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Lorsqu'ils sont traités par un média grand public, les jeux vidéo ont rarement le droit à des commentaires élogieux (sauf lorsqu'il est question d'un élan patriotique autour du succès des entreprises françaises de l'industrie vidéoludique). Les consternantes interventions de Nagui et Laure Manaudou pendant la chronique sur France Inter de Leïla Kaddour-Boudadi à propos de l'eSport et League of Legends n'en sont qu'une preuve supplémentaire.

Et s'il faut une fois encore saluer le travail effectué par Leïla Kaddour-Boudadi, il est important de noter qu'elle n'est pas la seule à avoir récemment défendu les jeux vidéo au micro de France Inter. Hier, la station de radio a en effet donné "carte blanche" à la chanteuse Juliette pendant son émission Le 07-09. Et l'artiste a profité de l'occasion pour faire un plaidoyer indirect en faveur des jeux vidéo.

Dès la première phrase, le ton est donné (les personnes qui ont écouté ce que Nagui, ses collègues, et Laure Manaudou avaient à dire sur le sujet noteront également la différence de niveau de langage) :

Je vais vous parler des jeux vidéo, des jeux vidéo dont on dit souvent que la pratique mène notre belle jeunesse sur la voix de la violence aussi surement que la consommation de pruneaux mène à la colique.

Avant cette invention du diable, on a jamais vu un ado déboussolé massacrer sa famille ou ses copains de lycée. Ni même des gens frustrés s'engager dans des guerres lointaines juste pour donner un sens à leur désormais courte vie.

Et contrairement à Nagui qui, dans ses "excuses" de ce matin, mettait les clichés qu'il avait employés au sujet des jeux vidéo sur le dos de l'humour, Juliette n'aura pas besoin de s'excuser pour son billet d'humeur. Il apparaît non seulement évident que la chanteuse connaît très bien son sujet, mais aussi que ceux dont elle se moque sont pas les jeux vidéo mais ses détracteurs.

Prenant les jeux de rôle en exemple, Juliette explique que dans ces derniers, il n'est par exemple pas requis d'être un homme musclé pour devenir un héros :

Mais il y a plus insidieux en fait dans la puissance démoniaque de ce passe-temps cathartique. Fus Roh Dah (un cri de guerre issu de Skyrim, ndlr).

Choisir un homme ou une femme n'influencera pas les caractéristiques de votre jeu vidéo : force, volonté, intelligence. Une femme peut jouer de la hallebarde comme une majorette de son bâton et porter autant de poids qu'un âne bâté, tandis qu'un personnage masculin peut être une faible créature qui préfère cueillir des fleurs pour en faire une potion magique. Pour autant, les deux finiront par sauver le monde.

Vous donnez un nom à votre avatar et rien n'empêche votre montagne de muscle barbare de s'appeler Ludovine.

Et lorsqu'elle décrit ce que permet de faire un jeu comme Les Sims, elle montre indirectement que les jeux vidéo et leurs créateurs peuvent faire preuve d'une ouverture d'esprit bien plus grande que les responsables des médias traditionnels :

Dans un jeu vidéo vous pouvez donc choisir votre genre, c'est l'apocalypse. Mais il y a pire.

Encore plus sournois, les Sims (TM), un jeu de simulation de vie sociale qu'on donne aux pré-ado en pensant que c'est un innocent jeu de poupées géant. On précise tout de même "PEGI 12" pour dire qu'aux gamins de moins de douze ans, on a pas envie de dire ce que veut dire faire crac-crac. AAAAAH LES SIMS (TM) !

Ces personnages de pixels sont effrayants de perversion. Outre qu'ils passent un temps infini aux toilettes, ils biberonnent des cocktails bizarres, font des bulles avec un truc qui ressemble méchamment à un narguilé géant, eux-mêmes dans une mise en abime terrifiante jouent aux jeux vidéo pendant des heures, sans compter que le père de famille de votre famille modèle peut très bien s'amouracher du voisin, être enlevé par les extra-terrestres, revenir enceinte puis accoucher d'un gamin vert pâle que vous pouvez appeler Christine si ça vous chante.

Vous conviendrez avec moi que ce jeu là ne doit pas tomber entre toutes les mains.

Comme le rappelle également Juliette, les jeux vidéo ne montrent finalement rien de pire que ce qu'il est déjà possible de voir/lire/entendre dans la vie de tous les jours :

Il existe des tas de jeux vidéo sur tous les sujets y compris les pires : gestion de prison privée, simulation de dictature bananière, fabrication et propagation de virus, à côté desquels ebola fait figure de joyeuse plaisanterie.

Pire encore, vis ma vie de Kim Kardashian et apprends à organiser des mariages jet-set en Italie, ça existe.

Il y a aussi des simulations de conquête politique où vous pouvez vous faire élire socialiste pour faire une politique ultra libérale. Une simulation de civilisation où d'un clic de souris un état athée devient une bonne petite théocratie.

Heureusement que la vraie vie n'est pas un jeu vidéo !

En guise de conclusion, Juliette revient implicitement sur le cliché voulant que les joueurs sont tous des êtres asociaux totalement déconnectés du monde qui les entoure :

Je vous le dis, par quelque côté qu'on le prenne, le jeu vidéo c'est le mal. Je le sais, j'y joue beaucoup.

Et regardez moi où j'en suis : totalement déconnectée de la réalité, et loin du saint pragmatisme, encore persuadée qu'on peut sauver le monde Jean-Luc (elle regarde Jean-Luc Mélenchon, invité de l'émission de France Inter, ndlr), avec une petite épée bâtarde, de la volonté +5, et du courage +6.

Il est tellement rare d'entendre parler des jeux vidéo de cette manière dans un média grand public qu'il paraissait important de saluer ce billet d'humeur.

Il est par ailleurs important de souligner que ce rappel des vérités au sujet des jeux vidéo est l'oeuvre d'une chanteuse totalement détachée des intérêts de France Inter. Ce cas particulier permet donc de rappeler que si les médias généralistes se plaisent à dire du mal des jeux vidéo, c'est d'une part parce qu'ils ne les connaissent pas, mais aussi parce qu'ils ont peur de la concurrence qu'ils représentent.

Lorsque vous jouez aux jeux vidéo, vous ne regardez par la télévision et n'écoutez pas la radio. C'est aussi simple que ça.