L'an dernier, Compile Heart a créé un label spécial appelé Galapagos RPG destiné, je cite, «aux vrais fans de RPG japonais». En grand fan du genre, ma curiosité fut piquée au vif et je me suis donc plongé dans ce curieux mélange entre JRPG classique et JRPG fan-service.

Fang, un type paresseux qui ne pense qu'à dormir et à manger, se voit devenir Fencer malgré lui après être tombé sur Alyn, fée de son état. Bon an, mal an, Fang se met à son nouveau métier et part collecter des «Furies», cartes magiques qui permettent de réveiller un des dieux originels, maintenant scellés et endormis. Le tout sous le regard inquiétant de la multinationale Dolpha, sorte de Shinra dirigée par un homme avide de pouvoir et 4 Fencers d'exception. Si le cadre de l'histoire se veut classique, la pratique est plus proche de Hyperdimension Neptune que de Final Fantasy. Comprenez par là que Fairy Fencer F (FFF) se place davantage sur le plan de l'humour et de fan-service que sur un éventuel caractère épique. Si la volonté de faire ressortir ce dernier est indéniable, le jeu ne se donne pas les moyens d'être épique : les écrans fixes et les dialogues entre modèles 2D ne permettent pas cela, et de toute manière l'histoire n'est pas assez surprenante, ni suffisamment fouillée. Le jeu est par ailleurs plutôt court comparé à la moyenne des JRPGs (30-40h en ligne droite, un peu plus en fouillant).

Si FFF rate d'emblée sa vocation auto-proclamée de «vrai JRPG», il réutilise avec brio l'héritage de Hyperdimension Neptune, à savoir un humour défiant toute concurrence et un character design très prononcé. A l'occasion de ce nouveau label, l'équipe de développement a brisé toutes les digues de la bizarrerie : entre Tiara la Tsundere masochiste, Harler la scientifique folle incapable d'enfiler son pantalon le matin et surtout Pinpin la créature verte inconnue qui a une épée plantée dans la tête, l'humour bête est de rigueur mais il est délicieux. Tout cela ne serait évidemment pas complet sans quelques images & animations un peu sulfureuses : même si elles ne sont ni très nombreuses ni très inventives, elles sont au rendez-vous.

Quid de Nobuo Uematsu et Yoshitaka Amano alors? Les deux artistes stars de Final Fantasy ont pris part à FFF pour lui donner une aura de JRPG classique. Autant le dire tout de suite, Tsunako (illustratrice de Hyperdimension Neptune) et Amano, ça se marie pas bien. C'est un peu comme si vous mettiez les personnages de Neptunia dans Final Fantasy IX : c'est contre-nature, c'est bizarre, mais ce télescopage des cultures à quand même au final quelque chose de fascinant. Amano ne fait que le concept art (càd juste essentiellement l'Esprit du Mal et la Déesse) mais cela donne un changement d'atmosphère vraiment sympa. Uematsu a une influence sensiblement plus grande et donne à FFF une OST d'exception, une des meilleures qui soient parvenues à mes oreilles au cours de ces dernières années. Les orchestrations surclassent et font oublier les morceaux maladroits de Compile Heart. Bref, vous êtes prévenus, FFF est un Hyperdimension Neptune en encore plus loufoque juxtaposé avec FFIX. Personnellement, rien que pour le personnage d'Effole, assassin kawaii et taciturne, j'en ai eu pour mon argent.

Question gameplay, il y a du grain à moudre (vidéo dispo sur mon blog). Les combats sont basés sur des combos customisables et des aerials + des skills, magies classiques et transformations héritées de Hyperdimension Neptune. Tout, de vos stats jusqu'à la moindre parcelle de combo, est choisi par le joueur dans un système d'évolution assez dense. Le jeu conserve même le système de Neptune V qui permet de booster ses stats en faisant de petits défis (sauter X fois, utiliser X skills, avoir X poses de victoire, etc.). en plus de cela, les personnages vont être équipés des Furies que vous collectez au cours des quêtes. Celles-ci donnent des skills et ont des affinités élémentaires différentes (à l'instar des persos d'ailleurs). Mais en plus, vous y ajoutez des skills passifs lorsque vous enlevez un sceau dans le monde divin. C'est là toute l'ingéniosité du système puisque vous allez par cela construire et optimiser votre jeu : vous pouvez privilégier les attaques physiques/magiques, l'expérience gagnée, tel ou tel élément, tel ou tel type d'attaque, etc. Vous avez littéralement les cartes en main pour construire une stratégie qui vous est propre. Ceci est un peut ruiné par le fait que FFF est vraiment trop simple dans sa première moitié : il faut pas mal patienter avant de profiter vraiment de la richesse des skills à votre disposition et établir des plans d'attaque. Attention toutefois aux phases de plate-forme aussi inutile que pénibles, mais heureusement très rares.

Sur le plan technique, c'est clairement la douche froide. Le jeu est sensiblement en-deçà de Neptune V, ou même de Neptune Rebirth qui tourne sur PSVita! La modélisation est très insuffisante pour un jeu de 2013, mais le pire reste le framerate à couper au couteau, tellement instable qu'il fait mal à la tête. J'ai fini FFF le mois dernier, cela n'avait toujours pas été patché.

Fairy Fencer F n'a pas les moyens de son ambition, il ne peut dépasser son statut de jeu de niche. Il n'éclipsera pas Hyperdimension Neptune, dont il reste une alternative appréciable, bien qu'imparfaite.