Le 21 septembre, à 9h36, Adrien Guilloteau entend sur France Info qu'un adolescent de 13 ans a brûlé trois voitures à Lyon "pour faire comme dans un jeu vidéo". C'est en effet ce qu'aurait déclaré le gamin à la police, rejetant la faute sur GTA IV, résumé à "un jeu dans lequel le joueur doit commettre le maximum d'actes illégaux", comme le reprend France Info, mais aussi Libélyon et bien entendu Morandini, et fort probablement un tas d'autres publications visiblement pleinement confiantes en cette mention expéditive de l'AFP. Il écrit aussitôt un billet qui résume bien le problème sur le très chouette blog jeux du Figaro auquel il contribue, et nous envoie un email dans la foulée (merci).

Si Maurice Fusier, le correspondant de France Info à Lyon, parle de "véritable jeu de rôles virtuel dans lequel le jeune s'est glissé sans problème apparent", affirmant que c'est bien "pour concrétiser ce qu'il a vécu sur sa console de jeu" que le pyromane a commis ce geste délictueux, à aucun moment il ne mentionne qu'il est anormal qu'un enfant de 13 ans puisse avoir joué à un jeu que le PEGI a classé "18 ans et plus". Aucun. Au lieu de cela, il préfère conclure ainsi : "L'affaire démontre que des jeunes peuvent être intoxiqués par certains jeux vidéo dans lesquels les personnages volent des voitures, braquent des banques et commettent des assassinats. Le jeu GTA4 s'est vendu à 6 millions d'exemplaires en une semaine, ce qui est plutôt inquiétant".

Mais ce qui est bien plus inquiétant, en réalité, c'est qu'au lieu de se demander pourquoi il n'y a pas plus de pyromanes inspirés par les 10,5 millions d'exemplaires de GTA IV vendus dans le monde, on préfère partir du principe que ça ne saurait tarder. Ce qui est inquiétant, c'est que les voitures qui brûlent, en France, c'est devenu plutôt banal : plus de 40 000 incendiées l'année dernière (dont 878 pour la seule nuit du 31 décembre). Mais par contre, quand on peut utiliser ça pour crucifier encore un petit coup le jeu vidéo et faire du sensationnalisme de bas étage, c'est bon à prendre. Ce qui est inquiétant, c'est de faire une confiance si aveugle en l'AFP, qui alimente tous ces journalistes ignorants du sujet, qui choisissent d'axer leurs papiers là-dessus au lieu de soulever la question de la responsabilité parentale, et des circuits de distribution qui laissent faire malgré les classifications claires. A quand les sanctions contre eux ?

Ce qui est inquiétant, encore, c'est combien à force de diaboliser le jeu vidéo sans tenir compte de tous ces autres éléments pourtant bien plus pertinents, on crée un cercle vicieux grâce auquel les délinquants mineurs de tous poils peuvent justifier leurs méfaits par une fausse excuse toute trouvée. Ce qui est inquiétant, toujours, c'est de se dire que si pour d'autres domaines plus "sérieux", les journalistes se contentent de recopier les dépêches AFP, mot pour mot, parfois avec les fautes d'orthographes (!) sans se poser de question, on doit vraiment être très mal informés au quotidien...