Guerre légendaire ayant fait couler beaucoup d'encre chez les historiens antiques comme chez les historiens modernes, la Guerre de Troie a selon toute vraisemblance eu lieu sur une période de 10 ans quelque part entre 1260 et 1180 av. Jésus-Christ. Les vestiges archéologiques de la ville de Troie se trouve dans l'actuelle Turquie dans la province de Çanakkale. À cette époque, cette région était culturellement grecque, plus précisément égéenne, celle-ci même partagée par la civilisation Troyenne à l'Est et la civilisation Mycénienne à l'Ouest (l'actuelle Grèce) avec le peuple Achéen. Malgré le coté épique du récit (c'est d'ailleurs de là que vient l'usage de ce terme), peu de jeux vidéo se sont attardés dessus. C'est donc avec un certain plaisir que l'on découvre un jeu de la saga Total War abordant le sujet. L'avantage est double : proposer un opus historique tout en ayant un degré de liberté élevé étant donné que les historiens eux-mêmes n'ont pas énormément de sources littéraires sur le sujet si ce n'est L'Iliade et l'Odyssée d'Homère.

La guerre des Héros

Le studio Creative Assembly a fait le choix de partir sur une vision historique de la chose, tout en ayant eu l'intelligence de ne pas totalement délaisser l'aspect mythologique du récit d'Homère. Ainsi, ce RTS propose de recruter dans ses armées des minotaures, des sirènes, des géants et autres créatures mais qui sont en fait... des humains. Un minotaure est en fait un humain un peu plus costaud et grand que la moyenne qui porte un masque de taureau. Une sirène est une femme agile qui utilise une fronde. Ce choix est cohérent avec la saga Total War et l'on peut saluer ce parti-pris qui permet d'avoir un bon compromis entre historicité pure et mythologie.

Homérique jusqu'au bout des ongles

La Guerre de Troie est l'exemple le plus flagrant de ce que l'on pourrait nommer "l'Age des Héros". Il suffit de lire quelques pages des récits homériques pour se rendre compte que chaque petit royaume, et même presque chaque ville possède son héros, un homme renommé qui a pour ambition de rendre son nom immortel, le plus souvent par des faits martiaux. Le plus connu d'entre eux est évidemment Achille, fils de Pélée, roi de Phthie en Thessalie, dont on dit que le sang de Zeus en personne coule dans ses veines. Les éloges sont nombreuses à son sujet et celle qui revient le plus souvent dans les écrits est son aptitude à tuer, en faisant le meilleur guerrier que la Terre ait portée (selon les mots d'Homère). Logique donc de le retrouver au sein des factions jouables qui sont au nombre de huit. Quatre du coté Achéens avec : Achille, Agamemnon (Roi de Mycènes), Ulysse (seigneur d'Ithaque) et Ménélas (frère d'Agamemnon et Roi de Sparte) et coté Troyen les princes Hector et Pâris, et les seigneurs Enée et Sarpédon.

"Tu n'auras plus d'yeux ce soir, ni d'oreilles, ni de langue. Tu vas errer dans les Enfers aveugle, sourd et muet. Et tout le monde saura qui est Hector ! Le fou qui a cru avoir tué Achille"

Bien évidemment nous avons commencé une partie avec Achille. Malgré des ressemblances culturelles dans les huit factions comme le Panthéon Grec, chaque camp possède de nombreuses spécificités qui sont de plusieurs ordres (militaire, diplomatique, économique, etc). Achille peut recruter ses fiers guerriers myrmidons, dont la légende raconte qu'ils étaient autrefois des fourmis. C'est d'ailleurs la faction qui propose le plus d'unités spéciales. Chaque héros se gère de manière différente et ils peuvent tous se retrouver sur le champs de bataille pour commander les troupes. Certains s'en sortent mieux que d'autres.

