Une série au gameplay plutôt rare, réunissant une approche occidentale de la stratégie au tour par tour avec tout ce que le Japon a de maîtrise dans la création d'univers et de game design hors pair... Advance Wars, c'est en tout cas l'exploit d'avoir su transformer un genre potentiellement aride pour les profanes de la stratégie (surtout en comparaison avec les tendances actuelles), en un plaisir aussi accessible que renouvelé à mesure qu'on en maîtrise les subtilités. Pour ce nouvel épisode, si rien ne change fondamentalement, tout semble avoir été révisé, et pour le mieux.

La guerre, c'est mal

Les habitués de la série ne seront certainement pas dépaysés par les modifications de gameplay. En revanche, ils risquent d'être nettement plus surpris par les changements de direction artistique et d'univers. Exit les héros prépubères et les unités super trognon, place à quelque chose d'un peu plus "mature". D'autant plus contradictoire, que le ton général des dialogues est resté tous publics (comprenez "zut" plutôt que "put#@& de sa r%$*"). Mais l'atmosphère générale, elle, s'est tout de même assombrie. Monde post-apocalyptique ravagé par une pluie de météores, graphisme aux dominantes de brun et de gris, pourritures ennemies aux méthodes hitlériennes... le tout copieusement arrosé d'une démagogie parfois un peu trop poussée, et de coupes de cheveux Studioline™ à la Tokio Hotel. Je l'avoue, personnellement, je trouve ce virage plus bancal que vraiment mature... Mais quoiqu'il arrive, ce n'est pas l'univers ou le scénario de la campagne qui constituent la valeur de Dark Conflict : ce sont plutôt les révisions par rapport à Dual Strike, le précédent volet DS.

Revenons aux bases

Pour Dark Conflict, Intelligent Systems est d'abord reparti en arrière. Oublié le tag-team de généraux (les COs), les chasseurs furtifs, Pipe Runners et Black Missile par exemple, finis les retournements de situation dus à des pouvoirs de COs démesurés. On enlève aussi les batailles sur deux écrans (peu importe) et le game sharing (dommage)... Bref, le trop plein d'efforts à complexifier le gameplay d'origine, dans Dual Strike, se reporte cette fois sur le virage d'atmosphère. Dual Strike était excellent, mais finalement, repartir sur des bases saines n'est pas un mal. Car après ce retour en arrière, Intelligent Systems a pu revoir sa copie en ajoutant cette fois des touches nettement plus réfléchies, pour obtenir au final un équilibre global quasi-parfait, beaucoup plus proche des origines de la série. Les nouvelles unités paraissent mieux étudiées, moins abusives, tout comme le rôle des COs qui peuvent embarquer dans un véhicule pour le booster un peu, et doivent combattre un minimum avant de pouvoir utiliser des pouvoirs importants, mais pas abusifs. Les unités gagnent désormais des bonus d'expérience (3 niveaux), sans une fois encore que cela permette de se passer de stratégie pure, et la présence des motards (qui peuvent capturer des bâtiments à la vitesse de l'éclair) ou des Génies (qui peuvent construire des semi-bases de réapprovisionnement) laissent un peu plus de place à des tactiques d'occupation. Les fusées éclairantes permettent enfin de ne plus avancer dans le brouillard de guerre à l'aveuglette, et les nouveaux canons défensifs offrent une contre-mesure efficace aux rushes de tanks un peu trop courants auparavant.

A deux c'est mieux (même par internet)

On pourrait encore citer d'autres nouvelles unités et quantités de petits changements, mais autant les laisser au plaisir de la découverte. Toujours est-il que Dark Conflict, à défaut d'avoir véritablement réussi sa mue vers ce nouvel univers narratif tout droit sorti de l'imaginaire chamarré d'un néo-goth de 14 ans en pleine dépression, a particulièrement réussi son équilibre tactique. Il devient, à ce titre, le meilleur épisode sur DS. Et ça tombe bien puisque c'est surtout celui qui propose enfin un mode en ligne ! En local on pourra jouer jusqu'à quatre sans fil, et sur le net, en duel. Ca fonctionne très bien, avec les bénéfices de la liste d'amis, de classements pour trouver des adversaires adaptés, et même du micro pour insulter papoter avec l'autre joueur. Reste aussi le mode hot seat pour des parties sur une seule console. Enfin, si on a perdu le système de la boutique de cartes, plus d'une centaine sont disponibles pour le mode partie libre, avec en sus le retour de l'excellent éditeur de cartes, lesquelles pourront être échangées en local et en ligne, pour ceux qui n'en auraient pas encore assez. Toujours doté de son IA presque impeccable, Dark Conflict sait lui aussi donner du fil à retordre le long de la campagne (à partir de la mission 14, ça se complique), mais aussi au travers des missions facultatives qui apparaissent en marge des niveaux principaux.

Bref, ce nouvel épisode suscitera sans doute quelques regrets, divisera peut-être même les fans sur certains points, mais pour ce qui est du plus important (le gameplay), on frôle l'équilibre parfait. Difficile donc de passer à côté ; et difficile d'en décrocher une fois en mains !