Est-ce cela ? Est-ce de se sentir si proche de l'acteur, qu'il nous apparaît si familier ? Comment Kitano fait-il pour nous subjuguer tout en nous terrifiant ? Sommes nous attirés par ce héros qui finit toujours par tourner le dos à la vie ?

AU COMMENCEMENT

Takeshi Kitano naît le 18 janvier 1947, dernier enfant d'une famille vivant dans les bas-fonds de Tokyo. Son père, Kikujiro, est un artisan en peintures et laques diverses. Kitano décrit sa relation avec celui-ci :
"Je n'ai jamais parlé avec mon père. Quand mes frères et moi entendions ses pas, nous courrions très loin nous cacher. Je savais qu'il faisait partie des yakuza. Mais pour nourrir la famille, il était forcé de travailler comme peintre."

En 1956, la famille Kitano est la première à posséder la télévision dans leur rue, et leur maison devient un lieu de rassemblement pour tous les habitants du quartier.
"Je me souviens avoir considéré mes voisins comme une grande famille : les gens faisaient encore pousser des légumes dans les champs et se lavaient dans la rivière. Les enfants chassaient les papillons et les libellules, leurs mères passant leur temps à parler aux bains tandis que les hommes prenaient du bon temps au bar.

TWO BEATS

  En 1972, Kitano commence à travailler comme serveur dans un café. C'est dans celui-ci qu'il rencontre Kiyoshi Kaneko avec qui il crée un "manzai", un duo comique, nommé "The two beats" ("Beat" Takeshi, le surnom populaire qu'il utilise pour signer la majeure partie de ses films vient de là)

  "Après être arrivé dans ce monde médiatisé, j'ai eu affaire à la police pour une idiotie. Comme après mon accident (en 1994), j'ai cru que ma carrière était finie. Mais je suis revenu ! C'est pour cela que j'aime la notion d'éternel recommencement que je développe parfois dans mes films."

LE DEBUT DE LA LEGENDE

Takeshi est remarqué en occident grâce au film Furyo de Oshima. Dans ce film, Kitano joue un soldat japonais brutal qui sombre dans le sentimentalisme après avoir bu. Bien que jouant un second rôle, il vole la vedette à Sakamoto tant son personnage est étrange et violent. 

"Le problème, avoue moi, c'est que les gens s'attendaient à rire aux pitreries du comédien "Beat" Takeshi. Ils n'étaient pas près à me voir jouer d'autres personnages. Mon premier rôle sérieux, c'était dans "Merry Christmas, Mr. Lawrence" de Oshima (1983). C'est dans ce film que les japonais ont réalisé que je pouvais être méchant."

Après "Violent Cop", Takeshi tourne "Boiling Point" en 1990. Cette fois, il écrit le script lui-même et le co-produit avec Toshio Taniguchi. En 1991, Kitano réalise "A Scene at the Sea", film qui devient sa première collaboration avec le compositeur Joe Hisaishi. Ces deux films parlent tous les deux de perdants qui arrivent à leur fin en y croyant totalement.

Puis en 1993, Kitano réalise un de ses meilleurs films, "Sonatine".
   "Une sonate est une partition que vous jouez quand vous apprenez le piano. Je pense que c'était exactement le titre que je cherchais pour illustrer ma carrière."

Kitano revient en 1996 avec "Kids Return", un drame d'adolescents.

  Dans ce film, Takeshi Kitano devient un réalisateur engagé, montrant la faillite d'une jeunesse et d'un système éducatif sans pitié qui presse les meilleurs et rejette les plus faibles. Ainsi l'on voit évoluer des personnages désabusés n'ayant plus rien à attendre de l'existence ni de la société.

Œuvre ultime !

En 1997, Takeshi Kitano reprend encore une fois sa casquette de réalisateur. Hana-Bi parle d'un ex-flic, Nishi (Kitano), qui décide de faire visiter le Japon à sa femme qui se meurt d'une maladie incurable. Poursuivi par les yakuza et la police, Nishi fuit également la vie avec elle...

"Je voulais montrer comment un japonais prend ses responsabilités. La façon de vivre de Nishi est totalement différente de ce que l'on pourrait voir dans un autre pays. On pourrait voir en Nishi un homme complètement dépassé, romantique ou sentimental à outrance. En fait, il décharge sa compréhension du monde et ses responsabilités, conformément à un idéal désespéré."

PAUSE II

Kitano, après avoir reçu le Lion d'or à Venise pour "Hana-Bi", décide de faire une petite pause dans la réalisation et joue dans " Tokyo Eyes " du français Jean-Pierre Limosin. Une fois de plus, son apparition comme Guest star capte l'attention et bouffe l'espace.

L'ÉTÉ DE L'ENFANT ADULTE

En 1998, Kitano reprend sa caméra et tourne le merveilleux Kikujiro, un film présenté à Cannes qui prouve de manière définitive que son cinéma est de portée internationale. Ce film, resté aussi secret que le premier Starwars, est vraiment magnifique. Loin de ses oeuvres violentes, Kitano nous livre ici son film le plus lumineux et poétique.

"Après Hana-Bi, j'ai compris que mes films étaient trop stéréotypés : gangs, violence, vie & mort, etc. J'avais de plus en plus de difficulté à m'identifier à eux. Donc, j'ai voulu faire un film que personne n'attendait ! En vérité, l'histoire appartient à un genre que je ne connaissais pas. Ce scénario était un challenge pour moi, un challenge qui me permettait de rompre avec mes anciennes réalisations. Même si l'histoire semble classique et banale, j'ai réussi à y mettre toutes mes passions imaginaires et mes envies cinématographiques. Cela donne un film étrange qui porte cependant la marque Kitano. Je souhaite continuer à "trahir" les gens en leur apportant des films aussi inattendus !"

A SUIVRE... =>