La sortie de la 3DS a remis au goût du jour la question de la dangerosité de la 3D relief. Qu'elle soit utilisée pour les films, les jeux et maintenant grâce à un écran à filtre de parallaxe (ce blog est dans la 3DS, classe non?). Mais qu'en pensent les ophtalmologues ?

Article publié initialement en avril 2011. Republié ici en raison de la récente actualité

 

Vous avez peut être déjà entendu en discussion de comptoir, ou au coin de salon de discussion (au choix), quelqu'un se plaindre qu'un système 3D lui ait donné la nausée. Le succès d'Avatar a généré un certain nombre de ces discussions. « Et puis ma chère Lucette, je suis pas bien sûr que la 3D ça détraque pas les yeux, fatigué que j'ai été après le film ! ». Dans le monde du gaming, on se souvient aussi du cuisant échec (pas forcément justifié d'ailleurs) du Virtual Boy. Le point intéressant, c'est que cet échec fut en partie du aux avertissements légaux qui étaient mentionnés avec ce tout nouveau matériel. Il y en avait une page entière et avant même qu'il fut commercialisé en masse on se méfiait des risques que son utilisation pouvait engendrer. Le même phénomène se reproduit en partie avec la 3DS. L'avertissement, qui spécifie qu'il ne faut pas l'utiliser en dessous de l'âge de 7 ans peut faire penser qu'il y a danger potentiel et a suscité bien des commentaires, aussi bien de la part des médias généralistes que des spécialistes.

 

Avant d'aller voir plus loin (quel humour...), il faut rappeler la base de la vision stéréoscopique. C'est parce que notre cerveau va recevoir deux informations différentes qu'il va pouvoir former une image 3D de ce qui l'entoure. Il faut deux points de vue pour une même scène. L'écartement des yeux n'étant pas identique chez Tartampion et Trublion, ils ne vont pas percevoir tout à fait de la même manière la 3D. C'est aussi ce qui explique que Nintendo ait eu la sagesse de proposer une molette de réglage de l'effet 3D. Il s'agit en fait de régler le masque parallaxe pour qu'il soit parfaitement adapté à l'écartement de vos yeux.

 

On dit également ça et là qu'une personne sur 10 pourrait ne pas percevoir la 3D relief. C'est vrai pour les dispositifs artificiels qui cherchent à donner du relief. Mais pourquoi alors ces personnes perçoivent les reliefs dans la vie de tous les jours ? Parce qu'en activité normale, la tête bouge et les yeux également (et sans arrêt, ils ne sont pas fixés sur un point) ce qui modifie la perspective. En alliant à cela d'autres subtilités comme la netteté (les objets éloignés sont moins nets) et les variations de couleur on reconstitue le relief. Pour illustrer le principe du mouvement qui crée le relief, vous pouvez essayer les gif animées en relief. Je vous donne un petit exemple ci-dessous, vous pouvez en voir d'autres ici.

 

Mais alors, comment savoir si on peut acheter la 3DS et profiter de sa 3D ? Simple, il suffit de lire Parallaxe (sans la barrière qui va avec).

 

Avec le petit test ci-dessous, vous pouvez facilement savoir si votre perception 3D est optimale.

 

Centrez vous sur l'œil de l'image ci-dessous.
Regardez cet œil attentivement (faites le point dessus)
Placez votre pouce à peu près à mi-distance entre l'écran et votre nez tout en continuant à regarder l'œil
Vous devriez maintenant voir deux pouces de part et d'autre de l'œil (il faut parfois bouger un peu le pouce de gauche à droite)
Maintenant, regardez votre pouce. Ce sont les deux yeux qui sont de part et d'autre de votre pouce

Vous êtes prêt pour l'expérience 3D de la 3DS !

 

Dans le cas contraire, vous faites peut être partie des 10% qui ne perçoivent pas correctement la 3D relief et si vous n'avez vraiment pas de chance, découvrir que vous êtes amblyope. Cette pathologie, curable dans la plupart des cas, résulte de l'incapacité d'un des deux yeux à transmettre une information valide au cerveau. Les causes peuvent en être multiples et vous en avez peut être déjà entendu parler comme d'un « œil paresseux ». Ce qui fait moins peur que de dire qu'on est amblyope...

 

A l'inverse, vous pouvez également être porteur d'un strabisme qui engendre des risques différents avec l'utilisation de la 3D relief. Le mécanisme de reconstitution de la 3D par le cerveau est ici également concerné. Le risque serait non pas d'ignorer une des deux images, mais au contraire de les superposer sans les reconstituer. La personne qui louche et a compensé ce "défaut" pourrait alors voir double. En soirée mondaine, on appelle cela la diplopie. Le postulat de cet article est bien sûr de considérer que l'utilisateur n'est porteur d'aucune pathologie connue... Auquel cas on imagine bien que l'intéressé aurait le bon sens de consulter au préalable (vous iriez courir un marathon avec des genoux en vrac vous ?).

 

Attention, je ne dis pas que si vous ne voyez pas la 3D, vous êtes amblyope. Mais la 3DS pourrait en partie être remboursée par la sécurité sociale si elle permet de mettre en lumière un trouble de la vue curable lorsqu'il est décelé à temps. En fait, on se retrouve exactement dans la même situation que pour l'épilepsie. La 3D relief n'abîme pas les yeux au même titre que les jeux vidéos ne rendent pas épileptiques. Elle peut simplement mettre en lumière un problème, qui en situation normale est indécelable. Il est également parfaitement normal de se fatiguer à l'utilisation de la 3D, de la même manière qu'on se fatigue lors d'un effort physique inhabituel ou prolongé. L'avertissement de Nintendo concernant les jeunes enfants n'a donc d'autre but que se blinder légalement et d'appliquer le principe de précaution à l'extrême. D'ailleurs, vous avez peut être déjà vu sur mon Blog que je suis un père indigne.

 

Vous avez maintenant un bel argument pour faire acheter la 3DS à votre entourage. « On sera sûrs que nos vues sont parfaites sans aller raquer la consultations de l'ophtalmo ! »

 

A lire aussi : La 3DS est arrivée

Lire également : Les enfants et la 3D "on se sème pas la panique comme ça"

 

Sources :

Interview videogames Pockett Dr Valérie Aubert
Canard PC Hardware N8, p87 interview du Dr Jean Antoine Bertrand
Gamekult ITW 3DS, l'avis d'un ophtalmo
Le nouvel Observateur, interview du Pr Alain Pécherau