C'est le 18 décembre 1987 que Final Fantasy voit le jour au Japon. La légende effectuait alors ses premiers pas... sur des accords aujourd'hui cultes. Un arpège léger et aérien en guise de prélude aujourd'hui entré dans l'histoire. Au clavier, un homme : Nobuo Uematsu...

Nous voici désormais en février 2007. Près de 20 années se sont écoulées. Ce qui était à la base le dernier espoir de Square s'est transformé en saga multimillionnaire. En usine à rêves. Au cours de cette épopée, Nobuo Uematsu sera resté fidèle, marquant cet univers héroïque et ludique de son empreinte musicale unique. Son chef d'œuvre ? Incontestablement la partition écrite pour Final Fantasy VI... dernier volet de l'ère Super Nintendo et moment de grâce absolu (ah l'opéraaaaaa...) ! Depuis, c'est incontestable, si le style si unique de ce compositeur de génie continuait de séduire, épisode après épisode, l'heure du passage de témoin semblait de plus en plus inéluctable. Ainsi, après avoir été épaulé par Masashi Hamauzu et Junya Nakano pour la composition de Final Fantasy X, et avoir laissé Naoshi Mizuta et Kumi Tanioka se débrouiller seuls sur Final Fantasy XI, la révolution se produit aujourd'hui avec Final Fantasy XII. Car oui, si Nobuo Uematsu s'est chargé du thème principal, c'est bien à Hitoshi Sakimoto que revient l'immense honneur (et maxi pression !) de réaliser la bande originale de ce rêve d'anthologie ! Preuve qu'à tous les étages du processus créatif, ce Final Fantasy est frappé du sceau de l'évolution...

Passage de témoin harmonieux...

Pour succéder à une icône aussi emblématique qu'Uematsu, Square Enix se devait de solliciter un compositeur racé. A ce titre, le choix de Sakimoto se révèle particulièrement cohérent. Compositeur de plusieurs productions made in Yasumi Matsuno tels que le flamboyant Vagrant Story, l'explosif Radiant Silvergun ou le mythique Final Fantasy Tactics, Hitoshi maîtrise comme personne l'art de la bande son épique ! Son style tout en vigueur se reconnaît en un accord... Contrairement à Uematsu qui privilégiait les mélodies, Sakimoto opte toujours pour la création d'une ambiance, d'un climat. Ses orchestrations sont clinquantes, ses thèmes s'entrechoquent souvent avec rage. Toujours présents, les cuivres vindicatifs répondent aux gémissements langoureux des cordes... le tout saupoudré par la touche aérienne d'une harpe omniprésente et de percussions volontaires. Entre le space opéra et le péplum, l'atmosphère musicale de Final Fantasy XII se veut rythmée, accaparante.. un rien (trop ?) grandiloquente par moments. Qu'importe, c'est un fait : l'aventure n'avait jamais été aussi enveloppante...

Charmeur de tympans

Amusant de constater la variété des thématiques dépeintes ici. Majoritairement martiale, l'ambiance peut soudainement virer de bord afin d'emprunter des voies plus chaleureuses, voire complètement guillerettes. A ce titre, apprêtez-vous à passer de bons moments avec l'imparable duo hautbois/clarinette. Ca aère un peu le tout, et même si certains morceaux sonnent doucement creux, l'ensemble se montre de haute tenue. A ce titre, n'oublions pas que si Hitoshi Sakimoto a réalisé la quasi-totalité des morceaux, Masaharu Iwata, son complice de l'époque Final Fantasy Tactics, ainsi qu'Hayato Matsuo, interviennent sur une poignée de morceaux. Pourquoi eux ? Car depuis des années, eux aussi font partie intégrante de la Matsuno family, pardi...

Pour l'éternité...

Inutile d'y aller par quarante chemins : oui, la BO de Final Fantasy XII est du genre à tracer droit. Et puis si on regrettera la perte de certaines des nuances et de la sensibilité des mouvements signés Uematsu, en revanche comment ne pas souligner la qualité des samples sonores. Sur la centaine de musiques écrites pour l'occasion, 90% restent jouées par la puce sonore de la PlayStation 2, mais la synthèse est si pure, les sons si finement restitués que la jouissance auditive est totale. Un plaisir décuplé lors des passages symphonique d'une maestria rare. Enregistrés par l'orchestre anglais du Royal Philharmonic au célèbre studio Abbey's Road (Beatles powa !), ces morceaux de bravoure donnent tout simplement des frissons... Mention spéciale d'ailleurs au titre Hope, thème principal du jeu interprété au violon par Tarô Hakase, artiste star au Japon. Mélancolique, troublant... les qualificatifs manquent pour décrire l'impression laissée par ce poème symphonique en cinq mouvements...

Vingt ans après sa création, Final Fantasy se retrouve donc à un tournant de son histoire. Son style change. Sa bande son se devait d'accompagner ce mouvement. Ainsi, alors que le génie d'Uematsu est parti s'exprimer sur la BO de Blue Dragon (le RPG Xbox 360 d'Hironobu Sakaguchi, créateur originel de la saga FF, tiens donc), Hitoshi Sakimoto s'impose comme un hériter fier et à la personnalité affirmée. Si l'univers musical se montre globalement moins sensible qu'auparavant, son énergie électrise suffisamment pour qu'aujourd'hui encore, la bande son représente une partie indissociable de l'émotion suscitée par un Final Fantasy. Pour cela, Hitoshi, simplement merci !