Qu'est-ce qui est décevant ?

D'abord il me semble important de déterminer ce qui me déçoit, ou disons participe à un sentiment de déception. Est décevant un jeu auquel je n'ai pas envie de rejouer (voire pas envie de finir), et qui m'a coûté un prix significatif (plus ou moins à partir de dix dollars).

En somme, la dizaine de jeux Xbox récemment payés entre 0,50 et 3 dollars, et qui m'ont déplu pour toutes sortes de raisons, ne m'ont pas déçu. Ce sont des micro-achats réalisés ici et là sur une certaine période de temps, et comme il s'agit de vieux jeux, je ne me fais pas trop d'attentes. Un jeu décevant à dix dollars par contre (même sur Xbox), c'est dix dollars que j'aurais pu investir ailleurs ce jour-là. Je peux trouver deux films à ce prix-là, me prendre un livre. Je peux les placer sur une précommande, etc. Je me sens donc en quelque sorte floué. Ce n'est pas tant le prix qui importe d'ailleurs que l'insatisfaction qui résulte de l'achat.

À noter qu'un jeu plaisant trouvé pour pas cher participe à ma satisfaction. Je suis plus positif que négatif dans ma façon d'aborder la chose.

Un détour par le cinéma

Bien que sur Gameblog certains me trouvent blasé et que j'en joue par amusement, je suis en fait plutôt loin de l'être. Ainsi pour mieux souligner ma déception liée aux jeux vidéo, je vais d'abord parler de celle liée au cinéma.

J'ai approximativement un taux de déception de 20 à 30% en ce qui concerne le cinéma. Donc en gros, je suis satisfait à 75%, ce qui me semble tout à fait appréciable. Mon taux de déception peut atteindre 50% lorsque je tombe dans l'achat compulsif, par exemple en me procurant des films que je veux voir par curiosité, mais qui ont de grandes chances de me déplaire (Tintin et Super 8 me font de l'oeil en ce moment), ou encore lorsque je tente des achats dans des genres que j'aime mais qui me le rendent mal comme le film d'horreur. Mais si je m'en tiens à une certaine discipline, je suis satisfait à 75%. Lorsque ce taux baisse, c'est généralement de ma faute.

Comment avoir un taux aussi élevé en cinéma, quand je passe mon temps à dénigrer des jeux ? Plusieurs raisons. D'abord, les films que je vois gratuitement ne participent pas à ma déception, un peu comme les jeux Xbox pas chers. J'ai vu quantité de films à la télévision, je continue d'en enregistrer régulièrement, et j'emprunte à la bibliothèque. Cela permet d'apaiser ma curiosité sans entamer mon portefeuille. Je peux voir des vieux classiques du cinéma et ainsi alimenter ma culture, ce qui est délicat lorsqu'il faut payer car contrairement à certains cinéphiles, je trouve que beaucoup de classiques ont mal vieilli et sont chiants à regarder, ce qui ne donne pas envie d'investir même si la curiosité culturelle est là.

Puis j'ai du flair. Je sais par exemple qu'il ne faut plus trop parier sur Bruce Willis, récemment relégué aux oubliettes par Hollywood, et réduit aux direct-to-dvd, comme Kevin Spacey. Je sais que tel bon acteur ne choisit pas toujours judicieusement ses films (Nicolas Cage, si tu nous lis...). Je sais qu'un mauvais film avec Ed Harris, Ed Harris sera quand même très bon dedans. Bref, j'ai de l'expérience, une base de données conséquente sur laquelle je peux me reposer, et une sorte de sixième sens pour sentir les mauvais coup qui ont tout pour plaire (genre les superbes castings, mais avec aucune têtes d'affiche). Je suis donc déçu seulement 25% du temps ; autant dire que je suis grandement satisfait.

Le jeu vidéo

Avec le jeu vidéo, mon taux de déception se situe probablement à 85 voire 90%. La plupart des jeux auxquels je joue, je sais au bout de 2 ou 5 heures (selon le genre) que je n'y rejouerai pas. Et moi les jeux à finir une fois, ça ne m'intéresse pas. Maintenant reste à expliquer pourquoi le taux est si élevé.

Le hardware

Je joue sur un seul hardware par génération, en ce moment la PS3. Forcément ça limite le catalogue de jeux. Mais un seul hardware, au prix où ça coûte, je trouve ça raisonnable. Une fois la génération passée, j'investis possiblement dans une vieille console, mais alors les jeux ont vieilli, et les standards actuels ont tendance à mettre un sérieux frein à l'enthousiasme lié au rétro-gaming. Je rejoue avec plaisir à MGS2 Substance en ce moment, car le jeu a très bien vieilli et reste très plaisant. J'ai adoré Hitman Blood Money également. Par contre Mafia, Far Cry Instincts et tant d'autres ont vraiment du mal à tenir la distance. Le jeu vidéo vieillit très vite, et généralement très mal. Donc pour en jouir au maximum, il faut multiplier les plateformes et investir un argent fou, ce que je ne ferai jamais.

