attaque la lecture de Kuro, un petit chat noir abandonné avec ses frères et soeurs dans un square puis recueilli par un trentenaire solitaire. On suit pas à pas, à travers ses pensées, son évolution et sa découverte du monde qui l’entoure, via de petites scénettes de la vie quotidienne tour à tour drôles, cocasses ou mélancoliques. C’est là d’ailleurs où le titre se démarque de Chi, qui etait clairement destiné à un jeune public, qui ici ne pourra pas saisir toutes les subtilités de certaines situations. Superbement dessiné à l’encre de Chine, on sent tout l’amour que porte l’auteur a ses personnages, en premier lieu Kuro, tellement craquant. Une bonne pioche pour la collection Made in, qui devrait plaire au plus grand nombre.

      • Minuscule (Komikku, 1 tome paru, 3 tomes en cours)

minuscule-manga-volume-1-simple-223789Arrietty au pays des minimoys, voilà comment on pourrait présenter grossièrement cette nouvelle pépite dénichée par Komikku. On y suit donc Hakumei et Mikochi, 9 cm sous la toise et toutes mimis (Mathy?^^), qui vivent une petite vie tranquille en pleine forêt, mais où chaque voyage relève de l’expédition. Entourées de personnages secondaires attachants et magnifiées par un un graphisme foisonnant et tout en rondeur, les 2 protagonistes aux caractères totalement opposés (donc complémentaires) nous font découvrir au fil des pages leur quotidien fait de petites joies toutes simples. Certes, ça donne un côté Martine au récit ( Mikochi fait la cuisine, Hakumei part au travail, etc…)un peu redondant dans la forme, mais les amateurs de récits pleins de douceur et de tendresse devraient y trouver assez facilement leur compte. De là à donner envie de regarder Joséphine…

      • Prisoner and paper plane (Komikku, 1 tome sorti, série terminée en 3 tomes au Japon)

Jaquette_Prisoner_and_Paper_Plane_T01_PRESSEPrisonnier de guerre, c’est pas rose tous les jours. Quand survivre est le seul enjeu de chaque journée, que la moindre blessure est synonyme de mort prématurée et que vous êtes prêts à bouffer de la terre tellement vous avez faim, ça semble difficile de garder espoir… C’est le cas de Matricule 420, jusqu’au jour où sa rencontre ( réelle ou fantasmée?) avec une jeune fille va lui redonner un but à atteindre… Ramassis de clichés sur le milieu carcéral, plombé par une narration mal inspirée et un scénario dont les enjeux nous passent complètement par dessus la tête faute d’un minimum de background, Cette courte série inspirée d’une chanson risque de terminer sa course là où elle l’a commencée: au fond du trou…

      • Les deux Van Gogh (Glénat, one-shot)

les-deux-van-gogh-manga-volume-1-simple-219971Attention, gros coup de coeur! Ce one-shot retrace de manière romancée (mais inspiré de faits réels), la vie des 2 frères Van Gogh, le célèbre peintre Vincent et son marchand d’Art attitré Théodore. C’est d’ailleurs ce dernier le personnage central du récit, de par son charisme, son aura mystérieuse et son obsession quasi-maladive de mettre en lumière le travail de son frère, qui,lui, n’a pour seul et unique but que de peindre ce qui l’émeut. C’est cette relation complexe que l’on voit évoluer, avec en toile de fond la lutte des Indépendants pour la démocratisation de la peinture, dont les codes sont établis arbitrairement par une Académie des Beaux-Arts despotique. On y croise des figures emblématiques de cette époque charnière ( Toulouse-Lautrec en premier lieu) sous la plume d’un Hozumi inspiré qui maitrise parfaitement son récit, mêlant humour, drame, réflexion sur l’Art et le rôle des artistes avec un égal bonheur tout en restant accessible à tous, pour finir sur une note qui pose question sur l’histoire officielle…Un vrai beau moment de lecture comme on en a trop peu souvent!

      • Les Misérables (Kurokawa, 1 tome sorti, 4 tomes en cours au Japon)

Couverture Petites fraises 3.inddTakahiko Arai est un auteur dont j’apprécie énormément le travail, que ce soit sur Darren Shan ou Arago. Il sait donner du souffle à un récit et bien que son style graphique fasse débat, ce dernier s’est bonifié avec le temps. C’est donc avec plaisir que je me suis lancé dans sa relecture de l’oeuvre fondatrice de Victor Hugo. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le bougre assure! Centré essentiellement sur le personnage de Jean Valjean, l’auteur retranscrit parfaitement la descente aux enfers de ce dernier, envoyé au bagne pour avoir volé une miche de pain pour sa famille, puissa mise à l’écart de la société, le ramenant au statut d’animal sauvage chassé, jusqu’à sa rencontre déterminante avec l’évêque franc-tireur Myriel. L’histoire, bien qu’accélérée, conserve toute sa force et c’était pas gagné d’avance! Une réussite qui devrait (tous les espoirs sont permis^^) pousser certains à jeter un oeil au texte originel.

