Bien que jusqu’au milieu des années 90 les éditeurs asiatiques et occidentaux s’attachaient à minimiser le rôle central des développeurs et créatifs dans la création d’un jeu (cette pratique scandaleuse de non considération perdure de nos jours, mais elle prend généralement la forme de sanction), de talentueuses signatures des générations 8/16bits sortent heureusement de l’oubli.
 
C’est le cas de Manami Matsumae, compositeur du thème musical de Mega Man. Cette femme discrète a étudié la musique à l’université. Son instrument de prédilection est le piano, mais sa curiosité musicale ne connaît pas de frontières. Au terme de son cursus universitaire, celle-ci s’interroge sur son avenir professionnel. Jusqu’à ce qu’elle tombe au hasard d’une recherche d’emploi sur l’appel à candidatures de Capcom . L’éditeur recherche en effet un compositeur de musique de jeu vidéo. Matsumae travaille alors à l’écriture de la partition musicale de Mega Man en 1987. En plus de cette franchise, elle compose les musiques de Dynasty Wars, SonSon II ainsi que Carrier Air Wing, mais quitte la société éditrice en 1991.
 
Sa courte présence chez Capcom l’amène à côtoyer Keiji Inafune, également très impliqué dans l’élaboration de Mega Man dont il revendique une paternité spirituelle à défaut d’être le véritable créateur. En hommage à cette période dorée, ce dernier l’a enrôlé dans la conception musicale de Mighty N°9. Elle signe également son talent dans la réalisation de Shovel Knights voire des productions éloignées du jeu vidéo.
 
Selon Matsumae, composer de la musique pour l’industrie du jeu vidéo est plus ouvert qu’il ne l’était à ses débuts. Elle s’en explique : « Je ne pouvais entrer quelques notes pour une durée limitée. Maintenant, je peux me permettre d’insérer ce que je veux dans ma musique sans que le jeu en souffre ». Elle fuit les cadres de travail étouffant : « La communication est plus fluide à l’intérieur des petites équipes, les recours et explications circulent plus rapidement. Les effectifs importants créés des strates qui nuisent à la circulation de la communication et à la créativité ». De même que les barrières culturelles restent contenues d’après sa propre expérience professionnelle : « Je ne perçois pas de différence frappante ». Elle concède toutefois que les musiciens de son pays d’origine « sont considérés comme très à cheval sur la qualité de composition. Il m’est arrivé de recommencer une musique plusieurs fois avec mes homologues japonais ».
 
Elle travaille désormais sur un projet indé ayant réussit sa campagne Kickstater : Target Acquired.