Les Schtroumpfs vivent dedans, Mario en gobe pour grandir et s'en fait même des potes, c'est indéniable en général, le champignon bénéficie plutôt d'une image sympathique. Mais voyez-vous, personnellement, avec les champignons, j'en suis resté bloqué à cette scène de L'Ours dans laquelle notre petit héros d'ourson gourmand se retrouve à méchamment badtripper et à ces pubs infectes où l'on nous présente des ongles tellement mycosés que le seul remède envisageable à mon sens serait de couper directement le pied. Bon, tout ça en fait, mais ça prouve bien qu'il faut s'en méfier des champis, c'est de la gnognotte à côté de ce genre de champignons entomopathogènes que l'on appelle Cordyceps. Le Cordyceps parasite plante ou insecte pour les ronger de l'intérieur puis pousse gentiment avec le cadavre de sa victime comme terreau. Si vraisemblablement cette saloperie ne peut pas parasiter un organisme humain, c'est pourtant ce qui se passe dans un futur proche, dix ans exactement, dans The Last of Us qui a donc trouvé son T-Virus.

Boston 1997 2023

Au rythme de la propagation à grande échelle de cette infection, la civilisation s'effondre et c'est dans une ville de Boston où les buildings sont couchés les uns sur les autres que l'on retrouve Joel et Ellie bien sûr mais également une femme du nom de Tess. Alors que sont instaurées des zones de quarantaine à la rigueur martiale dictatoriale, le trio s'est fixé pour mission d'amener Ellie aux Fireflies, un groupe résistant, et pour cela ils devront atteindre l'Old State House, le Capitole de Boston au toit doré visiblement encore intact. Si on sait à ce stade du jeu, environ deux heures après son début, que c'est un ami qui a confié à Joel la responsabilité d'Ellie, on ignore encore pourquoi elle doit être confiée aux résistants et en quoi la jeune fille semble si précieuse (si ce n'est la valeur que l'on accorde à la vie d'une adolescente). En tout cas, les chemins jusqu'au dôme d'or vont être sinueux et dans cette partie du jeu qu'il nous a été donné de découvrir, environ trois quarts d'heure après le début, le genre du survival-horror, parfois mis à mal ces dernières années, semble amené à regagner toute sa superbe.

Search, Search, Survive

De survie, il en sera en effet question dans The Last of Us. Pas question de gérer sa faim ou sa soif ici mais plutôt de ramasser tout ce qui pourrait être utile pour se fabriquer armes de fortune ou soins médicaux. Le chemin vers l'ancien Capitole étant obstrué par des tonnes de gravats, notre trio composé de Joel (l'homme quarantenaire que l'on incarne), Ellie, l'adolescente que l'on protège, et Tess, une jeune femme qui à ce moment du jeu fera notre apprentissage de la survie, devra s'aventurer dans un immeuble éventré. Il sera possible d'y récupérer des ciseaux, des bandages, des bouts de verre, parfois des armes de mêlée. Une batte de base-ball par exemple, ou un bout de tuyau en métal qui, associés les uns avec les autres, pourront se révéler plus efficaces face à la menace qui rôde. Car en effet, et on le constatera en ramassant quelques balles (à utiliser avec la plus grande parcimonie) sur des dépouilles que l'on croisera sur notre chemin, la zone dans laquelle on se trouve est potentiellement mortelle. Et sans voir les corps gisants, l'ouïe suffit. Des grognements transpercent les murs du bâtiment dans lequel on prendra soin de ne pas laisser sa lampe torche allumée en permanence pour économiser son énergie. Des bruits de pas résonnent dans les étages supérieurs. Et quand à proximité se fait entendre une sorte de "clic -clic", un peu comme celui que produirait un criquet, c'est qu'il est temps de prendre ses jambes à son cou et de réfléchir. Vite.

Faites entrer l'infecté

Car si d'une certaine manière il est très agréable de parcourir ses ruines "fraîches", de profiter de la beauté terrible de cet environnement qu'affiche un moteur de jeu qui associé à des animations, une interaction entre les personnages et des doublages convaincants, plonge complètement le joueur dans le récit, les mauvaises rencontres sont bien sûr de mise. Si les infectés devraient souffrir de trois types d'évolution de leur parasitage, c'est dans cette partie à deux types que nous avons eu à faire... et ça suffit déjà comme ça ! Aussi flippantes par leur mise en scène que malignes par les mécaniques de jeu qu'elles imposent, les rencontres avec les "runners", ces infectés sensibles à la lumière qui fonceront sur vous s'ils vous voient et les "clickers" (c'est eux le "clic-clic"), aveugles mais réagissant au moindre son, constituent des moments de peur intense. Afin de pouvoir déterminer où se trouvent ces abominations à proximité, Joel a la capacité de s'accroupir et d'écouter pour situer les présences. Il faudra ainsi la jouer fine car la première étreinte du cliker sera par exemple fatale. Infiltration ou action, à vous de voir, mais pour être mort plusieurs fois, c'est une certitude, il faudra bien élaborer votre plan. Ce qui est assez génial, c'est qu'à rejouer trois fois la même situation, vous n'aurez l'assurance que d'une seule chose : rien ne se passe jamais comme la fois d'avant. Ainsi, il faudra séparer les infectés, en attirant par exemple l'attention de l'un d'entre eux en balançant une bouteille en verre dans un coin, ou au contraire les rassembler pour rendre plus efficace le jet d'un cocktail molotov que vous aurez pu fabriquer grâce au butin récolté en chemin. Égorger en se faufilant par derrière ou dans le pire des cas se débattre et tout donner dans une série de coups de poings. Aussi harassantes que sournoises, les confrontations avec les infectés sont terrifiantes et paradoxalement, j'ai très envie de m'y frotter encore.

Après le grand spectacle Uncharted, il semblerait que Naughty Dog s'apprête à démontrer une nouvelle fois sa maestria, cette fois dans le survival-horror, deux mots qui, si on fait l'impasse sur tous les superlatifs que l'on voudrait accoler à The Last of Us après une seule petite heure de jeu, le déterminent totalement. C'est décidément un trop petit moment que nous avons passé dans ce Boston en ruines, pour cette exclusivité PS3 qui semble cumuler un sens de la narration et de la mise en scène cinématographique très poussé et des mécaniques de jeu jouant avec les nerfs et la capacité de réaction du joueur face à des situations de frousse intense. Si comme tout le monde j'attends le mois de juin (14) pour ses beaux jours, je l'attends aussi désormais pour les jours sombres que me promet le récit de The Last of Us.