Nous sommes en 1969. Smith, un flic de Gloomywood sans histoires, est en vacances au bord d'un lac avec sa femme et ses deux enfants. Tout allait pour le mieux quand, à la nuit tombée, il entend des cris. Il avance seul, dans la nuit, et découvre le cadavre de son épouse. Ses mômes seront épargnés. Mais il ne pourra qu'assister impuissant à leur kidnapping et regarder la camionnette qui les emmène s'éloigner. Sept ans plus tard, on retrouve un homme en miettes qui n'a jamais retrouvé sa progéniture. Sa plaque rendue, il enquête néanmoins sur des rapts d'enfants de plus en plus fréquents. Sa piste est la bonne. Elle va le mener à croiser de sacrés psychopathes et, si Dieu le veut, sauver des bambins en danger.

2Crade

La réalisation plutôt old school et toute mignonne, à base de voxels, est traître. 2Dark n'a rien de sympa - contrairement à son concepteur. Dans les 6 niveaux (sans compter les passages dans l'appartement du très grossier Smith ou dans un troquet sordide) de ce jeu en vue aérienne qui compte énormément sur votre sens de l'observation, l'ambiance est poisseuse, dégueulasse, gore. Du sang, des tripes, des pièges vicieux, des personnages déglingués, une pénombre omniprésente, la pluie... Vous vouliez avoir le moral ? Ce n'est pas avec ce jeu, où la perte ou l'oubli d'une victime, un enfant frêle et innocent, vous arrache le coeur façon Mola Ram d'Indiana Jones et le Temple Maudit. Le tout dans une ambiance sonore tout à fait réussie, imprégnée de mélancolie et de pure folie, suivant les moments... Tout va bien pour les amoureux du glauque.

Seul dans le noir

Et pour les amoureux de jeu, il y a aussi de quoi faire. Vous aurez noté que le nombre de niveaux est assez bas. Mais que les choses soient claires : vous en aurez pour votre argent. Manette ou souris en main, après un temps d'adaptation certain à une maniabilité entachée par une visée assez moyenne, un corps-à-corps lymphatique et un système d'inventaire un peu malhabile, on comprend rapidement dans quelle direction on veut nous emmener. Allumer sa clope pour sauvegarder dès qu'il y a une accalmie et avancer le plus précautionneusement, sans bruit. Allumer son briquet, sa torche ou sa lampe quand nécessaire en faisant, comme pour les munitions, en quantité limitée, bien gaffe à ne pas tomber en rade. S'il est bien possible de la jouer bourrin et d'occire en frontal des contrevenants, il ne faut surtout pas compter dessus trop souvent - notamment à cause de la raideur du protagoniste.

Observation et furtivité maniaque seront vos meilleures armes pour emmener un minot, voire un troupeau complet, qu'on pourra toujours laisser dans un lieu sûr un temps, vers la sortie. Il y aura parfois des déguisements. Parfois des alternatives pour qu'un serial killer ne sévisse plus jamais. Des bonbons à lancer, des caméras à désactiver, des gamelles à remplir, des portes à fermer, des couteaux à planter dans le dos... Les possibilités ne manquent pas. Entre deux décès un peu injustes, on expérimente. On observe, jusqu'à découvrir des patterns, des fenêtres d'action. Et on réalise que, vraiment, patience et longueur de temps font plus que for... Bref, vous connaissez le proverbe. Il s'applique. Surtout si vous visez un mode Défis à 100% - sauver tous les enfants, ramasser tous les bonbons et ne tuer strictement personne.

Prendre un enfant par la main

Après plus d'une dizaine d'heures à s'arracher les cheveux pour en voir le bout, on convient qu'on a joué à un jeu de survie prenant, violent à tous les niveaux, aux idées et convictions admirables, sans pour autant oublier tous les moments frustrants. On pense à une intelligence artificielle qui peut parfois faire faux-bond. Ou au système de récupération des objets éparpillés (Smith pousse un petit "huh ?" à proximité et ne ramasse pas immédiatement) qui a du mal à s'accommoder d'environnements aussi sombres. Surtout que, parmi les éléments à rapporter obligatoirement en plus des chères têtes blondes pour passer au stage suivant, il y a des indices. Et lorsque vous pensez avoir vidé le niveau et qu'on vous dit qu'il faut y retourner, après avoir sué sang et eau... Les plus philosophes y verront un hommage aux point and click d'antan où un pixel pouvait renfermer la clé de vos problèmes. Les autres y verront une torture.