Street Fighter II : The World Warrior

Genre : Combat
Editeur : Capcom
Année de sortie : 1991
Support : Arcade

Le pitch de Street Fighter II : The World Warrior est limpide comme de l'eau de roche : Il s'agit d'une fable mondialiste où 8 philosophes viennent échanger des idées percutantes sur un ring en transcendant le concept du structuralisme dicté par l'anthropologue Claude Levi Strauss, et en suivant scrupuleusement les règles énoncées par le Contrat Social de Rousseau, notamment dans son chapitre traitant du Droit du Plus Fort. Les antagonistes seront amenés à matérialiser leur subjectivité radicale en échangeant généreusement des coups de tatanes et autres mandales chosiques, appelés également matérialisme dialectique par les initiés de la discipline. Les éliminations se dérouleront en deux rounds durant lesquels chacun bénéficiera de ses propres propositions proto-rhétoriques ("Shoryu-Ken", "Sonic-Boom", "Kop-kop-kop-kolopkèk"...) pour mettre K.O. son adversaire, les conditions de victoire se basant essentiellement sur la constatation manifeste d'absence d'émission de signifiants de la part du vaincu. Sponsorisé par Air France, le philosophe gagnant de la joute aura le droit de bénéficier d'un aller gratuit en avion vers le pays où séjourne son prochain concurrent dialecticien anxiogène. L'onanisme intellectuel peut ainsi s'enchainer All Around The World...

Au terme de sept victoires successives sur ses confrères, le meilleur penseur remporte l'insigne privilège de se frotter au top du top du matérialisme dialectique en les personnes de Bison, Balrog, Sagat et Vega. Ce dernier, atteint de mégalomanie aiguë et vêtu d'une tenue furieusement fascisante, constitue le logicien sophiste ultime à abattre par son nombre de concepts aériens maîtrisés et surtout, l'imprévisibilité et la vivacité de sa noèse. Pour le vaincre, vous serez donc invité à plonger dans un méticuleux processus analytique de la structure de ses combos discursifs, et d'en dégager des mécanismes logiques (voire pavlovien) dans le but d'atteindre un état émotionnel propice à l'intuition Bergsonienne. En langage plus clair : il suffira d'anticiper ses assauts répétitifs de vieux boloss scripté ! Une fois votre assaillant réduit au silence dialectique sous l'effet de votre dernière mornifle spirituelle, vous raflez finalement le titre fort convoité de métaphysicien le plus puissant de la planète ! Puis, au moment d'écraser une larme en assistant au générique de fin du jeu (à la brièveté toute soviétique), vous ne pourrez vous empêcher de cogiter intensément sur les paroles profondes du pape de la psychanalyse, je veux parler bien évidemment du truculent Sigmund Freud :

Tout comme les sentiments tendres, les sentiments hostiles sont un
signe d'attachement affectif, de même que le défi et l'obéissance
expriment le sentiment de dépendance, bien qu'avec des signes
contraires.

Et là vraiment tout est dit. Enfin, je crois... PS : Profondément déstabilisés par cette défaite dialectique, les 4 super-philosophes échangeront leurs noms dans les versions consoles, confinant à la schizophrénie collective.


Pour aiguiser efficacement sa subjectivité radicale, Ken excerce son matérialisme dialectique sur un objet inerte.