En retirant la PSX de son emplacement, je ne peux m'empêcher de me remémorer le moment où cette machine fut introduite pour la première fois chez moi, ainsi que le rêve qu'elle laissait entrevoir. Je me rappelle aussi de cet engouement dans l'industrie : les gens désireux d'apparaître trendy se devaient d'en avoir une, un peu comme l'Aibo en fait - si ce n'est qu'elle servait au moins à quelque chose... Il n'était donc pas rare de trouver une PSX en position verticale dans la salle de réunion ou sur le bureau : la classe quoi.

La PSX était bien un bel objet. Du pur design Sony. C'était aussi le premier appareil de la marque à introduire le XMB (XrossMediaBar), une interface devenue standard dans le monde PlayStation d'aujourd'hui. Elle était enfin l'un des rares appareils de la marque à tenter une synergie avec la PSP : un lecteur Memory Stick permettait en effet de transférer ses enregistrements sur la portable. Mais voilà, tout comme l'Aibo, la PSX illustrait aussi les difficultés de la marque à l'époque.

Je ne vais pas m'attarder sur ces difficultés mais plutôt parler du rêve multimédia inachevé qu'elle a un temps symbolisé...

À l'époque, il apparaissait déjà évident que le monde de l'électronique allait devenir un champ de bataille sans pitié, où la technologie allait avoir un moindre impact que le coût des produits ou que l'effet "lifestyle" sur les consommateurs. Les Coréens arrivaient en force, la Chine n'était pas si loin et les standards s'imposaient dans des forums ou via de larges alliances.

Comme pour le DVD, les grandes marques de l'électronique allaient avoir de moins en moins de temps pour profiter de l'introduction d'une nouvelle technologie avant qu'elle ne soit démocratisée. La télévision LCD ou Plasma en est un autre exemple. À un niveau de spécifications égales, il était assez difficile pour un œil ou une oreille non avertis de voir la différence au delà de la marque et du design. Aussi, au final, le prix est-il devenu un gros facteur de décision.

Avoir une PlayStation miniaturisée dans une télé LCD ou un Vaio permet de créer une différence significative qui, en plus de populariser d'avantage la plate-forme, permet de pousser son produit et d'inciter à l'achat aux dépends des concurrents. La PSX était un premier pas qui entrouvrait des perspectives excitantes... mais voilà : pour réaliser une telle intégration, il fallait une révolution électronique.

À l'époque de la présentation de la PSX, je me rappelle d'un entretien avec Ken Kutaragi, qui me faisait part de sa vision digitale. Le terme "PlayStation" n'allait plus forcément désigner une console mais une technologie intégrée dans un grand nombre d'appareils, à commencer par la PSX. Pour ce faire, la partie PS2 devait être miniaturisée au maximum pour prendre place sur la carte mère des appareils hôtes et ne pas avoir un trop grand impact sur leur prix.

Et cette révolution a donc été rendue possible avec la PSX. Kutaragi me parlait du SOC (System On Chip), qui dans le cas de la PS2 prenait la désignation de "One Chip PS2". C'était en gros une PS2 réduite à la taille d'une seule puce, et cela permettait en effet de pouvoir l'intégrer dans une multitude d'appareils électroniques ou informatiques (mais aussi de nous faire des PStwo terriblement compactes, surtout placées à côté du concurrent de l'époque, la Xbox).

Mais toute révolution vient avec un coût attaché, surtout quand elle introduit des grandes premières comme la gravure du dit processeur à 90nm. Au final, l'échec commercial de la PSX n'a jamais permis à Sony d'essayer de raffiner et pousser son One Chip PS2 au delà de la PStwo, avec l'arrivée programmée de la nouvelle génération de PlayStation.

La PS3 se pose pour moi comme la descendante de la PSX. Utilisant la même interface, elle revendique à son tour une place centrale dans le living-room et le quotidien multimédia du foyer. Toutes les deux partagent un positionnement imprécis qui, suivant l'angle de considération (jeu ou serveur multimédia), souffre plus ou moins d'un prix de départ exorbitant.

Technologiquement dépassée mais toujours très populaire et pourvue d'un catalogue de jeu immense, la PS2 avait certainement encore de beaux jours devant elle en s'ouvrant de nouveaux marchés à l'étranger. Elle fut écartée pour sortir la PS3 de l'ombre. Au final, le rêve du "PlayStation Everywhere" s'est éteint avec la vente à Toshiba de l'usine où étaient produits des processeurs comme le CELL et le One Chip PS2.

Une page semble définitivement tournée. Gonflée à 750GB et aidée par Torne, ma PS3 s'impose désormais comme mon serveur multimédia. Ma PSX trône désormais sur un de mes bureaux, à la verticale comme à la belle époque. Dommage que je ne puisse pas upgrader son disque dur car elle avait encore des années de services devant elle. Seule consolation, son ADN perdure avec le XMB qui ne cesse de s'étoffer sur PS3.

Christophe Kagotani

Christophe Kagotani

Japonais ou français, comme ça l'arrange, le Kago (comme on l'appelle) est correspondant permanent pour le magazine anglais EDGE depuis pas loin de 10 ans. Il a néanmoins débuté aux mêmes fonctions dans le magazine Joypad, pour un échange de légende qui l'a ensuite emmené chez Consoles+ "tu le crois ça ?" magazine (© AHL, 1798).

Ecrivant également pour la presse locale nipponne, il a évolué vers un rôle d'analyste et d'homme à tout faire dans le monde du jeu vidéo japonais.