C'est le cas d'Achille, qui est clairement le champion les plus efficace en jeu pour le combat mais qui doit en contrepartie nous faire subir son humeur changeante via le système "Achille Impétueux". En effet notre fier héros était connu pour être entièrement contrôlé par ses émotions. Ainsi, le fait de perdre une bataille ou un accord diplomatique peut le faire rentrer dans une rage folle ou au contraire le plonger dans une profonde tristesse. Il en découle des bonus et des malus. Une fois en "deuil" du moral de son héros, le peuple d'Achille perd lui aussi le moral. Il faut donc y veiller pour ne pas stabiliser son peuple tout entier.

Hector, aussi solide que les murs de Troie

Coté Troyen on doit alterner avec une notion très intéressante : Les faveurs de Priam, roi de Troie et père d'Hector et de Pâris. En effet le vieux roi n'a pas désigné d'héritier pour le trône de Troie (ce qui n'est pas vraiment le cas dans le récit Homérique) et il va donc sans cesse être nécessaire de l'impressionner en réalisant des hauts faits et autres exploits. Cela a pour conséquence de créer une rivalité entre les deux frères. En jeu, cela se traduit par un coté un peu fougueux du jeune Pâris qui n'hésite pas à foncer tête baisée pour bouter hors des terres Troyennes les incursions achéennes.

Le jouet des Dieux

En temps que simple mortel, on doit aussi subir les décisions des Dieux qui se traduisent de plusieurs façons : des quêtes à réaliser, des bénédictions ou malédictions qui apportent des avantages nets ou alors de gros inconvénients. L'humeur des Dieux est aussi changeante que celle d'Achille et le Panthéon n'hésitera pas à vous mettre des bâtons dans les roues si vous ne prouvez pas votre foi (constructions d'autels, sacrifices, prières, etc). La gestion religieuse est le seul élément réellement mythologique en jeu.

Les nouveautés sont très nombreuses comme le système de ressources avec un total de cinq qui collent parfaitement à l'Age de Bronze :

  • L'or qui est la ressource la plus rare qui permet de construire des bâtiments spéciaux et de recruter des troupes spécifiques rares/puissantes
  • Le bronze qui est une ressource nécessaire pour équiper et soutenir les unités avancées
  • La pierre qui est une ressource nécessaire pour construire des bâtiments avancées
  • Le bois qui est la ressource de base pour construire des bâtiments.
  • La nourriture qui est aussi une ressource de base et qui permet de former/soutenir les unités classiques.

Malgré tout, l'économie est clairement sous-exploitée et le studio n'utilise pas à son plein potentiel tout ce qu'on vient de citer ci-dessus.

Une I.A. qui abuse de certaines mécaniques

Le système d'agent qui permet d'agir pour saboter diplomatiquement ou militairement est intéressant mais l'I.A. en abuse clairement et on se retrouve sans cesse avec quelqu'un en train de saper notre moral ou détruire notre économie. Il y en a partout, tout le temps et c'est un vrai calvaire. De manière générale, au long de la campagne, le CPU est assez intransigeant même avec des factions dites "faciles", et la moindre erreur est un signe funeste pour le déroulement de votre partie.

Comme c'est le cas depuis Total War : Warhammer, le jeu profite d'un système de quêtes complet, qui permet de faire avancer vos affaires. Certaines missions concernent directement votre faction tandis que d'autres (plus mystiques) se tournent vers vos héros. L'occasion d'ailleurs de préciser à quel point le studio Creative Assembly a fait de gros efforts sur tout ce qui est ambiance et atmosphère. Mention spéciale à ses extraits de l'Iliade et de l'Odyssée dans chaque chargement. Un vrai régal. Artistiquement c'est aussi une énorme claque avec une interface somptueuse, un brouillard de guerre qui s'inspire des céramique grecque antique de toute beauté... Un régal pour les yeux d'autant que tout ceci s'imbrique parfaitement avec la SPLENDIDE carte de la Mer Egée et globalement le renouveau technique de cet épisode. Les cartes de batailles sont belles et l'atmosphère méditerranéenne se ressent partout, tout le temps. Aussi bien dans sa lumière que dans sa flore. Un vrai voyage.