      • Darker than black (Ki-oon, 1 tome paru, série terminée en 4 tomes au Japon)

darker-than-black-ki-oon_mDTB, série animée à succès (mérité) de Bones datant de 2007, a eu droit à 2 saisons. Le manga dont on va parler ici s’insère entre les 2 saisons, donc prenez vos précautions avant d’attaquer ce titre qui démarre fort bien, sous la plume de l’auteur de Dimension W et du Roi des ronces, Yuji Iwahara, par ailleurs chara-designer sur la série d’origine. On retrouve  notre chasseur de Contractants BK-210 aux prises avec l’un d’entre eux qui se dit capable de transformer  tout être humain en Contractant à sa guise, chose impossible normalement. Même s’il est préférable d’avoir vu l’animé pour apprécier les finesses du scénario, l’auteur donne suffisamment de précisions  sur l’univers de la série pour éviter de perdre le lecteur en route dans cette enquête menée tambour battant, comme sait si bien faire son auteur. Une lecture indispensable en tout cas pour tous les fans de l’animé, et un bon thriller pour les autres.

  •  Le requiem du roi des roses  (Ki-oon, 1 tome sorti, 3 tomes en cours au Japon)

Et une adaptation supplémentaire, une! Ca devient monnaie courante ces derniers temps. Dans le cas présent, c’est    l’auteure du croquignolet Otomen, Aya Kanno, qui s’y colle pour mettre en image la sombre pièce de jeunesse de W.Shakespeare, Richard III. Dans l’histoire originelle, on suivait l’ascencion vers le trône d’Angleterre du bossu et difforme Richard d’York à grand le_requiem_du_roi_des_roses_3731renfort de complots et de machinations. Ici, point de bossu, mais un jeune hermaphrodite haï par sa mère mais choyé par son conquérant de père. C’est d’ailleurs cet amour paternel qui va pousser notre Machiavel en herbe à tout faire pour dépasser sa condition d’enfant « maudit », malgré sa fragilité physique. A l’opposé, nous avons la famille Lancaster, dont le fils, très croyant, est un roi contre nature, effrayé à l’idée de faire couler le sang pour sa couronne. Suivre ces 2 « desaxés » se revele très plaisant si l’on accepte les libertés prises avec l’oeuvre originelle. J’avoue avoir été epaté par la manière dont Aya Kanno a su adapter son style pour coller à l’ambiance vénéneuse du titre, tout en clarifiant sa narration. Affaire à suivre, donc!

  •  Inspecteur Kurokochi (Komikku, 2 tomes parus, 8 tomes en cours)

Cobra, c’était le plus cool des pirates de l’espace. Kurokochi, c’est pareil, mais version flic marron! Car plus pourri, y’a pas: lieutenant de la 2eme brigade, maître chanteur à ses heures perdues, arnaqueur de génie, cette brebis galeuse au sourire carnassier et à la tronche de yakuza arrive à se sortir de toutes les situations, sans jamais oublier de se servir au passage. Affublé d’un bleu-bite chargé de le surveiller, il va chercher à se racheter une cinspecteur-kurokochi-tome-1-17822onduite (quoique…) en mettant le nez dans une affaire qui le dépasse complétement, mais ses adversaires sont loin de se douter à qui ils ont affaire! Série B graphiquement solide, plutôt bien écrite même si les personnages ont tendance à en faire des caisses, on ne s’ennuie guère à la lecture de ce buddy-movie au héros principal aussi lâche qu’attachant, même sans psychogun…

  •  Double Je (Akata, 1 tome sorti, série terminée en 5 tomes au Japon)

image double jeDaisy, c’était mignon, voire touchant malgré ses bons sentiments qui débordaient de partout. Mais là… Cette histoire de soeurs jumelles, qui échangent leur place pour que l’une d’elles approche sa mère à la rancune tenace suite au décés accidentel du père ( vous suivez?), mais dont le petit jeu va brusquement s’arrêter, laissant l’une dans le rôle de l’autre ( toujours?), accumule tellement de poncifs que c’en est écoeurant: on voit tout venir à 10 km, les réactions sont grotesques au possible, le tout contrastant avec un dessin trop mignon pour être crédible… Stop ou encore? La messe est dite…

 

 

  • Kokkoku (Glénat, 1 tome paru, série terminée en 8 tomes au Japon)

Au bout de 20 pages, j’ai failli dire stop. Être bousculé dans ses habitudes de lecture c’est une chose, poser les bases dekokkoku-manga-volume-1-simple-219978 son histoire n’importe comment en est une autre! Presentation des personnages et du contexte proche du néant, sauts temporels non marqués…Rude. Mais passés ces préliminaires douloureux, on se prend doucement au jeu, dans cette histoire mêlant thriller et folklore japonais sur fond de maitrise du temps. Le style épuré et clair colle bien au récit, mais le tout manque d’un je-ne-sais-quoi pour donner entiérement satisfaction.

 

 

Ce tour d’horizon est désormais terminé, et au final, que retenir de cette avalanche de sorties? Pas de must absolu, mais de belles découvertes, les deux Van Gogh en tête. Puis une tendance de fond qui se confirme : les adaptations, quelles qu’elles soient, ont le vent en poupe! Mais ce qu’on perd en originalité, on le gagne en efficacité, donc ne boudons pas notre plaisir, et bonne lecture tout en écoutant notre podcast ici!