Gameblog : Est-ce qu'au moment d'attaquer le développement de StarCraft II, vous avez envisagé la possibilité de partir dans une toute autre direction, un peu à l'instar de ce qu'ont fait les gars de Relic avec Dawn of War II ?

Bob : C'est vrai qu'il y a eu pas mal de RTS ces douze dernières années, beaucoup de nouveautés ont été intégrées aux mécaniques du genre et nous en étions bien conscients. Mais on a choisi de donner au multi de StarCraft II le même feeling que celui du premier volet : un rythme soutenu, trois races très différentes les unes des autres et un système de ressources qui, à notre avis, est l'élément essentiel de la partie stratégique du jeu. On a testé des nouvelles choses, comme un système de couverture, mais au final, ça ralentissait le gameplay et ça ne ressemblait plus à StarCraft.

Frank : StarCraft existe depuis douze ans, la communauté compte un grand nombre de fans passionnés, et très rapidement nous avons décidé qu'il était nécessaire de rendre l'expérience de jeu dans StarCraft II la plus familière possible pour ceux qui avaient joué au premier.

Bob : En y réfléchissant bien, si vous prenez une partie classique de StarCraft, on passe d'un jeu basé sur de petites escouades à quelque chose de plus massif, au fur et à mesure que l'économie se développe.

Frank : Je dirais que d'une certaine manière, la base de StarCraft repose sur les ressources, sur la manière dont on bâtit son économie et sur le grand nombre d'unités. Et nous voulions préserver cet aspect des choses.

Pourriez-vous nous en dire plus sur les « challenges » ? Quel était votre objectif en implémentant ce mode de jeu ?

Frank : Le rôle des challenges, des tutoriaux et sa campagne solo, c'est de permettre aux joueurs qui découvrent StarCraft d'être armés pour la compétition sur Battlenet. D'ordinaire, on se sert de la campagne solo pour combler ce fossé, mais on s'est rapidement rendus compte que pour StarCraft II, ce n'était pas suffisant et qu'il était très délicat de présumer des connaissances des joueurs. C'est pourquoi nous avons créé le mode challenge, pour leur apprendre à mieux comprendre les mécanismes dont ils auront besoin pour retirer plus de plaisir d'un affrontement sur Battlenet.

Bob : La plupart du temps, les campagnes ne vous préparent pas au multijoueurs. Surtout si on tient compte de ce que nous voulions faire de celle-ci : quelque chose de très scénarisé, avec des concepts de gameplay originaux. En ne considérant pas la campagne solo comme une préparation au multijoueurs, ça nous a permis d'avoir plus de liberté pour créer une campagne et des missions plus intéressantes, autre chose que « voilà ta base, voilà celle de l'ennemi, va le tuer ». Et le mode « challenges » vous apprend des choses pragmatiques : comment utiliser les hotkeys, comment contrer des unités, comment arrêter un rush, etc. Cela permet aux joueurs de s'entrainer sur ces compétences particulières, histoire de survivre en multijoueurs.

Quelle est la situation en Corée du Sud pour le moment ? Le gouvernement voulait interdire le jeu aux moins de 18 ans, qu'en est-il aujourd'hui ?

Frank : On vient de représenter une nouvelle version du jeu et nous avons finalement obtenu une classification « 12 ans et plus ». Donc, c'est réglé.

Et ce sera le même jeu ?

Frank : En termes de gameplay, oui, ce sera exactement le même jeu. Vous savez, il est nécessaire de faire des ajustements pour les différentes régions du monde parce que les classifications ne sont pas les mêmes. En Allemagne, par exemple, on a dû remplacer le sang par un liquide noir. Voilà le genre de différences que vous pourrez voir, uniquement des retouches artistiques. Mais au niveau du gameplay, ce sera la même chose partout dans le monde.

Qu'en est-il des différentes formules de paiement ? En Russie, j'ai lu que vous alliez proposer le mode multijoueurs sous forme d'abonnement. Est-ce que chaque région du monde aura un business model particulier ?

Bob : Notre processus de « localisation » ne se cantonne pas aux textes et aux dialogues. On jauge aussi chaque marché et on détermine ce qui est le plus approprié pour chacun d'entre-eux, parce que de toute évidence, la situation économique n'est pas la même partout dans le monde. Il est probable qu'on fasse le même genre de choses en Amérique du Sud ou en Asie du Sud-Est.

Frank : C'est pour ça qu'on a des bureaux un peu partout dans le monde. Ils analysent le marché, établissent des recommandations qu'ils m'envoient. Et ensuite, ma tête se met à tourner.

Frank Pearce

Vice-président et co-fondateur de Blizzard à l'époque où la société s'appelait Silicon & Synapse, en 1991, Frank Pearce est aussi le producteur exécutif de Starcraft II. Il l'était également sur World of Warcraft, le plus gros succès du développeur, et, d'une manière générale, Frank est en charge de tous les développements produits chez Blizzard Entertainment.

Bob Colayco

Ancien critique sur le site américain GameSpot, Bob Colayco a rejoint Blizzard Entertainment en tant qu'attaché de presse avant le lancement de World of Warcraft : The Burning Crusade, première extension du MMORPG, sortie en 2007.