Aborder Profondo Rosso ou les Frissons de l'angoisse (en français) va être une tâche assez difficile. Comme quoi chroniquer un film d'Argento n'est jamais facile. Il faut reconnaître que son cinéma ne se laisse pas découvrir si facilement.

Je reconnais que j'aurai peut-être dû voir ce film avant sa Trilogie des mères. Suspiria marquant à mes yeux un réel tournant dans son style. la trilogie des mères laissant plus de place aux délires visuels d'Argento.

Les Frissons de l'angoisse s'inscrit dans la lignée de ce que l'on appelle les Giallos. Je ne rentrerai pas dans de longues explications sur les styles de Giallo etc...il y a un numéro spécial Argento qui vient de sortie chez Mad Movies et qui explique tout cela. Mais je vais quand même expliquer simplement ce que c'est. 

Le Giallo est un style de film,venant principalement d'Italie, qui mélange plusieurs styles. On retrouve donc du policier, du fantastique, de l'horreur mais aussi de l'érotisme. Mario Bava et Argento représentent ce mouvement pour beaucoup de personnes.

Profondo Rosso (je vais utiliser le titre originale vu que déjà il est mieux et qu'en plus il est moins long à écrire) est donc dans la lignée du Giallo et la rupture se fera donc dès Suspiria. Mais la question n'est pas de vous montrer en quoi Suspiria casse les codes du Giallo mais plutôt de vous raconter un peu Profondo Rosso.

Avant de commencer, j'ai vu le film en version longue avec les rajouts de scènes en Italien. La plupart des rajouts sont des  scènes dites "comiques", il vaut mieux les éviter. Elle casse l'ambiance du film et pour la plupart (désolé Mr Argento si ce n'est pas le cas) ne servent à rien.

 

Lors d'une conférence sur en gros ce que l'on peut appeler la "puissance de l'esprit", une télépathe invitée pour l'occasion, ressent qu'au sein du public un meurtrier semble s'y trouver. Peu de temps après, elle est retrouvée morte dans sa chambre. S'ensuivra une longue série de meurtre inexpliquée...

Nous allons donc suivre au cours du film, l'enquête de Marcus Daly, pianiste, tentant de découvrir qui est le véritable coupable de cette sinistre affaire. Il sera épaulé par la journaliste Gianna Brezzi, cherchant le scoop à tout prix.

Abordons pour commencer la musique. Si ma mémoire est bonne je crois que cela doit être la première collaboration de Goblin pour Argento. Si je me trompe n'hésitez pas à me le dire. Goblin signe une musique encore une fois en parfaite harmonie avec le film. Ce qui est assez incroyable avec Goblin c'est que lorsque l'on décide d'écouter leurs musiques hors-film, il est impossible de deviner qu'elles vont être utilisées pour un film de ce genre. Et pourtant lorsqu'on les entend dans le film, il est impossible de voir d'autres musiques que celles de Goblin. Elles arrivent à créer un tension dans le film mais arrive aussi à beaucoup dynamiser certains plans. Argento ayant voulu faire son film de manière un peu lente, les musiques de Goblin complètent parfaitement son style de film.


 

Même si Suspiria est un réel tournant dans le cinéma d'Argento, Profondo Rosso bénéficie tout de même de la stylisation du maître. On observe quand même des similitudes, moins exagéré que dans Suspiria mais il y en a quand même. Il suffit de s'intéresser aux meurtres. Argento stylisera chacun des meurtres, ils seront violents mais en même temps il s'en dégagera comme seul Argento sait le faire, une certaine beauté. Je conçois que cela peut paraître étrange de dire cela mais je vous assure que dans chacun des meurtres du film, nous pouvons observer une mise avant esthétique de celui-ci. Il suffit de regarder le tout premier meurtre contre la glace ou alors la séquence d'introduction montrant un meurtre par un jeu d'ombre.

C'est en cela que je n'aime pas la version longue, elle casse toutes les séquences. Alors que la tension est à son comble, l'image se coupe et l'on voit nos deux héros se raconter une blague. JE vous assure que ça casse un peu l'enthousiasme. Il est ainsi difficile avec cette version de vraiment juger l'oeuvre car elle est entachée par ces scènes. Mais bon ça ne rend pas non plus le film d'Argento mauvais et n'en fait pas un mauvais Agatha Christie comme certains ont pu le dire...

 

 

Profondo Rosso s'inscrit aussi dans la lignée du whodunit, ou si vous préférez le Who done it ? En français cela donnerait grossièrement "qui l'a fait ?". En effet durant tout le film alors que l'on suit l'enquête de Marcus pour retrouver le meurtrier, nous avons toujours une longueur d'avance sur lui. Mais avant de voir ça, je vais expliquer le whodunit. C'est un procédé, que l'on peut voir dans les films ou dans les romans qui permet aux lecteurs ou spectateurs de posséder plus de clés de compréhension que l'enquêteur (souvent amateur) pour pouvoir ainsi trouver la solution avant la fin. 

Voila comment va fonctionner Profondo Rosso. Marcu découvrira toujours les bons indices mais ne saura pas les exploiter comme il le devrait. En témoigne la scène du dessin sur le mur. Alors que Marcus découvre un dessin d'enfant sur un mur, dessin symbolisant le tout premier meurtre, il s'arrête pensant avoir vu l'ensemble du dessin. Le dessin en question étant un enfant tenant un poignard avec à coté un homme qui saigne. Marcus pense alors avoir trouvé que le meurtrier est cet enfant qui a grandi et qui reproduit un schéma précis. Seulement, si Marcus avait attendu, il aurait pu voir la seconde partie du dessin, apparaissant lorsqu'un bout de mur tombe. Cela permet ainsi au spectateur de comprendre mais aussi de se rendre compte que Marcus part dans une mauvaise direction.

Beaucoup de scènes fonctionnent de cette manière, l'image que Marcus pense être un tableau au tout début du film, le mort dans la maison abandonnée ou encore le doigt d'une des victimes pointant un message.

 

Argento signe encore une fois un excellent film, il ne m'a pas autant marqué que les deux opus de sa trilogie des sorcières mais cela ne l'empêche pas d'être un très bon film. On reconnait la pâte du réalisateur, un univers assez sombres, les rues de la ville sont souvent vides et sont pour la plupart assez oppressantes. S'ajoute aussi cette stylisation propre à Argento et au Giallo.