Si les programmeurs, game-designers, level-designers et autres graphistes ont généralement bonne presse auprès des joueurs, c'est généralement moins le cas pour d'autres équipes de l'industrie du jeu vidéo : les services marketing. Si les premiers sont souvent vus comme des passionnés de jeu mettant tout leur cœur dans leurs créations, les seconds (dont je fais partie) trimballent le plus souvent l'image de VRPs qui pourraient aussi bien vendre de la crème pour l'acné juvénile... A la fois membre de l'équipe marketing d'un jeune éditeur indépendant (Heliceum pour nos amis sous hautes doses de Prozac) et amoureux du jeu vidéo, je vais essayer dans ce petit article de vous expliquer pourquoi il est possible de concilier les deux sans renier l'un ou l'autre.
 

 

Pour commencer je vous propose une petite liste rapide des jeux qui ont le plus marqué ma vie de joueur. L'idée est bien entendu d'endormir votre vigilance en vous lançant aux yeux une liste d'œuvres plus marquantes les unes que les autres et d'ainsi créer un lien de confiance factice entre vous, consommateurs de désinformation marketing, et moi tueur de bébés phoques prêt à tout pour redorer son blason... Ou alors, simplement de vous exposer facilement mes influences et mes sensibilités en termes de jeu vidéo lorsque j'exerce mon métier au quotidien... au choix ! 

  • Alone in the Dark : je n'en ai qu'un souvenir parcellaire (je devais avoir 6 ou 7 ans) mais c'est le premier jeu auquel je me souviens avoir joué, chez mon meilleur ami et sur disquettes bien sûr !
     
  • The Curse of Monkey Island : 1995, mon premier PC et le premier jeu qui va avec. Des heures de prise de tête et de fous rires avec mon frère.
     
  • Sim City 2000 : ou comment construire la ville parfaite et la faire brûler un seau de pop-corn à la main.
     
  • Day of Defeat : plus qu'Half-Life c'est ce mod qui a fait de moi un ermite au collège. Avalanche quand tu nous tiens...
     
  • Max Payne : La plus grande claque graphique de ma courte vie de gamer. Je me rappelle avoir essayé de terminer le jeu en faisant uniquement des headshots (à grand renfort de F5/F9). Et quand je pense qu'il n'y avait même pas d'achievement pour ça...
     
  • Europa Universalis II : Une grande partie de la culture historique que j'affiche dans les diners mondains me vient du bébé de Paradox sur lequel j'ai battu tous mes records de jeu sans s'arrêter. Il faut bien cela quand on tente de conquérir le monde avec la Bavière...
     
  • Et bien d'autres : Diablo II, Theme Hospital, Civilization II... mais ça finirait par faire long !

Maintenant que vous en savez un peu plus sur mon passé vidéo-ludique, j'aimerais vous exposer la vision du marketing qui m'anime et qui je pense, anime toute l'équipe Heliceum. Non pour nous le marketing ce n'est pas de faire passer la dernière des bouses pour le jeu de l'année auprès de consommateurs pris pour des poules attardées. D'abord ce ne serait tout simplement pas possible pour plusieurs raisons :

  • Notre talentueuse équipe de développeurs ne fait et ne fera JAMAIS de bouses.
     
  • Les consommateurs ne se laissent plus avoir par des jeux du niveau d'E.T. comme au bon vieux temps de l'Atari 2600 (l'âge d'or quoi...).
     
  • La presse spécialisée se chargerait bien vite de révéler la duperie...

 


 

Mais, ce n'est pas par peur de la réaction des consommateurs ou de la presse que nous faisons notre métier avec passion et déontologie. C'est d'abord parce que pour nous, l'essence du marketing c'est la rencontre parfaite entre un produit (dans notre cas le jeu) et son marché. C'est-à-dire chercher à savoir quelles sont les attentes des consommateurs (marché), créer une expérience qui y réponde au mieux et qui porte les valeurs de notre entreprise, puis faire en sorte que ce jeu soit visible auprès des consommateurs pour lesquels il a été conçu (publicité). Le cœur de notre action est donc de vous prouver (à vous) que les jeux créés par notre équipe de développement (à nous) sont nés dans un seul but : vous faire kiffer !

Mais NOUS c'est qui exactement ? Car si vous connaissez sans doute la plupart des métiers du développement, les métiers du marketing sont, eux, souvent moins connus. Petit tour d'horizon :

  • Le Chef de Produit : son rôle principal est de coordonner tous les autres corps de métier pour gérer les différents moments de la vie de la communication du jeu (création, teasing, sortie...). Il a un nom sympa qu'il aime mettre en avant mais en fait il n'est le chef de rien du tout et est surtout là pour faire des blagues.
     
