Secret Files est une série de click'n play qui ne paie pas de mine dans le paysage vidéoludique actuel. Vraie surprise dans son premier épisode où on y allait une simplicité, couplé à de l'efficacité et à une bonne écriture, la série a gagné le droit d'avoir une suite. Et aujourd'hui un troisième épisode. De nos jours, c'est assez rare de voir un click'n play commercialement émerger. Reste à savoir si ce Secret Files 3 se rattrape après un deuxième épisode très consensuel et sans surprises.

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Même si le nom du studio de développement a changé, Animations Arts Creations ayant remplacé Fusionsphere, c'est la même équipe allemande derrière ce troisième épisode. A savoir dirigé par Marco Zeugner et Jörg Beilschmidt principalement (l'un étant scénariste et réalisateur, le second lead designer). On reconnaît alors aisément la patte des deux précédents épisodes dès l'introduction du jeu. Une ancienne découverte mythologique va mener le monde actuel à sa perte. Après les secrets de Tunguska et les dérèglements climatiques, voilà qu'une technologie avancée datant du temps de l'Antiquité menace de détruire le monde. Encore une fois, notre rouquine super sympa, Nina Kalenkov, va se mêler à cette histoire où des vilains ont décidé de s'emparer de cette technologie sans en connaître sa dangerosité. Par dessus le marché, son fiancé Max est capturé devant ses yeux par des types armés tel le SWAT. Une raison bien suffisante pour aller aider son futur époux (car un mariage ça ne se rate pas, comme vous savez).

Ce scénario part encore plus loin dans l'abracadbrantesque vis à vis du deuxième épisode que l'on avait déjà pointé du doigt. Si Tunguska s'était avéré intéressant est parce qu'il collait à un fait d'actualité assez frais et en plus toujours empli de mystère. Or, ici, l'histoire va lorgner vers le fantastique total puisque Nina a des rêves prémonitoires... Pour le coup, l'aspect amusant semi-réaliste du premier épisode est bien éloignée. Nina s'enfonce tête la première dans les ennuis et par conséquent, l'histoire ne se révèlera guère passionnante en soit, en plus d'être totalement incongrue. Comme d'habitude avec cette série, c'est le charme des situations qui a l'obligeance d'effacer un scénario naïf. Et comme d'habitude, Nina est chouette. Une sorte de « pote » qui a toujours la remarque finement placée sans tomber dans le cynisme, le sarcasme ou la moquerie (n'est-ce pas Georgie ?). Ce charme y est toujours comme bien souvent mais elle ne va pas vraiment s'époumoner dans cet épisode vu qu'il n'y a que deux uniques dialogues possibles dans tout le jeu. Oui, oui vous avez bien lu. Nina ne rencontrera - in-game, bien sûr - que deux personnages avec qui interagir et ce, pour une énigme désespérante de facilité. Un click'n play sans dialogues bien senties ? Sacrilège ! Il y en a un peu mais toujours motivé par le scénario qui reste scotché en mode « alerte » sans aucune investigation plus posée empêchant toute forme d'humour bien sentie. L'urgence des situations fait que Nina va enchainer ses énigmes, déclencher quelques cut-scenes à la rigidité d'un tout autre âge au point où chaque animation trop compliquée (exemple : un flic se levant de son siège) sera coupé par un fondu noir... Clairement cheap. Ajoutons à cela, les cadrages quasiment frontales lors des cut-scenes posées et on ne peut pas dire que Nina soit à son avantage. Clou du spectacle, difficile de tomber sous le charme du personnage si elle ne parle qu'en anglais après avoir été habitué au doublage français pendant deux épisodes... Alors que les précédents épisodes étaient français, celui-ci n'est qu'anglais, sans sous-titrage français (juste anglais ou allemand). Ainsi, les anglophobes ne sont pas les bienvenus et on a probablement perdu au change dans la tonalité de la voix, tant elle manque de fraicheur (bien que le manque cruel de dialogues joue beaucoup).

Et Pi c'est tout

Le jeu se parcourt quasiment d'une traite, tant la difficulté y est abonnée absente. Peu de dialogues, donc peu d'interactions mais surtout des séquences de jeux aux plans fixes et presqu'uniques. C'est à dire que chaque séquence de jeu se jouent avec un seul plan à balayer de votre souris. C'est terminé les salles munies de deux, trois, voir (soyons dingues) quatre plans de jeu. En avançant plus loin dans le jeu, on en aura deux à tout casser par pièce. Qui dit salle de jeu restreinte, dit moins d'interactions, donc moins de combinaisons donc plus de facilité. Et effectivement, ce Secret Files est très assisté. Vous balayez votre souris et combinez vos objets avec une nonchalance certaine puisque l'icône de votre souris changera en cas d'interaction. Et comme il n'y a pratiquement aucune chance d'essayer une mauvaise combinaison et qu'il y a très peu d'interactions, la suite est évidente. On notera aussi la présence de puzzles assez lourds car pas très ergonomiques à prendre en main comme se balancer d'une statue (en cliquant sur des icônes), ou sortir d'un labyrinthe sous-marin, censés meublés et rythmés l'aventure. Mais on aurait préféré un travail sur les bases du click'n play : les énigmes. Or, elles sont aux abonnés absentes. Nos méninges ne sont pas creusés, le tout s'enchaine trop logiquement, trop aisément, la faute à des petits tableaux fixes (aucun scrolling) et de trop peu d'interactions. En 6 heures, le jeu est bouclé et malgré la possibilité de déclencher quatre fins (en ayant deux choix scénaristiques à faire), cette dernière sera très courte laissant le joueur pantois. Enfin, graphiquement, le jeu tient la route pour le genre avec quelques beaux tableaux et effets de lumières sans pour autant faire de mal à votre vieille configuration. On soulignera aussi, grâce en partie à l'astuce des rêves de Nina, la variété des décors (Italie, Egypte, France) mais qui défilent rapidement sous nos yeux et sans grande présence de vie, comme signalé plus haut.

Jeu rapide, critique rapide, Secret Files 3 marque la fin d'une série qui s'essouffle et manque d'inspiration et surtout immanquablement de moyens. Plus court, plus simple, plus rapide (où vous vous surprendrez à double-cliquer sur les sorties de tableaux pour éviter de regarder l'animation de course du personnage), plus incongrue, Secret Files n'a plus grand chose pour lui à part une héroïne encore un peu attachante et son ton semi-réaliste aventureux d'une autre époque. Il est temps de passer à autre chose au vue du manque d'attention de cet épisode... Et on n'en tiendra pas vraiment rigueur à l'équipe allemande au vu du public de niche que représente le jeu, sorti dans une discrétion plus grande encore que les deux volets précédents.

 

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