En marge du flot de hype qui entoure depuis son annonce la sortie de ce 7e épisode de la saga Star Wars, c'est totalement inhibé de toute attente (et espérance avouons-le) que je suis allé constater ce que Disney avait bien pu faire d'une trilogie absolument culte. En effet, si les épisodes IV, V et VI ont su prodigieusement exciter l'imaginaire de l'enfant que j'étais, l'adulte que je suis devenu a toujours gardé un attachement tout particulier à cet univers intergalactique captivant au sein duquel une alliance de rebelles triomphent d'un puissant Empire despotique.

Puis vint la rupture avec cette prélogie chapeautée au début des années 2000 par George Lucas qui, si elle ne manque pas de densifier considérablement le contexte géopolitique qui mena à l'émergence de l'Empire et de mettre en scène la déchéance psychologique du personnage qui deviendra Dark Vador, m'a laissé en froid avec la saga (malgré un petit soubresaut sur l'épisode 3) ! La faute à une extension de l'univers qui ne m'intéressait pas du tout (le thème de la chute d'une démocratie m'indiffère dans une fiction) et à une esthétique sans substance feat prix de gros sur les fonds verts (images SURchargées par d'innombrables effets numériques inutiles). Bref, certains ont su apprécier pour des raisons légitimes, mais ce n'est pas mon cas (je ne veux froisser personne ni susciter le débat, c'est purement subjectif !).

Très succinctement donc et sans prétention aucune, voici un compte-rendu pêle-mêle de ce que j'ai pensé de ce nouvel épisode. ATTENTION, ça va SPOILER sévère !

LES TRUCS COOL

-Esthétiquement, le film est une VRAIE réussite. Au revoir l'image numérique immatérielle de la prélogie tarabiscotée par plus de détails qu'il n'en faut, place aux somptueux décors en prise de vue réelle, aux maquettes qui transpirent la classe, aux poils synthétiques et au latex. Ces matériaux en tous genres dotent l'image d'un contenu, d'une consistance, d'une essence et parviennent à donner vie à des vaisseaux/robots/créatures amusants et convaincants.

-Le côté fan-service assumé est réjouissant. Qu'il s'agisse du retour des vaisseaux emblématiques ou de certains personnages, des références, clins d'oeil, citations et autres joyeusetés, j'ai trouvé qu'un équilibre avait été trouvé pour ne pas gaver le spectateur lambda et caresser dans le sens du poil le fan de la première heure. Mention toute spéciale à la géniale apparition à l'écran du Faucon Millénium : parfaitement légitimée par le scénario, maligne dans sa mise en scène et agrémentée d'une touche d'humour qui fonctionne !

-Le rythme est soutenu et privilégie l'action : on ne s'ennuie pas et on passe un moment de divertissement grand spectacle agréable.

-Le personnage de Rey, forte et indépendante, est incarnée par une Daisy Ridley radieuse qui n'a pas trop à souffrir de la comparaison avec un Harrison Ford qui crève littéralement l'écran. De plus, je pensais que Han Solo ne ferait qu'un petit coucou dans une scène fan-service, nope, il est un des personnages principaux du film, et ça c'est cool ! (Par contre, pas très respectueux la façon dont la mort du personnage est totalement expédiée puis balayée d'un revers de quelques mugissements et changements de plan...).

LES TRUCS PAS COOL

-Impossible de ne pas se sentir frustré face au manque de contextualisation des enjeux politiques de cet univers étendu. Moi, chronologiquement, j'ai quitté Star Wars à la fin du Retour du Jedi avec la chute de l'Empire et la victoire des Rebelles, je ne comprends pas comment en 30 ans, on a pu retomber sur un univers semblablement régi par un simpliste découpage dichotomique Premier Ordre despotique / Résistance. Bon soit, peut-être que les lecteurs des romans peuvent m'apporter des éclairages, mais en tant qu'objet cinématographique, ça manque terriblement de liant avec l'épisode VI.

-Au niveau du scénario, dés le début, on se rend compte que ce qui motive TOUTES les péripéties de cet épisode est aussi faible qu'incohérent (c'est le pire !). Tout repose sur ce prétexte : "retrouver Luke Skywalker". Alors, je n'ai rien contre les scénarios prétextes, bien au contraire, mais on a affaire ici à un postulat absolument inconsistant voire même contre-productif. Luke Skywalker est mystifié à travers quelques dialogues du films, mais ce scénario stupide le démystifie aussitôt. Car Luke n'est manifestement rien autre qu'un personnage qui a lâchement abandonné ses camarades et quitté la Résistance suite à un échec personnel dont il n'assume AUCUNEMENT les conséquences (en gros, il enseigne la Force à son neveu mais crée un monstre soumis au côté obscur capable des pires exactions en tant que commandant de l'armée du nouvel Empire... mais bwarf, il s'enfuit sans assumer ses actes pour vivre une paisible vie d'ermite, tout en veillant à dissimuler une carte pour que n'importe qui puisse le retrouver, sinon, ça ne serait pas marrant héhé !).

