Brandie comme un épouvantail par cette nouvelle caste de petits studios de développement qui se voient plus grosse que le boeuf, cette bulle montée de toute pièce s'effondre comme un château de carte. Bons clients des médias, ils avaient beau crier de vive voix être les acteurs privilégiés d'une nouvelle ère du jeu vidéo, deux études sur le comportement d'achat des joueurs occasionnels montrent une réalité annonciatrice de désenchantement.
 
Ils n'avaient pas leur langue dans leur poche, s'attaquaient même à des bastions bien enracinés du jeu vidéo tels que Nintendo, laissant planer le doute sur sa solidité et la pertinence de son modèle économique face au raz de marée des jeux sur smartphones, tablettes et navigateurs web. Pressés d'agir par des actionnaires furieux de la chute vertigineuse de l'action du constructeur sur les plus grandes places financières (Londres, Tokyo, New York), ces derniers suggéraient l'ouverture inévitable de Nintendo à ce marché monstre considéré comme un nouvel Eldorado.
 
Il faut dire que ces petites structures désargentées et écartées du secteur des consoles de salon sont habitées par une certaine amertume. Obligées de ronger leur frein à cause d'un droit d'entrée financièrement discriminant, elles ont saisi la plus petite et fragile occasion pour se donner une dimension économique aussi large voire supérieure aux grands acteurs du marché des consoles de salon. Ils ont grandement profité de la bulle spéculative entourant les vedettes des réseaux sociaux pour absorber le trop plein de liquidités inhérente à ce genre de situation exubérante.
 
 
Mais voilà, depuis que le monde de la finance à ouvert les yeux et observé de manière rationnelle ce marché, c'est une véritable descente aux enfers que sont en train de vivre les stars déchus de ce secteur trompe l'oeil. Il apparaît en effet que l'énorme succès des jeux sur supports high tech (Rovio s'était vanté il y a peu d'avoir séduit plus d'un milliard de joueurs avec Angry Birds) masque mal un désert économique patent. Ce sont deux études rendues publiques de façon concomitante qui lèvent enfin le voile sur le comportement d'achat des joueurs occasionnels. Celle conduite et publiée par GroupeM pour la France, révèle que les joueurs opportunistes représentent plus de la moitié de ce marché (56%). Bien que cette pratique dépasse celle du jeu sur console portable, les petits studios ont toutes les peines du monde à monétiser cette activité.
 
Le joueur occasionnel profite en effet de la gratuité du jeu pré-installé sur son smartphone ou en offert en téléchargement. Cette typologie de joueur opportuniste considère cette activité uniquement comme passe-temps. Croisée avec publiée dans le même temps aux Etats-Unis, le constat est plus sévère. 85% des joueurs occasionnels ne reviennent plus sur le même jeu après 24 heures de pratique atteste le cabinet d'analyse Playnomics.
 
Le plus grand défi qui s'impose aux acteurs de ce marché, c'est leur capacité à retenir l'attention des joueurs lambda. Le cabinet américain suggère d'offrir bien plus qu'une courte session de jeu à ces joueurs curieux des univers ludiques qui leur sont proposés. A condition qu'ils ne mettent pas la main à la poche pourrait-on ajouter. Hélas, la surabondance des sessions gratuites poussent le joueur occasionnel à adopter une culture du zapping. Ils sont libres de puiser dans cette corne d'abondance sans pour autant s'engager.
 
 
Ce sont pour toutes ces raisons et bien d'autres que Nintendo reste droit dans ses bottes. Un temps redouté par la filiale américain décrivant "l'iPhone comme un concurrent inquiétant, bien plus que Microsoft et Sony" , la maison-mère rectifia très vite le tir en caractérisant ce secteur comme "sans valeur ludique". Ces fausses promesses connues de tous sauf des actionnaires et grands argentiers guidés par la spéculation à outrance sont enfin mises au jour.
 
Et comme le dit si bien Riccitiello, président exécutif d'Electronic Arts très engagé dans ce marché devenu terrain miné : "la plus grande leçon à apprendre c'est que les consommateurs ne paieront pas pour acheter de la merde."