Ori and The Blind Forest - nouveau plateformer 2D sexy développé par Moon Studio et édité par Microsoft - aurait pu s'intituler Oh-tiens, enfin une (bonne) exclu sur Xbox One. Du moins, c'est comme ça qu'on l’aurait appelé si le titre n'était pas également disponible sur PC. Ah, et maintenant aussi sur Xbox 360 ; renvoyant ainsi la "One" susse-nommée au rang de boite noire pour salons de  gamers aux gouts vidéoludiques décoratifs pour le moins douteux.

Mais bref, trêve de mauvais esprit. Et donc ORI, c'est plutôt bien alors ? Oui c'est plutôt bien en effet.
Nul besoin de s'étendre sur les qualités visuelles et artistiques du titre puisqu'il n'y a pas vraiment matière à débattre : oui c'est super beau. Oui c'est super "mignon" (dans le bon sens du terme). Oui, Oui et Oui on en prend plein les mirettes.
S'il fallait toutefois pinailler (on est là pour ça après tout), on pourrait dire que les environnements sont même presque trop détaillés et trop animés, au détriment parfois de la lisibilité. Mais bon c'est vraiment histoire d'être chiant.

D'un point de vue Gameplay, ORI est donc un jeu de plateformes, qui reprend bon nombre d'éléments du genre Metroidvania. Une vision simplifiée dans la forme mais pas vraiment dans le challenge proposé. En effet, le titre est plutôt ardu, voire même limite frustrant parfois (on y reviendra). Il le sait d'ailleurs et c'est pourquoi il offre au joueur la possibilité de gérer lui-même l'emplacement de ses différents points de sauvegarde; ce qui contrebalance habillement la difficulté croissante du titre.

 Il est possible de sauvegarder à tout moment  en échange d'une orbe bleue (elles se rechargent toutes très rapidement par la suite) ...

En fait, l'exercice de "critiquer" ORI est assez difficile tant le titre peut sembler inattaquable à bien des égards.
Certes, il ne brille pas vraiment par son originalité puisqu'il "repompe" allègrement tout ce qui s'est fait de mieux dans le platformer 2D ces 20 dernières années, de DK Country à Rayman Legends, en passant par Super Meat Boy. Certains diront qu'il se place en digne héritier de tout ce beau monde, d'autres y verront plutôt un manque d'inspiration avoué. Et les deux parties auront probablement raisons car Ori c'est finalement un peu des deux à la fois.

D'un point de vue très personnel - et malgré toutes les qualités objectives du titre - le plus gros point noir d'ORI réside dans le fait que son Gameplay ne bascule jamais vraiment dans un "état de grâce". Ce moment particulier où, fort de son apprentissage, le joueur ne fait plus qu'un avec le jeu;  ce moment où, sans vraiment comprendre comment - il réalise des prouesses, presque par instinct, comme s'il était entré en "transe".
C'est selon moi ce qui fait l'essence d'un bon jeu de plateformes (voire d'un bon jeu tout court)... Et c'est hélas, quelque chose qui fait trop souvent défaut à ORI.

Je prendrai comme exemple le plus parlant les phases de "fuite" à la fin de chaque gros tiers du jeu. Ces séquences interviennent à des moments stratégiques et sont censées représenter les véritables Climax de l'aventure. Elles constituent une alternative aux très classiques combats contre des boss mais le principe reste le même : tester tout ce que le joueur a pu expérimenter jusqu'alors dans un condensé éprouvant, épique et tout en tension.
Et si une fois de plus, ces séquences sont parfaitement maitrisées d'un point de vue artistique (musique, animation...), elles ne fonctionnent tout simplement pas mannette en main : ce ne sont que de vulgaires phases de Die&Retry, boiteuses et mal rythmées, ce qui foire totalement l'effet recherché. Un florilège de morts gratuites jusqu'à intégration dans la douleur de la totalité de l'enchainement à réaliser, sans faute.
Sans faute oui, mais surtout sans prouesse.
Et comm
e il est impossible de sauvegarder durant ces passages, difficile de ne pas entrevoir cela comme un moyen un peu malhonnête de booster la difficulté d'un titre qui n'en avait pourtant pas besoin.

... Et vous allez en bouffer de la sauvagerde !

En effet, ce sentiment n'estpas exclusif à ces moments précis. Si ce n’est pas un défaut majeur à proprement parler, le jeu repose néanmoins trop fréquemment sur ce même principe ; à la différence près que la facilité apportée par les sauvegardes quasi-permanentes éclipse en partie le procédé. Procédé qui (à mon sens encore une fois) est un artifice pour combler des lacunes dans le game design : Ori ne devient alors plus qu'une banale alternance de passages délicats entrecoupés de centaines de points de sauvegarde, intéressants à jouer dans les faits mais où l'on ne prête plus la moindre attention à l'échec.
Du Die&Retry simplifié et accessible en somme – et c’est pourquoi j'imagine que beaucoup y trouveront leur compte puisque la formule est justement très intéressante pour limiter la frustration (sans compter le challenge pour tous nos amis speedrunners). Pour ma part, j'aurais tout simplement espéré un rythme un peu plus fluide pour favoriser mon immersion dans une aventure globale, et non une somme de petits exercices de plateformes, si agréable soient-ils.

Beau.

Un dernier reproche cette fois-ci beaucoup moins pardonnable : Le jeu est vraiment très mal fini. A tel point que l'on se demande presque parfois si l'on n'est pas en train de jouer à une version Early Acess. Ori est en effet truffé de "glitch" où il peut arriver malencontreusement de "briser le code du jeu" pour se retrouver purement et simplement bloqué sans aucune échappatoire (une autre des joies du système de sauvegarde - allezvoir du côté du Forum sur Steam, c'est un régal).
Et comme un exemple vau
t bien mieux qu'un long discours, voilà précisément ce qu'il m'est arrivé lors de ma première partie :

Une seule solution dans mon cas : recommencer une nouvelle sauvegarde. Pas un drame en soi à ce moment de l'aventure, mais impardonnable pour un jeu de cet envergure.
Bref, j'imagine que les développeurs de Moon Studio sont en train de plancher sévère pour sortir des patchs correctifs … et ce ne sera pas du luxe.

 En conclusion, et s'il peut ressortir de la lecture de ma critique un gros focus sur ses aspects négatifs (de manière sévère et très subjective, je ne m'en cache pas), Ori n'en demeure pas moins un excellent jeu. Porté par une direction artistique quasi sans-faute et une jolie histoire sans prétention, il s'agit probablement de l'un des titres les plus intéressants de ce premier trimestre 2015.
Intéressant certes, mais à mon sens, loin d'être sans reproche. Et si sa plus grande qualité réside dans sa volonté de se distinguer de toutes les autres productions et/ou remakes insipides qui ont fait légion dernièrement (et on ne le remerciera jamais assez pour ça), Ori n’en reste pas moins un pur produit de son époque. Une époque où le budget marketing passera toujours avant la phase de QA d'un titre. Mais après tout, ce n'est pas grave, les joueurs s'en chargeront. Gratos en plus. Ou plutôt en filant 20 balles et en attendant un simple patch qui viendra tout corriger à terme.
Alors, elle est pas belle la vie ? Bref sur ce, moi je retourne me faire Donkey Kong Country.