Interview de Aaron Greenberg, Directeur Marketing de Xbox Games

Comment vous sentez-vous à quelques jours du lancement de la Xbox One X ?

Eh bien pour moi, c'est très spécial. Il y a 16 ans je faisais partie de l'équipe Microsoft qui a eu cette idée folle de créer une console de jeu. Au moment de sortir la première Xbox, il s'agissait de la console la plus puissante jamais conçue, on avait ce slogan : « There's no power greater than X ». Donc pouvoir revenir 16 ans plus tard avec la console la plus puissante du monde, avec 60% de mémoire en plus et 40% de puissance de calcul en plus que n'importe quel autre système, c'est très spécial. Proposer du jeu en vraie 4K avec tant de bons jeux, c'est vraiment excitant.

Êtes-vous satisfaits des précommandes ? Des chiffres à partager peut-être ?

Oui, la demande a été très forte. On avait cette version spéciale, « Project Scorpio », qui a été épuisée en un temps record. Il y avait d'ailleurs un principe de file d'attente, y compris virtuellement. Ici en France, les précommandes ont été épuisées en 3 jours je crois. L'équipe locale m'a dit que la Xbox One X devrait être en rupture de stock avant même son lancement en France. La demande est donc très forte, on commence tout juste notre campagne média, il y a une grosse campagne marketing qui va se lancer ici en France, ainsi que dans les autres gros marchés mondiaux, et bien sûr nous avons gardé quelques infos pour la Paris Games Week, parce que c'est un marché très important pour nous.

Mais donc, vous ne pouvez pas partager quelques chiffres ?

Nous n'avons pas donné de chiffres précis, si ce n'est que nous en produisons autant que possible, et chaque modèle que nous produisons sera vendu. Donc si vous en voulez une, pour expérimenter du jeu en vraie 4K sur la console la plus puissante du monde - comme moi, j'en ai pré-commandé une ! - je vous suggère de faire pareil et j'adorerai vous affronter sur le Xbox Live.

Attendez, vous avez vraiment pré-commandé votre console ?

Oui, absolument, bien sûr ! On ne sait jamais, je voulais être sûr d'en avoir une alors... oui, oui, j'ai eu une édition Scorpio en pré-commandant. Je veux avoir plusieurs consoles à la maison, je suis plutôt un hard-code gamer.

Quels sont vos objectifs de ventes à court et long terme ?

Pour nous, c'est une opportunité non seulement pour le produit mais aussi pour la marque. Nous avons été capables de fabriquer le produit le plus premium qui soit, au prix que nous avons fixé. C'est une machine qui propose du jeu vraiment haut de gamme, de la vraie 4K, du HDR, des jeux comme Forza 7 qui tournent à 60 images/seconde, des tas de jeux qui vont profiter d'améliorations... Les joueurs n'avaient accès à ça qu'avec des PC haut de gamme. Leur donner accès à ça, dans leur salon, avec une Xbox One X, c'est vraiment le point-clef de notre démarche. L'autre point important, c'est de ne pas sacrifier la compatibilité. Nous avons construit ce système de rétrocompatibilité pour passer non seulement des jeux Xbox 360 (plus de 400 aujourd'hui), mais aussi maintenant des jeux de la première Xbox, ce qui veut dire que nous pouvons maintenant proposer des jeux de 3 générations différentes sur la même machine, tout en ajoutant gratuitement des améliorations et mises à jour pour les fans qui ont accès à la puissance de la Xbox One X.

À propos de rétrocompatibilité, vous irez jusqu'au bout pour qu'absolument tous les anciens jeux soient disponibles ?

Nous voulons avoir le plus de jeux possible. Ça a commencé parce que nous avons écouté nos fans. C'est ce qui rend Xbox si spécial, nous avons été pionniers avec le Xbox Live, nous sommes engagés auprès de notre communauté, des gens comme moi ou Phil Spencer sommes tous les jours sur Twitter à écouter nos fans. La rétrocompatibilité était le sujet qui revenait tout le temps. Techniquement, c'était impossible au lancement, mais une très bonne équipe a fini par trouver comment faire et ils ont déjà, en très peu de temps, réussi à ajouter 400 jeux. C'est à partir de ce moment que les fans ont commencé à nous demander des jeux de la première Xbox. Dans beaucoup de cas, ce n'est pas une limitation technique qui nous empêche de proposer certains jeux, mais aussi les droits et licences, quand il y a certaines musiques, voitures, personnages, etc. Nous devons toujours être sûrs d'avoir les droits, en plus de pouvoir le faire techniquement. Mais le but oui, c'est d'en avoir le plus possible.

Autant pour la première Xbox que pour la 360 ?

Eh bien c'est plus dur avec les jeux de la première Xbox. Parce qu'il faut plus remonter en arrière, et dans certains cas même les fonctions en ligne ne sont plus possibles. Cela dit, nous nous concentrons vraiment sur les jeux favoris des fans. Ninja Gaiden Black, KOTOR, Crimson Skies, Fuzion Frenzy... Nous écouterons les fans pour savoir lesquels ils veulent le plus, et je pense qu'on a déjà une bonne liste avec les 17 premiers jeux. On a même inclus Ninja Gaiden Black dans le Game Pass, il est donc gratuit pour ceux qui sont abonnés.

