Quelques semaines après cette découverte, l'éditeur Modus mettait en ligne une première démo jouable, comme une lettre d'intention, auxquels les rôlistes curieux avait réservé un très bon accueil. C'est donc plein d'espoir que nous avons recroisé la route de Crisbell, l'héroïne qui manipule le temps, pour un second galop d'essai en compagnie de Derek Neal, producteur chez Modus, et Carlos Rocha Silva, le patron du studio Dreams Uncorporated.

Là où y'a de la Carthagène, y'a du plaisir

C'est donc toujours dans sa version pré-alpha que Cris Tales a repointé le bout de son nez, en nous propulsant au-delà de la démo de 2019, quatre bonnes heures après le début de l'aventure, alors que notre petite équipe d'aventuriers découvre la dualité de Saint Clarity, une ville socialement scindée qui reprend donc une thématique qui semble plus que jamais à la mode, merci Final Fantasy VII Remake. La simple découverte de ces ruelles, armé du presque éponyme Cristal permet à nouveau d'admirer le travail assez phénoménal opéré par les équipes de Dreams Uncorporated, puisque l'écran divisé en trois affiche en toutes circonstances le passé, le présent, et le futur de la ville, en tenant compte de vos actions en temps réel.

Saint Clarity n'a ainsi que faire des bas quartiers, victimes de régulières inondations dès lors qu'il se met à pleuvoir plus que de raison. La partie supérieure, réservée aux riches et aux nobles titrés, n'a que faire de ces problématiques, et continue de se vautrer dans une forme d'auto-satisfecit que nous ne connaissons que trop bien. En taillant le bout de gras avec les autochtones, vous découvrez également que l'avenir tel qu'envisagé au temps présent dévoile une ville basse complètement inondée, désertée de ses habitants. Regorgeant de quêtes annexes au vu de ce qui nous a pour le moment été dévoilé par l'équipe colombienne, il ne tient qu'à vous de conjurer le sort, et de mesurer en temps réel vos impacts sur le fameux continuum espace-temps.

C'est au bord de la mer, vous ne pouvez pas vous tromper

Notre trio se lance donc dans un vaste enchevêtrements de demandes à satisfaire, qui nécessitent parfois d'aller récupérer à une autre époque l'objet nécessaire à votre avancée, puisque certains auront par exemple complètement disparu de votre vivant. Crisbell est heureusement accompagnée d'un petit batracien orangé qui peut se mouvoir entre les trois époques proposées, et si Neal déjouait avec grâce tous les pièges posés sur son chemin, on se demande tout de même si la complexité de l'aventure n'obligera pas les joueurs à abandonner en cours de route une bonne partie des quêtes annexes que nous avons pu observer. Et au vu de leur impact autant visuel que scénaristique, ce serait quand même bien dommage.

Après avoir obtenu l'équivalent du laisser-passer A38, nous changeons en effet le destin d'un petit garçon, destiné à devenir un plombier de renom, qui prendra un jour à bras-le-corps ce problème d'évacuation inspiré de la ville de Cartagena, tout ce qu'il y a de plus réelle. L'influence colombienne se retrouve également dans les nombreuses architectures, notamment religieuses, puisque la présence de majestueuses églises et cathédrales semble implicitement lié à la trame principale, que nous garderons pour le moment volontairement mystérieuse.

Système Intelligent

En explorant les environs de Saint Clarity, nos héros dévoilent une world map assez simple, qui permet de passer d'un environnement à l'autre, non sans enchaîner les combats aléatoires, J-RPG oblige. Ces derniers s'avèrent toujours aussi passionnants et techniques que lors de notre premier contact, et il faudra ainsi tirer le meilleur parti de votre maîtrise du temps : en plus de rajeunir ou d'accélérer le vieillissement de vos ennemis, l'emploi du cristal permet d'accélérer les effets du poison, et ainsi de vider avec habileté des barres de vie entières. La fonction de scan s'avérera bien utile pour adopter la bonne stratégie, tant les options s'annoncent nombreuses. Très nombreuses. Trop ? Peut-être bien...

Certains combats de boss nécessite de comprendre en un clin d'oeil la complexité de certaines opérations, qui demandent un sens du timing et de la planification telles que seules de bien vilaines sessions de trial and error semblent pouvoir résoudre. Heureusement, l'emprunt du gameplay propre à la série des Paper Mario s'avère toujours efficace, tant pour maximiser les dégâts infligés que pour réduire ceux encaissés. Les attaques groupées et les moves les plus avancées promettent d'ailleurs une complexité que la série d'Intelligent Systems s'est toujours bien gardée de proposer. On en salive d'avance. L'affaire se corse lorsque certains ennemis plus coriaces s'arrangent d'ailleurs pour déjouer votre maîtrise du temps, en se déplaçant par exemple à l'écran, ce qui oblige forcément à trouver sur l'instant une nouvelle stratégie. Nec plus ultra, fruit des emprunts au roi Chrono Trigger, Cris Tales se veut suffisamment ouvert et libre pour que certains affrontements a priori impossible à mener pour arranger le scénario s'avèrent au final faisables avec une bonne session de leveling. La replay value semble donc ô combien au rendez-vous.

Non-binary Domain

Et pour rester cohérent de bout en bout, Cris Tales s'attache à vous laisser la main sur certains choix relativement lourds de conséquences, comme celui de la passation de pouvoir à Saint Clarity, entre un ex-"de la haute" devenu activiste politique, et une sang-bleue restée fidèle à sa classe : dans le premier cas, les bas-fonds profiteront d'une politique sociale plus juste, au détriment des quartiers riches qui perdront de leur superbe, et inversement. Comme dans la vie, rien n'est si manichéen, et l'on espère que ce souci du détail se retrouvera tout au long de l'aventure.

ON L'ATTEND... TOUJOURS AUTANT !
Malgré son lot de lacunes techniques qui ne demandent qu'à être corrigées lors du passage en bêta, Cris Tales s'annonce toujours aussi ambitieux que lors de notre premier contact. Porté par une direction artistique assez singulière et puisant son inspiration dans une culture trop peu représentée dans le jeu vidéo, ce RPG d'inspiration japonaise continue d'emprunter avec justesse bon nombre de mécaniques aux grands noms du genre, pour se forger une identité propre. S'il faudra veiller à ne pas forcer la dose sur la difficulté, nous avons déjà très envie de recroiser la route de Crisbell pour manipuler le temps avec autant d'ingéniosité.