Entre deux vide-greniers, Masahiko666 s'est fait une spécialité en revenant sur les multiples casseroles qui ternissent l'image bon enfant du rétrogaming. L'une d'entre elles tombée entre ses mains rageuses s'appelle M6 Turbo Racing, un jeu de course 3D réalisé en 1997 sur PSone par le studio de développement Eutechnyx.
 
Victime de l'appétit démesuré de l'éditeur Infogrames, le studio britannique est alors immédiatement consigné à "réaliser notre premier vrai jeu de course, mais pas seulement. C'est aussi celui en faveur duquel nous avons inauguré notre premier moteur 3D", s'exclame Ashley Westgate d'Eutechnyx au micro d'un journaliste de VG247.com. La montée en compétence de ce studio est ainsi instantanée, façonnant "notre spécialisation dans les jeux de course [...] c'est le point de départ d'une reconnaissance internationale de notre leadership dans ce créneau", s'emporte le programmeur.
 
L'entrée en lice de la PlayStation signait la mise en place de nouveaux process : "cette console était beaucoup plus puissante que les formats précédents ce qui nous a permis d'opter pour le segment simulation tout en proposant des effets graphiques poussés". Cette puissance disponible a toutefois trouvé ses limites : "maintenir une fluidité de l'animation en préservant ces deux exigences qualitatives devenait extrêmement délicat". Bidouilleurs dans l'âme, les programmeurs ont donc expertisé les retranchements jusqu'ici jalousement tenus secrets par Sony afin de dégager les dernières ressources disponibles de la PSone : "nous devions utiliser le reverse engineering pour atteindre cette performance" refusée.
 
"Ca été programmé avec les pieds" dixit Masahiko
 
En effet, le numéro un mondial dévoilait par étapes l'ensemble des capacités de sa console aux développeurs. Une pratique connue et toujours en vigueur de nos jours. Celle-ci est motivée pour des raisons de planification. La courbe d'apprentissage d'une console est ainsi maîtrisée, la montée en gamme des développeurs est collective et non discriminante, la progression qualitative des jeux est constante. Les ingénieurs des constructeurs ont également plus de temps pour améliorer les outils de développement (kit, middleware...) mis à la disposition des éditeurs. Il arrive parfois qu'un fabricant avantage ses propres studios en leur fournissant en avant-première les dernières innovations. Ce genre d'initiative agit comme levier, les louanges des médias en faveur des titres clinquants forcent les éditeurs à sauter le pas. Fin de l'aparté.
 
Avec Gran Turismo et Toca, M6 Turbo Racing était le seul à utiliser cette fonctionnalité. Cependant, le rouleau compresseur marketing employé par Sony pour le lancement de sa simulation automobile a écrasé la concurrence. Le jeu d'Eutechnyx a été éclipsé : "nous n'avions pas connaissance des produits de la concurrence. Il eut été plus judicieux de le commercialiser quelques mois plus tôt" concède A. Westgate. Mais le marketing ne fait pas tout. La profondeur de jeu de GT n'avait pas d'équivalent sur le marché console. En dépit du discours officiel, le créneau arcade dans lequel se rangeait M6 Turbo Racing n'a pas supporté la comparaison : "nous avions développé le moteur du jeu dans l'esprit d'une simulation, néanmoins nous avions ajouté une touche arcade afin de le rendre accessible à tous." Le titre du studio britannique se défendait bien sur un point selon le technicien : "à cette époque nous avions programmé une IA calquant le comportement routier des joueurs plutôt que de céder à la faciliter en trichant". A-t-il Ridge Racer en tête ?
 
Aucune suite ne sera planifiée par l'éditeur Infogrames. En revanche, le moteur graphique sera repris pour les besoins de C3 Racing, sorti en 1999 sur PSone.
 
 
Le studio de création s'occupe comme hier du développement de jeux de course sous licence (Nascar) en plus de s'offrir des sorties de route mémorables comme avec Ride To Hell Retribution qui a fait l'unanimité contre lui il y a quelques mois seulement.