Les votes des joueurs sont toujours prioritaires, y compris pour les jeux de la première Xbox ?

Absolument oui, vous avez raison. Nous avons une plateforme qui permet aux joueurs de voter, de donner leur feedback, etc. On en tient compte, et cela aide d'ailleurs auprès de nos partenaires qui ont les droits de ces jeux. Beaucoup de jeux sont disponibles aujourd'hui non seulement parce que nous avons vu les votes des joueurs, mais aussi parce que nos partenaires les ont vus. Plus nous pouvons montrer cette demande des joueurs, plus ça nous aide à récupérer les droits, ce qui doit être fait en plus de surmonter les barrières techniques.

Pensez-vous malgré tout que la Xbox One X peut changer quelque chose au marché sur cette génération, notamment face à la PS4 ?

Oui. Je pense que c'est quelque chose qu'on n'a jamais vu, car nous avons complètement reconstruit cette console pour être la plus puissante et pour offrir du jeu en vraie 4K. Et nous proposons une belle gamme de jeux, avec nos studios internes et nos éditeurs tiers partenaires. Au lancement, ce sera le plus gros line-up qu'on n'a jamais eu pour une console de jeu. Il y aura énormément de jeux améliorés. Nous pensons que tout cela sera bon pour notre business, mais plus important encore nous pensons que ça offrira aux joueurs les plus exigeants, qui veulent ce qu'il y a de mieux, qui ont plusieurs consoles, des joueurs comme moi, la possibilité de jouer sur Xbox One X parce qu'ils auront des temps de chargement plus rapides, une meilleure distance d'affichage, un meilleur framerate et toutes ces choses qui sont importantes pour moi en tant que gamer, sans compromis. C'est ça que notre produit va offrir.

En termes de services, vous avez récemment lancé le Xbox Game Pass. Connaît-il beaucoup de succès ? Des chiffres à partager peut-être ?

Le Xbox Game Pass est désormais disponible partout, et franchement c'est l'offre de jeux la plus intéressante qui soit. Vous pouvez télécharger et jouer à tous ces jeux pour 9,99 euros par mois, c'est vraiment intéressant. Il y a plus de 100 jeux et d'autres vont s'ajouter à la liste. On a beaucoup appris après avec ça, et jusqu'ici nous sommes vraiment ravis des résultats. On en a fait beaucoup parler, on propose aux gens d'essayer puis de décider de s'abonner ou non. Donner accès à autant de jeux pour 10 euros par mois, c'est juste quelque chose qui n'existe nulle part ailleurs, c'est l'un des grands avantages lorsqu'on possède une Xbox One. Nous sommes très satisfaits des chiffres à ce stade, mais nous allons continuer à faire grandir notre catalogue, car nous voulons donner à nos abonnés toujours plus d'intérêt à l'offre Game Pass.

Pourriez-vous définir la stratégie de Microsoft concernant les exclusivités ?

Oui bien sûr. Nous avons des exclusivités sous différentes formes et de différentes tailles. Il y a Forza, sur lequel nous avons beaucoup investi, que nous avons fait grandir, qui est devenu la série de jeux de course la plus vendue et la mieux notée au monde, et qui est aujourd'hui un jeu vitrine pour la Xbox One X. Dans le même temps il y a eu Cuphead, qui a été fait par une petite équipe au Canada et qui est une autre superbe exclusivité pour notre programme ID. Et puis il y a aussi ce partenariat exclusif avec Player Unknown's Battlegrounds, qui sera disponible cet hiver exclusivement sur Xbox One X et Xbox One. Il y a donc beaucoup d'exclusivités, et même les jeux sortis tout au long de l'année dernière comme ReCore, Gears of War 4 ou Forza Horizon 3 profiteront de mises à jour et améliorations gratuites pour profiter des performances de la Xbox One X. Halo Wars 2, Quantum Break... on a un beau catalogue d'exclusivités. Je pense qu'on a fait un peu plus attention à ne pas dévoiler notre jeu, mais il y a beaucoup d'exclusivités sur lesquelles nous travaillons et nous serons très heureux d'en parler à nos fans quand il sera temps.

Diriez-vous que les services deviennent presque plus important que les exclusivités ?

Pour nous l'engagement est primordial. Combien de temps les gens passent-ils à jouer ? Quel intérêt tirent-ils de leurs jeux ? Combien de fois reviennent-ils y jouer ? L'idée n'est pas juste vendre quelque chose et compléter la transaction. On parle du Xbox Live, du Game Pass... tout le monde est connecté et l'engagement auprès des services et jeux est vraiment la donnée qui compte le plus pour nous. Si l'on pense stratégiquement au futur, le Game Pass est l'exemple parfait de ce qui peut changer la donne. On sait qu'aujourd'hui les gens utilisent des services d'abonnement pour les films et la musique, et ça n'existait pas pour le jeu vidéo. Donc c'était excitant d'être pionniers là-dessus, on sait qu'il faudra un peu de temps pour l'imposer, mais je pense qu'il sera intéressant pour un tas de joueurs, et ça le sera aussi pour les types de contenus qui pourraient arriver sur le Game Pass. Il y a des tonnes de possibilités. Pensez à du contenu épisodique par exemple, ou encore à de petits studios qui ne pourraient pas avoir de lumière, être compétitifs sur le marché, et qui pourraient profiter de la mise en avant du Game Pass. On a vu ça avec les films et la TV, et il y aura beaucoup de possibilités dans le jeu vidéo aussi.

