Je ne sais pas pour vous, mais j'ai souvent, moi, le travers d'aborder un TPS avec nonchalance, en étant persuadé qu'il s'agira d'une balade de santé vu mes l33t sKillZ de gamer chevronné. Je m'imagine tranquillement planqué derrière une couverture dont on me délogera timidement, au mieux, avec une grenade, en train d'abattre un à un les couillons adverses sans éprouver la moindre difficulté à aligner les headshots. Quelles sales habitudes à prendre...

One man army ? Not so much.

Il faut dire que la plupart des shooters ne mettent pas forcément l'accent sur la capacité du joueur à viser correctement, ni une IA ennemie digne d'une attention soutenue de sa part, au niveau de difficulté moyen (celui que je choisis toujours en premier pour tester un jeu). Lorsque j'ai commencé à jouer le troisième chapitre de Max Payne 3, les gentilles personnes de Rockstar m'ont dit "alors, là, t'es en visée manuelle, hein, mais tu pourras activer l'assistance à la visée dans les options". Haha, ils sont gentils les gens de Rockstar, pour qui me prennent-ils ? Je... houlà... mais, purée, c'est qu'on me tire dessus dans tous les sens ! Y'a des snipers dans les gradins du stade qui essaient de nous allumer ! Et les types au sol, là, ils bougent à fond les cons ! Mais ? Mais ? Ma vie ne se recharge pas toute seule, en plus ! Et c'est qu'il se remplit vite du rouge de la souffrance, mon portrait / jauge de vie ! Ok, ok, amis bullet-time et tir en esquive, je compte sur vous pour me sortir de ce merdier.

Kiffer au ralenti

Pour ceux qui l'ignorent, Max Payne, c'est le shooter au bullet-time, celui-là même qui a fait porter des gabardines en simili-cuir à toute une ribambelle d'adolescents lorsqu'ils l'ont vu dans Matrix. Il est bien entendu de retour dans Max Payne 3, qui reprend par ailleurs tous les fondamentaux : vie qui se recharge à coup de painkillers à récupérer dans les niveaux, capacité à se jeter de tous les côtés, flingue à la main et au ralenti, pour esquiver les tirs adverses tout en crachant du plomb, et, bien entendu, le fameux effet en question, qui offre à Max un surcroît de talent en lui permettant de ralentir le temps pour mieux ajuster ses tirs face à la cohorte de bad guys le prenant pour cible. La jauge du bullet-time à côté du portrait en pieds symbolisant la vie du personnage, se recharge à chaque ennemi éliminé "normalement". On la déclenche d'une pression sur le bouton, et là, on se concentre pour ajuster le maximum de mecs en pleine tête avant qu'elle ne s'épuise. De ce que j'ai pu essayer sur les différentes séquences des chapitres III et IV joués, il ne faudra pas hésiter à en abuser. Les adversaires sont nombreux, agressifs, et plutôt bons tireurs. Des différences notables se font d'ailleurs sentir entre les mercenaires paramilitaires du Cracha Preto, et les racailles du Comando Sombra. Plus résistants et entraînés, les premiers évoluent avec un professionnalisme et une précaution que n'ont pas les petites-frappes dealeuses de drogue que sont les seconds. Ce qui m'amène, d'ailleurs, au contenu de ces deux chapitres.

Kidnapping, drogue, pognon, emmerdes à gogo

Or donc, nous avons retrouvé Max à Sao Paulo, flanqué de son ancien collègue Raul Passos. Celui-là même qui l'a fait quitter New York pour un job dans la sécurité au Brésil. A ce stade de l'intrigue, Max et Raul se rendent à un échange de rançon pour tenter de récupérer Fabiana Branco, la femme du magnat de l'immobilier Rodrigo Branco, kidnappée par le Comando Sombra. L'échange, qui se déroule au milieu d'un stade, tourne court alors que des hommes, encore inconnus à ce stade, mais surentraînés et équipés, s'invitent à la fête. Max se prend une balle de sniper dans le bras, et tente avec Raul de s'en sortir tout en récupérant la rançon subtilisée par le Comando Sombra et de localiser Fabiana. Il ne faudra pas longtemps au couple pour identifier les agresseurs : les mercenaires du Carcha Preto. Bien entendu, on devine que ce "simple kidnapping" ne sera que le prélude à quelque chose de bien plus important. Côté narration, Rockstar combine diverses approches ; les cinématiques, classiques, et toujours impeccablement jouées, et des effets de flashbacks à New York (avec scènes jouables), mais aussi des éléments esthétiques secondaires, comme des mots importants en surimpression ("Blasphème", "Mitrailleuses", "Tueurs"), et une enfilade de perspectives avec pause de l'image courante, apparition par la droite de l'écran d'un autre cadrage, etc. laissant l'écran divisé en bandes horizontales. Le tout sans chargements, de manière à ce qu'entrée et sortie des cinématiques ne casse jamais trop le rythme de l'action. Soutenue par des musiques relativement anxiogènes et une réalisation assez impressionnante autant graphiquement qu'en termes de physique (avec éléments destructibles et interactifs pour s'aider dans les moments difficiles) ou d'animation de Max et de ses ennemis. De même un soin tout particulier a été apporté aux raccords : d'une scène sur l'autre, Max garde le bandage de fortune de sa blessure, les trois armes qu'il trimbale sont apparentes sur les cinématiques quelles qu'elles soient (fusils, pompeux, uzis, flingues...). De même, lorsqu'il tire au pistolet, il tient son arme secondaire de l'autre main ; on est loin des TPS qui escamotent les armes du personnage à la va-vite sans se préoccuper du réalisme global. Avec leur maîtrise d'Euphoria, les développeurs de Rockstar sont parvenus à un bien beau degré de qualité en termes d'animation.

Encourageant

Bref, si Max Payne reste bien Max Payne, c'est à dire un concentré d'action très cinématique, l'exécution et le soin global semblent partis pour faire honneur à Rockstar. Les mécaniques du bullet-time, de la vie rechargée par les pain-killers et du tir en esquive sont assez simples, mais ne manquent pas de quelques subtilités, comme le tir de la dernière chance : si Max se prend un tir fatal, le jeu passe automatiquement en ralenti pour lui laisser l'opportunité de descendre son propre agresseur, et, s'il y parvient et qu'il dispose d'au moins un painkiller en stock, ce dernier sera automatiquement consommé pour permettre à Max de survivre. Le système de couverture (via le bouton croix) fonctionne aussi très bien mais il ne faudra pas compter là-dessus pour se faciliter trop la tâche : il faudra tout de même rester en mouvement la plupart du temps pour espérer progresser, dans le plus pur style run-and-gun. Les amateurs de belles images apprécieront aussi de pouvoir jouer d'un bouton avec la vitesse de ralenti des "kill cams", ces séquences signalant la mort du dernier ennemi en un ralenti stylé sur la balle qui lui aura été fatale.

Il nous reste donc à découvrir la qualité globale du scénario (tout en espérant une variété un tantinet plus présente), ainsi que le mode multijoueurs. Pour ce dernier, nous ne disposons que d'informations : d'abord que les mécaniques du solo y seront intégrées (y compris le bullet-time, donc), mais aussi que le mode Gang Wars promet des objectifs dynamiques et soutenus par des éléments narratifs. Par exemple, d'un round sur l'autre, l'objectif d'une équipe par rapport à l'autre pourra changer en fonction du round précédent, et l'ensemble, tout en reprenant des éléments du solo en termes de lieux ou de séquences, a pour objectif d'incorporer la narration personnelle de Max et de lier le multijoueur au solo en termes d'histoire. On verra tout ça plus tard... manette en mains !