C'est une de mes questions fétiches en interview avec certains développeurs : "faut-il que le jeu vidéo sache parler de sexe pour devenir plus mature, ou qu'il devienne plus mature pour savoir parler de sexe ?". Ouais, elle est chiadée, hein ? C'est fait exprès. Je l'ai d'ailleurs déjà posée (quoique par tout à fait en ces termes) à Ken Levine, le directeur créatif de BioShock Infinite, et tête pensante de BioShock premier du nom (voir notre interview avec Ken Levine sur BioShock Infinite à la GamesCom 2010). Mais non content d'y avoir répondu pour nous, le voilà qui la retourne peu ou prou à VG247 face à leur question : "les jeux vidéo ont-il le droit de montrer du sexe ?", en leur répondant "devraient-ils ?". Heureusement il ne s'est pas arrêté là :

Je crois qu'il ne s'agit pas là de la question de l'interactivité. Je crois qu'il s'agit plus des gens ne comprenant pas ce que c'est. Si vous réfléchissez par exemple à la quantité, dans un jeu vidéo, de nudité... ce n'est même pas de la nudité. Ce sont des poupées sans leurs vêtements. Il y a aussi d'autres problèmes. C'est un peu ridicule dans les jeux vidéo en ce moment parce que - encore une fois - des poupées sans leurs vêtements, quoi !

C'est comme [le film] Team America Police du Monde. La scène de sexe dans Team America, par opposition à, vous voyez, la scène de sexe de Black Swan.

Il faut reconnaître qu'il n'a pas tort : du simple point de vue visuel, rares sont les jeux qui ont su traiter correctement une scène de sexe avec des personnages en 3D (ou en 2D d'ailleurs). Pour autant, on sait tous qu'il s'agit bien là d'un des plus vieux sujets du monde, et qu'il faudra bien un jour ou l'autre que le jeu vidéo sache l'aborder, autrement que par la pornographie, l'humour un peu gras, ou le ridicule.

Le fait même que ce soit sujet à controverses témoigne de la perception qu'a l'industrie que nous faisons des jouets ou que sais-je, plutôt que de s'exprimer créativement à destination d'un large panel d'audiences - y compris des adultes. Je crois qu'il y a toujours de la pudibonderie. Il y a même de la pudibonderie au sein de l'industrie elle-même. J'ai fait une interview récemment et quelqu'un me faisait remarquer : "Ken, vous utilisez beaucoup de grossièretés". Et j'ai fait "Oh, allez. On est tous des grands ici". Si je dois lâcher un Putain, je lâche un Putain. Je suis un grand garçon et c'est mon droit. C'est l'un des privilèges d'être un adulte.

Ouais \o/ ! Vazy Ken ! On s'en fout des bambins et des pudiques ! Montre-leur comment on fait des jeux pour adultes !