La multiplication des plateformes m'ennuie de plus en plus. Avoir un tas de consoles différentes à la maison avec très peu de jeux sur chacune, voir des licences que j'aime sortir en version portable sans un portage sur ma console de salon, ou des exclues sur des machines de puissances équivalentes, tout ce gâchis d'argent et d'espace me pèse. J'ai à peu près 600 DVDs. Si demain mon lecteur tombe en panne, je peux TOUT lire sur ma PS3, et au pire un lecteur coûte 50 dollars. Si ma PS3 tombe en panne... j'ai une quinzaine de jeux inutiles en attendant de réunir 250 dollars dans une machine qui vieillit inexorablement, et me satisfait trop rarement pour le prix que ça coûte ; alors payer une deuxième fois... Les jeux ne tournent pas sur ma Xbox, ni sur le Gamecube. Je comprends évidemment qu'on ne peut pas conserver un hardware éternellement, mais cette réalité m'ennuie de plus en plus.

Ainsi, ayant accès à un catalogue réduit, je fais face à moins de jeux de qualité que si j'avais tous les hardwares de salon, portables, plus le PC.

La presse

La question n'est pas de savoir pourquoi la presse raconte n'importe quoi. Complicité avec les devs et éditeurs ? Vendus et corrompus ? Le cerveau informe d'avoir quitté l'école trop tôt ? Peu importe... Mais pour moi c'est un fait indéniable, depuis la presse papier, j'ai rarement lu un test intelligent. Ce n'est pas tant que je ne sois pas d'accord, c'est surtout que j'ai toujours l'impression de jouer à un autre jeu. Comment peut-on descendre Kane and Lynch Dog Days pour sa mollesse quand on encense les épisodes de Gears qui sont encore plus mous, et où il n'y a même pas de localisation des dégâts ? Comment peut-on partout applaudir la scénario de Red Dead Redemption quand il n'y a aucune scène cohérente avec l'autre ?

Les tests pro, c'est la Twilight Zone, le brouillard intellectuel le plus complet. Zéro repère, et un vocabulaire qui ne veut absolument rien dire. Il est très difficile de se faire un avis à partir des tests (en fait c'est impossible). Ce qu'on voit sur les vidéos ne permet pas de savoir quelles sensations ça donnera manette en mains. Donc on s'en remet aux tests et impressions, mais même avec prudence, ça reste impossible à déterminer. Comme un discours politique, les tests disent tout et son contraire, à la différence qu'en politique, c'est par calcul.

La presse formate non seulement une vision stupide du jeu vidéo, mais en plus ne fait pas son travail, c'est-à-dire ne guide pas le joueur dans son achat, ni ne critique comme il le faudrait les jeux. Pourquoi l'industrie se remettrait-elle en question alors ? CoD est scandaleusement bien noté chaque année, Assassin's Creed aussi. Aucune raison de changer une formule qui vend, vu que personne dans les milieux professionnels ayant un poids suffisant pour faire entendre sa voix, ne l'élève. Par contre se lâcher deux ans plus tard dans des émissions thématiques quand ça ne sert plus à rien, ça ils savent le faire.

Le brouillard

Ainsi, chaque fois que j'achète un jeu, je suis dans le brouillard. J'aurais pu lire 99% de tests élogieux et de commentaires tout aussi élogieux, il reste 90% de chance que ce soit pour un jeu surestimé. Des fois, désespéré, je tente ma chance sur une daube purulente que tout le monde conchie, et en fait ce n'est pas si mal, et c'est même un jeu plutôt plaisant. Vous l'avez tous vécu ça, non ?

Au fond, ce qui participe le plus férocement à ma déception des jeux vidéo, ce n'est pas tant de ne pas trouver mon bonheur régulièrement, mais plutôt l'absence de repères solides. Aujourd'hui, il m'arrive de me reposer sur quelques membres de Gameblog qui, s'ils n'ont pas les mêmes critères que moi, ont au moins une vision dans laquelle je me retrouve. Mais généralement, je me sens floué. Floué par des jeux qui ont tout pour être de bons jeux, mais qui sont gâchés par des idées débiles (je n'en ai pas parlé ici vu que j'ai déjà suffisamment écrit à ce sujet), floué par des tests complètement cons et hypocrites.

Cela rend plus difficile à supporter les contraintes déjà lourdes du jeu vidéo ; prix du hardware et prix des jeux, sorties plus rares qu'au cinéma, qu'en librairie et en musique, donc déception plus grande liée à une attente plus longue.

 

Je pense que si vous prenez le temps d'y penser un peu, vous découvrirez que comme upselo, il y a beaucoup de jeux que vous ne finissez pas, et que comme moi, beaucoup de jeux vous déçoivent. La différence au fond, c'est que je joue depuis longtemps, et qu'à force ça m'a rendu aigri. Heureusement, il y a le cinéma !