Après la dithyrambique critique de Skywilly, l'intérêt que je portais au film est monté d'un cran, déja que le petit me titillait depuis un bon moment. Pour ma part, je n'ai vu que le film de Tim Burton et ma connaissance des vieux films se résume à la simple trame de l'histoire. Pour l'heure, j'étais vierge de toutes références pour ce nouvel épisode qui peut être considéré comme un reboot et non un remake. Mais à la sortie du film, le doute n'est pas permis: quel spectacle, mes amis!

L'histoire propose une trame incroyablement bien dosée, avec une montée en puissance de folie, qui reflète bien tout l'enjeu de l'histoire. Un scientifique (James Franco) qui étudie un médicament chargé d'éradiquer la maladie d'Alzheimer se fait éjecter de son poste suite à un accident, qui laisse un chimpanzé victime de ce médicament orphelin. Evidemment, pour le sauver de l'injection, il l'embarque chez lui et son père, atteint lui aussi de la maladie, et va l'élever comme son enfant.

La véritable force du film est César, ce chimpanzé justement, qui n'a pas connu autre chose que ses parents humains adoptifs et qui va développer une intelligence hors norme. Cette évolution va aussi le confronter à la vraie nature humaine, et découvrir comment l'homme traite une espèce animale qu'il pensait comme égale, et non inférieure. César est probablement le meilleur personnage du film et même un des meilleurs du cinéma en général. Complexe, ne s'exprimant que par le geste, le regard et les cris, il est parfaitement crédible et Andy Serkis ajoute un naturel complètement désarmant. On ne peut pas rester insensible face à ce singe à qui on s'attache très rapidement. Sa peur, son désespoir, sa tristesse y trouve une justesse assez inouïe. Encore une fois, les FX en images de synthèse nous mettent une gigantesque baffe dans la gueule après Gollum et King Kong. Encore plus ici, le personnage sert réellement l'histoire et n'est plus simplement un artifice. Il est le héros du film, celui qui va emmener le spectateur sur sa direction.

Mais Les Origines, c'est aussi un film au déroulement parfait. Il prend le temps de poser les personnages, tranquillement, sans se presser durant les deux heures que durent le film. Il complexifie au fur et à mesure les caractères des personnages en leur amenant de l'épaisseur jusqu'à la dernière partie du film, beaucoup plus orienté action, mais qui permet de faire éclater la fureur des singes et de dévoiler les conséquences de toutes les scènes précédentes. Une dernière partie absolument dantesque, à l'image de cette bataille sur le pont superbement mise en scène, avec une caméra fluide et qui virevolte dans tous les sens.

(POSSIBILITE DE SPOILERS)
Plus encore, Les Origines est bien plus profond qu'il n'y paraît et remet à sa place l'Homme dans la hiérarchie des espèces animales. Au final, l'homme n'est qu'une espèce animale comme une autre, et même si le singe dans le film devient plus intelligent, il reste ancré dans ses origines et ne fait que se mettre sur le même pied d'égalité que l'homme (le rapprochement avec l'époque des esclavagistes n'est pas très loin). C'est aussi ce qui différencie celui-ci des autres films, César n'a aucune intention de s'en prendre aux humains, il veut tout simplement que son espèce reprenne la liberté qui lui revient de droit.

Ce "soulèvement" conduira certainement sur autre chose par la suite (si suite il y a), mais le film n'en n'a que faire et se concentre sur la vision des autres espèces animales sur les humains. Comme si Mère Nature montrait de plein fouet tout ce que l'homme a entrepris de mauvais depuis qu'il est tout en haut de la chaîne alimentaire. Le film pourra par contre décevoir ceux qui voulaient voir une "vraie" préquelle à la Planète des Singes, en somme voir comment les singes ont conquis la Terre. Il n'en est rien, vu que les singes ont un tout autre objectif. A ce sujet, c'est dommage de voir que le film est presque vendu comme un film de prise de pouvoir des singes contre les hommes, ce qu'il n'est pas (et c'est ce que les fans attendaient, vu qu'ils pensent logiquement aux autres films). Néamoins, je trouve justement ce virage bien plus intéressant et plus crédible par rapport au personnage de César, qui n'a jamais manifesté dans le film aucun désir de pouvoir.

En ce qui concerne les autres films, ça devient plus complexe. En effet, les six premiers films (les vieux) forment un tout à peu près cohérent, une histoire avec un début et une fin et même une explication proposée sur le soulèvement des singes et leur intelligence (mais dans le désordre chronologique, à la Star Wars). Celui de Burton n'a rien à voir avec les vieux si ce n'est le principe des singes qui contrôlent les humains, mais est dans une autre alternative: suite à une anomalie temporelle, un vaisseau de recherche retournent à l'époque de la Préhistoire avec des singes évolués qui du coup le seront plus que les humains actuels qui deviendront leur esclave. Lorsque le héros repart dans le présent à la fin du film, le mal est fait et les singes ont remplacé les hommes. Les Origines propose une troisième alternative qui n'a plus rien à voir mais qui peut très bien proposer une autre vision, vu que la fin est plus qu'ouverte. A voir maintenant si un potentiel second épisode serait intéressant, car il sera du coup nécessaire de franchir une étape pour les personnages comme l'a fait celui-ci.

La Planète des Singes: Les Origines, c'est du blockbuster comme on aimerait en voir plus souvent. Intelligent et intéressant, il délaisse l'action décérébré pour un spectacle fascinant qui donne à l'Homme l'image du grand méchant (et qui se fait punir à la fin de manière radicale). Ça fait du bien de temps en temps. Pour chipoter, je dirais que le petit bémol est de ne pas avoir pu jouer les rôles encore plus violemment, tout est légèrement trop gentil (par rapport à ce que ça représente), mais étant un blockbuster, il n'aurait jamais eu autant de moyens qu'ici et ça n'aurait pas pu être aussi génial.

Verdict: une bonne claque dans la tronche. Une technique qui sert parfaitement l'histoire et ses enjeux, c'est encore trop rare pour le souligner, et quand le tout est aussi bien enrobé, il faut encore plus le noter.