ors d'un court échange sur mon précédent billet, AdaMenthe a rappelé avec justesse que la définition de "jeu de course simulation" n'est pas vraiment fixée et que chacun aura sa vision de la chose. Et effectivement, à l'approche de la sortie de GT 6 et Forza 5, on lit de plus en plus sur les forums des avis divergents sur la classification à donner à ces jeux. Certains trouvent que GT est le summum en terme de physique toutes plateformes confondues, à l'autre extrême on place le titre au rayon arcade et bien entendu on a les modérés pour qui le titre est un savant mélange d'arcade et de simu. Même pour la presse, ce n'est pas simple. À titre d'exemple, JVC parle de « la simulation auto de référence sur console » pour FM4 alors que Gameblog parle « d'un résultat quasi parfait dans le compromis arcade/simu. » Toutes ces divergences de point de vue m'ont amenée à m'interroger sur ce qu'est, POUR MOI, une simu.

Question de point de vue

Avant de rentrer dans les détails, je pense qu'il serait bon d'expliquer ce qu'on entend par simulation. J'ai donc sorti mon Petit Larousse illustré de 2004 (le gros machin avec des pages qu'on doit tourner avec des mots dedans et qui n'a pas servi depuis... 2004) et cherché « simuler » : « 1. Faire paraitre comme réelle une chose qui ne l'est pas. 2. Opérer une simulation. » Simulation qui donne : « Représentation par un modèle physique ou mathématique d'un phénomène complexe, du comportement d'un appareil ou de l'évolution d'un système à des fins d'étude, de mesure ou d'essai. »
Avec ces deux définitions, on tient là le noeud du problème. Si on les applique au jeu vidéo, avec la première on se contente de donner l'illusion d'une reproduction fidèle sans pour autant obtenir une copie parfaite. On travaille plus sur l'ambiance, l'immersion. Alors qu'avec la seconde, on a une approche cartésienne où l'on va surtout chercher à être le plus proche possible de la réalité physique et mathématique sans vraiment se soucier du ressenti.
En parcourant les forums, on sent bien que c'est à ce niveau là que les avis divergent. Certains joueurs vont vouloir avoir une conduite la plus réaliste possible et pouvoir sentir la moindre petite bosse sur la piste tandis que d'autres vont vouloir se plonger dans l'ambiance d'un week-end de course dans le cockpit de leur bolide ultra détaillé en écoutant le son des moteurs se mêler aux cris de la foule dans les gradins (ouais je sais, aucun jeu ne fait ça, mais ça serait super classe !).
 
Pour autant, ces deux approches sont elles incompatibles ? Clairement pas. Prenons mon cas par exemple. Je ne considère pas la série des F1 201x comme une simulation. Pourtant, niveau ambiance, j'ai rarement vu mieux. Tout y est ! Des essais du vendredi aux qualif's, la réglementation, la stratégie avec les pits-stops, le marché des transferts, l'IA pas trop stupide, ect, ect. On est en plein dans la première définition, c'est une simu. Cependant, quand on prend le volant, on se rend vite compte que toutes les voitures se conduisent de la même façon, que les réglages n'influent pas de manière "palpable" sur le comportement de la voiture, que l'usure des pneus est superficielle tout comme la gestion des dégâtss et j'en passe et des meilleurs. Tous ces petits détails me cassent l'immersion et me rappellent que je suis dans un jeu vidéo. Du coup, on va plus chercher à passer une difficulté en exploitant le gameplay comme dans un bon vieux jeu plutôt que de perfectionner son pilotage et ses réglages.

L'importance de l'embrayage dans Forza 4

À l'inverse, je ne considère pas Forza comme une simulation. Pourtant, la physique des véhicules est plus que convaincante : chaque type de transmission se pilote différemment, on sent les transferts de masse, chaque voiture à son propre comportement et évolue avec les réglages, le retour de force est top, etc... Une physique de ce type me convient parfaitement. Il faut dire que je n'ai jamais rien conduit de plus puissant que le Volvo XC60 paternel ; et en ville. Je n'ai donc pas de point de comparaison et ce que Forza fournit comme sensation est suffisant pour y croire.
Si l'on ne considère que la seconde définition, on pourrait dire que Forza est une simulation. Sauf que, à l'instar des F1 201x, Forza nous rappel qu'il reste un jeu. Il détruit le travail fait sur la physique en amenant des subtilités de gameplay pur au coeur du pilotage qui gâchent et ruinent la crédibilité du titre. Ainsi, utiliser une aide à la conduite aura un impact négatif sur le chrono même quand la voiture utilisée est équipée de cette aide. Ainsi, les protos du Mans qui ont un contrôle traction IRL seront moins performants dans le jeu si l'on utilise le TCS. Pire, utiliser l'embrayage automatique (pas la boite, juste l'embrayage), même sur des GTs, sera particulièrement pénalisant à l'accélération. À cela on pourrait ajouter la gestion des dégâts et des consommations, l'ia, tout ça, tout ça, mais c'est pas le but, vous avez compris mon point de vue.
 