-La structure du film est bien trop semblable à celle de l'épisode 4. Je n'ai rien contre les hommages, mais là, on penserait presque avoir affaire à un remake qui se déroulerait dans un univers parallèle tant les similitudes sont nombreuses. Résultat, le film ne surprend jamais et se contente de nous refourguer les mêmes structures narratives et de recycler des enjeux dramatiques déjà maintes fois éprouvés. Le droïde qui contient une information capitale qu'il faut protéger (carte qui mène à Luke dans BB8 / plan de l'étoile noire dans R2D2), quitter une planète surveillée (Jakku / Tatooine), la mission d'infiltration dans la nouvelle Etoile Noire pour permettre un assaut aérien sous-tendue par la menace d'un compte à rebours avant annihilation etc. etc. etc.

-Je décèle également un problème extrêmement gênant à mes yeux qui, combiné à toutes les incohérences que j'ai citées plus haut, casse totalement ma "suspension consentie de l'incrédulité" : la fulgurante progression du niveau de Rey. L'histoire nous apprend très clairement que Kylo Ren, le nouveau méchant de service réminiscent de Dark Vador, a été formé par Luke avant de passer du côté obscur et d'être pris sous l'égide du Leader Suprême Snoke. Propulsé aux commandes de l'armée du Premier Ordre, il parait évident que ce personnage doit quand même avoir une certaine maitrise de la Force et du maniement du sabre laser. Ouhaip, bin je suis complètement sorti du film quand Rey ramasse le sabre de Luke et lui met tranquillement la misère.

-Déjà que les excès de colère puérils de Kylo Ren ont entaché à mes yeux ma perception de ce bad guy, son incompétence à manier le sabre face à deux bleusailles qui n'ont jamais manipulé de leur vie l'arme des Jedi m'a achevé. Je garde tout de même une étincelle d'espoir en attendant de voir comment cela va être traité par la suite car l'idée d'un méchant instable psychologiquement et somme toute assez faible qui ne serait qu'une ombre de Dark Vador peut être un contre-pied intéressant. Ne parlons pas du général HUX totalement dépourvu de charisme et ce n'est pas sa défection aux premiers signes de défaite qui améliore son cas. Et évitons de citer le plus grand BUG de ce film : le Leader Suprême totalement parachuté dans le film en tant que tel. 

-La transition est parfaite pour parler de quelques effets numériques qui tranchent radicalement avec l'esthétique générale. L'une des qualités du film est sa plastique qui fait honneur à un corps de métier qui hélas disparait lentement depuis l'hégémonie du numérique : cet artisanat du cinéma qui dote le film d'une consistance visuelle (accessoiristes, maquettistes, couturiers etc.). Eh bien ce Leader Suprême de synthèse est d'une laideur sans nom (en plus de récurer dans tous les poncifs de la figure de l'extra-terrestre mauvais) brise littéralement l'harmonie visuelle faite de matières. Citons également la sage du repère de la Résistance, Maz Kanata, qui semble sortir d'une scène cinématique de jeu vidéo. Bref, deux fautes de goût, deux choix étranges et un directeur artistique pas fichu de garder une ligne directrice noble et louable !

-Enfin, si l'action rythmée du film nous fait passer un bon moment de divertissement, quel dommage que le film ne prenne jamais le temps de se poser pour instaurer des ambiances et des atmosphères posées (quelques tentatives embryonnaires, vaguement, au début). Si Star Wars épisodes IV, V et VI sont si cultes (tout du moins à mes yeux), c'est en grande partie grâce à leur multitude d'ambiances marquantes et ce savant dosage entre action, dialogues et plans contemplatifs.

Voilà pour mes impressions, certes très subjectives mais j'ai pris le temps d'étayer chacun des points abordés. N'hésitez pas à me contredire et à contre argumenter, je me ferai un plaisir de vous lire et vous répondre ! En attendant, malgré ses grosses lacunes en terme d'écriture, de scénario, d'extension de l'univers, d'approfondissement de la mythologie, d'ambiances et de cohérence, BREF, son échec cuisant à faire simplement suite à l'épisode VI, le film n'en reste pas moins efficace comme pur produit de divertissement calibré.