Vous avez réussi à convaincre Nintendo, à travers Minecraft, de faire du jeu online cross-plateformes, mais qu'en est-il avec Sony ?

Oui bien sûr. Minecraft est l'un des jeux les plus joués au monde, sur de très nombreux appareils différents, et c'est pourquoi nous voulions réunir ces communautés. Comme vous savez, les gens achètent le jeu sur leur smartphone, sur leur console ou leur PC, jouant chacun à des éditions différentes, et l'idée de la mise à jour « better together » était donc de casser ces murs pour connecter tout le monde. Tout cela veut dire penser d'abord au joueur, dans notre stratégie et tout ce qu'on fait. C'est la direction que nous faisons prendre à notre business, c'est notre priorité, et ça marche. Le partenariat avec Nintendo a été génial. En fait ils sont situés juste à côté de chez nous, on peut rapidement aller à pied déjeuner avec nos amis de chez Nintendo, ce qui rend les choses plus faciles. Au final, ce sont le temps et la communication qui font les partenariats. De notre côté, nous parlons avec Sony. Nous voulons que ce jeu soit disponible sur autant de plateformes que possible et permettre aux joueurs et à la communauté de rester connectés. Nous devons patienter et parler avant de pouvoir vous en dire plus, mais les gens de Sony sont des gens bien, et je pense qu'avec le temps nous finirons par avoir leur soutien.

Vous pensez être proches d'un accord ?

Je ne peux le dire comme ça, disons simplement que nous allons parler et travailler avec eux, pour faire en sorte que ça se fasse facilement. Je pense qu'ils voudront attentivement tester la chose. La décision leur appartient vraiment, mais notre plateforme est ouverte et nous voulons pouvoir nous connecter avec les joueurs de Minecraft sur PlayStation. Ce serait excitant, et nous voulons travailler avec eux pour rendre la chose possible.

Pensez-vous à l'avenir faire une conférence internationale à la Paris Games Week comme Sony ?

La France est un marché très important et prioritaire pour nous. Nous avons gardé de côté des annonces importantes pour le salon. Nous avons par exemple annoncé la date de sortie de Player Unknown's Battlegrounds à la Paris Games Week. C'est génial de voir le show grandir, avec 300.000 visiteurs dans l'un des plus grands salons du monde. C'est vraiment un marché important pour nous, nous investissions beaucoup en marketing et à la TV pour soutenir Xbox en France. Après, ce qu'on fait en conférences, comme pour chaque société cela dépend des années. Sony n'en a pas fait l'année dernière, ils en refont une cette année, parfois nous faisons quelque chose à la Gamescom... Ça dépend du timing, de la stratégie, du contenu, mais la Paris Games Week a définitivement notre attention, et vous pouvez voir ici que c'était une priorité pour nous cette année.

Bon et sinon, c'est pour quand le prochain Halo ?

L'équipe de 343 est en tout cas en train de travailler dur. Dans mon rôle je passe beaucoup de temps avec les studios, je peux voir les projets dès le départ, et je peux vous dire que cette équipe a donné énormément ces derniers temps. Il y a eu le travail sur la Master Chief Collection, les mises à jour 4K pour Halo Wars 2 et Halo 5, ils sont revenus plus loin encore pour améliorer les jeux... Bon, ça c'est fait, et je peux vous dire qu'il y a désormais une grosse équipe en train de travailler sur le futur, mais je ne peux pas vraiment en dire plus. Sachez simplement qu'il y a beaucoup de choses excitantes à venir pour les fans de Halo.

Et ces choses excitantes, vous les dévoilerez à l'E3, ou pourquoi pas avant ?

Nous voyons toujours l'E3 comme le grand moment. On essaye en général de garder les surprises. Je sais en tant que gamer que j'adore regarder le show et savoir que je vais être surpris. On ne va donc pas laisser le secret s'éventer, mais attendez-vous à nouveau à un gros E3 cette année. Ce qu'il y aura là-bas, j'espère que ça vous surprendra. Je sais qu'on ne peut pas toujours offrir tout ce que tous les joueurs veulent, mais on essayera d'avoir quelques bons moments à vous offrir. On ne sait jamais. L'année dernière, des gens ont pleuré lorsqu'on a annoncé Ori, c'était dingue de voir toutes ces vidéos Youtube. J'ai passé des heures à regarder les vidéos de réactions sur Ori, c'était inattendu, comme Gareth Coker au piano. C'est ça qui rend notre industrie du jeu vidéo si spéciale, elle surprend les gens de manière inattendue.