L'accélérateur c'est quelle pédale ? La gâchette droite...

 
J'aurai peut-être dû commencer par là, mais une simulation de course ça se joue au volant. D'ailleurs pour certains, le principal critère pour définir un jeu est le périphérique pour lequel le jeu est développé en premier lieu. J'avoue que je ne comprenais pas vraiment ce point de vue. Du moment que le jeu était jouable aussi bien à la manette qu'au volant, quel est le problème ? Et bien, imaginez un jeu de combat 3D optimisé clavier/souris. On perd la main droite qui est dédiée à la de gestion la caméra avec la souris et on se garde la main gauche pour les déplacements ET les combos. Ça risque de manquer de profondeur et de fluidité comme jeu non ? C'est un peu pareil pour un jeu de course. Un jeu pensé avant tout pour la manette, va manquer de précision au niveau de la direction et du couple accélérateur/frein, zapper l'embrayage le plus souvent et le retour de force au volant ne sera pas forcement crédible. C'est peut-être catégorique, mais pour moi il est clair qu'on ne peut prétendre jouer à une simu à la manette et, par conséquent, il faut que la simu en question soit le plus possible optimisée pour le volant, car c'est l'un si ce n'est le facteur d'immersion le plus important.
Mais comme t'es trop un noob !

 
I recall Henrik Roos (my co head at SimBin) constantly telling me that when he drove the real FIA GT cars they were very comfortable on and over the limit - in a way that we didn't capture with GTR and even with GTR2. He told me GTR2 was too unforgiving and that these cars can be drifted comfortably. We failed to deliver that ease on the limit partly due to limitations (and what we later found to be a bug) in the ISI tyre physics code that caused the grip to 'fall off a cliff' at the limits.

Ian Bell, fondateur de Slightly Mad Studios

Enfin, un argument que je retrouve souvent sur les forums, mais que je ne comprends pas du tout. Chez certains "hardcore" sim-racers (pour pas dire hipstesr) une simulation se doit d'être difficile, en fait plus c'est dur plus c'est simu. Ainsi, iRacing a été élevé au rang de simulation ultime dès ces débuts par ces joueurs pendant que d'autres l'appelaient iceRacing tant le grip était difficile à trouver. Ce sont ces mêmes joueurs qui ont critiqué GTR 2, car beaucoup moins  difficile que le premier. Personnellement, je ne me retrouve pas du tout dans cette manière de voir les choses. Je ne vois pas l'intérêt de devoir passer des heures et des heures pour faire avancer une voiture convenablement alors qu'il ne faut pas autant d'efforts IRL. En plus de décourager les moins avertis et de refermer la communauté sur elle-même, c'est complètement irréaliste. Malheureusement, je ne retrouve plus la source, mais un pilote de course confirmé expliquait qu'en réalité les voitures de course sont extrêmement simples à  conduire. Là où c'est difficile, c'est de rouler à la limite à plus de 200km/h au milieu de la forêt du Nurburgring en cherchant le moyen d'aller encore plus vite. Prenons par exemple la série des Trial. Le fun est immédiat, il y a trois touches à connaitre et roule ma poule. Par contre, si l'on veux aller chercher toutes les médailles, il va falloir commencer à s'entrainer et à aller chercher des subtilités dans le gameplay jusque-là insoupçonnés. « Easy to learn, difficult to master »voilà à quoi devrait aspirer n'importe qu'elle simulation. Ce n'est pas la difficulté mais la courbe de progression qui compte dans une simu.
 
La simulation parfaite n'existera probablement jamais. En tout cas pas tant que le clivage entre ceux qui recherchent une simulation de course et ceux qui veulent une simulation de conduite de voiture existe. Finalement, je vais continuer de chercher le jeu qui correspondra le plus à l'idée que je me fais de la simulation. Qui sait, ça sera peut-être Project C.A.R.S ?