L'austérité régnait dans 42 Jeux Indémodables, et si le studio nippon Agenda n'a pas été chargé de 51 Worldwide Games, l'ambiance cosy demeure. Néanmoins, Nintendo a fait les choses en grand, à commencer par l'atterrissage sur un globe terrestre où l'on est invité à placer sa figurine, une entrée en matière très parlante quant à la vocation universelle de ce titre. D'autant qu'il ne s'agit plus uniquement de choisir une icône et un design, mais de façonner cet avatar en précisant son plat préféré et même ses souhaits. Des informations qui serviront pour trouver des partenaires en ligne, disposés ensuite sur cette mappemonde aux quatre coins de laquelle apparaissent également ses amis, et différents guides suivant la progression. Ces derniers ne se destinent qu'à la présentation de groupes de jeux par thèmes, pourtant ils constituent un sympathique gage d'accessibilité à l'instar de l'explication illustrée des règles de vive voix, fût-elle accompagnée de touches d'humour quelquefois douteux. L'interface se montre ainsi nettement plus agréable aux oreilles et à l'oeil, le menu rassemblant les jeux sous la forme d'objets animés, comme s'ils sortaient d'un coffre à jouets.

Comme sur un plateau

Cet aspect classieux, souligné par la mise en scène des activités sous plusieurs angles, se manifeste particulièrement à travers les jeux de plateau. Entre le son feutré du placement d'un pion sur la dalle tactile, les vibrations du gobelet en secouant les dés, ou même les pièces qui tombent si on incline la console, l'illusion s'avère presque parfaite, de sorte qu'il ne manque que le plaisir de la manipulation et le parfum du carton pour que 51 Worldwide Games se substitue avantageusement à la réalité. Surtout qu'en sus du gain d'espace s'ajoute le côté pratique, notamment pour les fonctions aléatoires telles que le mélange des cartes. Et si certaines musiques - strictement imposées - tendent à vite tourner en boucle, on peut de fait toujours compter sur un adversaire via l'I.A., dont le niveau augmente à chaque victoire, les médailles et coupes obtenues matérialisant l'avancée. Exit les tampons et autres missions, quoique de nombreuses disciplines comportent leur lot de défis, car l'intérêt réside évidemment dans les jeux eux-mêmes, encore valorisés par l'historique de leurs origines et quelques anecdotes distillées au passage.

Traditions ludiques

La liste en perd quelques-uns de renom à l'image de Bellicus et de la Bataille Navale, mais s'étoffe de vraies perles, parmi lesquelles le Mancala. Au-delà du cliquetis délicat des billes semées en guise de graines, ce jeu traditionnel rappelle admirablement les racines à la fois ludiques et culturelles du divertissement. Sa dimension stratégique étonnamment élaborée est partagée par l'implacable Jeu du Moulin, dont la simplicité apparente n'a d'égale que la férocité une fois ses tactiques de broyage appliquées. Deux merveilles du genre, dont l'influence plane sur les références absolues que sont le Backgammon et les Échecs, dotés ici de solides potentiels de difficulté. 51 Worldwide Games intègre d'ailleurs carrément le Mah-Jong compétitif, fort heureusement assorti de tutoriels. D'autres jeux moins exigeants rejoignent la sélection, Hex, Yam's et Couleurs Mystère (alias Mastermind), afin que tout le monde y trouve son compte, quoique Lièvre et Chiens se révèle trop basique derrière son charme désuet. Idem pour les jeux de cartes amputés de valeureux représentants pour se concentrer sur les classiques les plus efficaces, au détriment de la variété hélas.

Bar à jeux

Celle-ci s'étale plutôt dans les jeux de bar, qui accueillent des déclinaisons miniatures de sports façon baby-foot, jusqu'à prendre des allures de salle d'arcade. Leurs mécaniques logiquement rudimentaires procurent de bonnes petites sensations, tout spécialement ceux usant ingénieusement des sticks. Dommage que l'éventuel écran splitté nuise à la lisibilité. Le Billard, le Bowling et les Fléchettes déjà présents dans l'opus DS bénéficient en revanche de sérieuses améliorations, grâce à la surface d'affichage étendue doublée des commandes à détection de mouvements, synonymes d'une subtilité assez surprenante à la Wii Sports. Pareil pour les contrôles tactiles alternatifs, notoirement avec le fameux Air Hockey et l'exotique Carrom, deux pépites qui font partie des rares jeux autorisés en duo par le biais de l'écran tactile, un tantinet trop étroit en l'occurrence, a fortiori sur le modèle Lite. 51 Worldwide Games comporte donc une multitude de configurations adéquates selon que l'on a une, deux, trois, voire quatre consoles sous la main, la pratique du Texas Hold'em ou des Dominos demandant naturellement de garder ses cartes/tuiles à l'abri des regards indiscrets.

Ludothèque à la carte

La salvatrice Guest Edition, téléchargeable gratuitement, permet de profiter de ces réjouissantes perspectives avec un seul exemplaire de 51 Worldwide Games en local, nonobstant un florilège de jeux alors restreint. Bien entendu les sessions en ligne garantissent de trouver - une fois ses préférences exprimées ou laissées au hasard - des camarades de jeux n'importe quand, malheureusement sans PictoChat désormais pour converser (ou patienter) et avec un lag parfois gênant. Le cas échéant, 51 Worldwide Games renferme encore nombre de jeux plus ou moins singuliers, tels que les solitaires (versions cartes ou Mah-Jong), le Stand de Tir, le Taquin, les Tanks (accessoirement en coopération), les Suites de Six, la Pêche, le Circuit Routier et même du Piano, pour certains jouables à plusieurs, y compris en mode mosaïque. Il consiste à aligner des consoles côte à côte, de manière par exemple à rallonger la rivière, le tracé, ou le clavier, avec des Joy-Con transformés respectivement en cannes, télécommandes ou percussions, un tableau qui peut sembler idyllique, limite hors sujet. Toutefois cette audace a priori insoupçonnable suscite des expériences non seulement rafraîchissantes, mais aussi de qualité que 51 Worldwide Games allie résolument avec quantité.