  • Le Community Manager : c'est celui que vous connaissez le mieux puisque c'est lui qui est chargé de la relation avec vous, la communauté ! Tout ce qui se dit sur nos jeux sur l'Internet mondial c'est lui ! Et puis comme les budgets sont serrés il fait aussi l'animation musicale pendant les soirées d'entreprise. 
     
  • Le Responsable PR : c'est lui qui s'occupe de la relation entre Heliceum et tous les journalistes, de tous les pays et de tous les médias. En gros une bonne note pour le jeu c'est grâce aux développeurs, par contre une mauvaise c'est pour sa pomme !
     
  • Le Graphiste Marketing : il se sert de tous les éléments que peuvent lui donner les graphistes de la production pour faire toutes les images marrantes (on espère) que vous voyez sur nos réseaux sociaux. En plus, comme il est sympa, il fait aussi nos cartons d'anniversaire.
     
  • Nathalie : c'est notre Maman à tous qui fait tout pour que la vie soit agréable dans les bureaux. Attention cependant à ne pas l'énerver, ça peut piquer !


Et NOUS faisons notre métier avec passion car NOUS aimons les produits que NOUS mettons en avant. Ce n'est sans doute par encore le cas partout, mais je puis vous assurer que la grande partie des services marketing de l'industrie est composée de passionnés de jeux vidéo. Notamment chez Heliceum bien sûr ! Car chez nous,  les équipes marketing sont impliquées émotionnellement dès le début de la création de nos jeux. Ainsi, lorsque nous les mettons en avant c'est parce que nous les connaissons et qu'ils nous ont nous-même amusé. Vendre un jeu vidéo ce n'est donc pas pour nous simplement faire un trailer sur YouTube et distribuer des communiqués de presse ! Non, pour nous cela veut dire des heures de réunions pour savoir comment doivent être designés les premiers niveaux de Human Defense pour que l'expérience soit la plus intuitive pour tout le monde. C'est aussi des heures de débat pour savoir si notre jeu est trop « core » ou trop « casual », s'il doit être fun pour tout le monde ou si nous faisons un jeu pour les hardcore gamers. Enfin, ce sont surtout des heures de discussion avec « la prod » pour sentir au mieux ce qui les passionne dans le jeu qu'ils sont en train de créer, s'en imprégner et pouvoir vous le transmettre au mieux.

J'entends souvent dire qu'un jeu, même excellent, ne peut plus connaître de succès sans soutien marketing, et que c'est bien malheureux. Il est vrai que même les jeux catégorisés comme « indépendants » peuvent désormais difficilement se passer d'un minimum de marketing, ne serait-ce que de la visibilité qu'offre le Xbox Live, le SEN ou l'App Store. Mais est-ce vraiment malheureux ? Bien sûr que non ! C'est le signe d'un foisonnement sans précédent de l'offre vidéo-ludique. Une quantité impressionnante de jeux de qualité sort quotidiennement sur toutes les plateformes et, dans mon esprit, le marketing est là pour que chacun de ces jeux trouve le public pour lequel il a été pensé. Effectivement, certains jeux de qualité médiocre profitent d'un appui marketing énorme et certains petits bijoux n'ont pas le soutien qu'ils mériteraient... Mais cela n'empêche pas de reconnaître que le marketing permet de mettre au grand jour des perles qui n'auraient sans doute pas émergé autrement. Qu'auraient-été des Rayman Legends, des Angry Birds ou des Human Defense sans la campagne de promotion qui les a porté auprès d'un public plus large que jamais ? Ce sont ces belles histoires qui nous animent quotidiennement et nous font aimer notre métier !

Evidemment, comme dans tous les milieux, tous les secteurs, tous les métiers on trouvera dans le marketing du jeu vidéo des gens que la passion du média et la déontologie n'intéressent pas et pour qui seul le résultat commercial compte. Mais heureusement, on y trouve surtout des mordus de jeu vidéo pour qui l'objectif principal est de satisfaire les joueurs. Pour ma part j'essaye simplement de vivre au quotidien notre devise « Life is a game! » et de la transmettre aux joueurs du monde entier (et ouais rien que ça).

Nous espérons bien vous prouver que toutes ces belles phrases ne sont pas de la poudre aux yeux, au travers de nos prochaines campagnes par exemple, ou lors de nos éventuelles prochaines rencontres (qui a dit playtest ?) !

 

La vie est un jeu !
Arthur