Parce que grâce à la génération Millenials et à ses guerriers de la Justice Sociale, nous vivons dans un monde chaque jour un peu plus formidable, un peu plus juste, un peu moins oppressif (et si t'es pas d'accord t'as le droit de fermer ta gueule sale mâle blanc hétéro cis-genre on boit tes :maletears: t'as vu ?) ; et parce que grâce à eux, nous laissons derrière nous les millénaires de ténèbres et d'obscurantisme qui ont précédé l'ouverture de leurs comptes twitter et de leurs « donne à mon Patreon », chaque semaine, le Comte Zaroff te propose une petite revue de presse des scandales éphémères qui contribuent à rendre notre société meilleure (peut-être) et à générer du clic pour gagner les sous de la pub (ça, par contre, c'est sûr).

 

 

Alors bon, qu'on ne se fie pas aux apparences : dans l'idée, il s'agira d'un format bref (rires), fondé sur la concision (encore plus rires), mais comme c'est le premier (et sans doute dernier) post de la série, ça va s'étaler un peu dans le temps pour « planter le décor », histoire qu'on voit bien comment l'humanité va réussir en vingt ans à revenir sur plusieurs milliards d'années d'évolution laborieuse pour une poignée de likes et de retweets.

 

Juste une précision liminaire toutefois, parce que le Comte Zaroff n'a pas vocation à devenir le copain de tous les cassos de la terre non plus : si d'aventure tu es un.e connard.e sexiste.e, xénophobe.e, homophobe.e ou autre, passe ta route, passe ton chemin, passe le message à ton voisin. Les ennemis de mes ennemis ne sont pas ses potos, surtout quand ils ont contribué à les engendrer. Et de la même façon, si tu penses que tout ceux qui ne sont pas d'accord avec toi devraient être collés dans des camps « au nom d'un monde meilleur » (ou virés de leur fac, ou harcelés sur la toile), d'ailleurs. Si tu ne sais débattre qu'avec des gens qui sont d'accord avec toi, autant que tu t'épargnes de la contrariété et que tu te cantonnes à ta consanguinité cérébrale et aux séances de masturbation (intellectuelle, mais pas que) collective qui te rendent tout dur de la conscience morale (« han mais comment t'as trop raison, je pense trop comme toi ! » « non, non, que dis-tu enfin, c'est toi qui a trop trop raison, c'est moi qui pense trop trop comme toi ! » "qui, moi ? Oh non, voyons ! Que dis-tu là ? Je ne saurais l'entendre ! Tu as toujours été mon exemple !" « Un exemple, moi ? Alors que tu m’as tout appris ? Je ne saurais l’entendre ! ». Ad lib). De toute façon, dans les deux cas, tu n'es pas équipé pour suivre, alors autant retourner dans ta bulle de Bisounours à crête.

 

Sur ces bonnes paroles, on lance le jingle.

 

Générique.

 

C'est parti.

 

Alors déjà, sur l'aperçu, Force Rose est en rose. ça part très très mal, cette affaire-là !

 

 

Dans les épisodes précédents :

 

LE MONDE D'AVANT LES MILLENIALS (OBSCURITÉ, TÉNÈBRES, CHATS ET CHIENS COUCHANT ENSEMBLE T'AS VU ?)  :

 

 

- 1949 : sortie de 1984 et déjà, là, tout le monde est paumé et compte sur ses doigts. Dans cet ouvrage devenu culte, les citoyens d'un monde dystopique vivent sous le joug de l'Etat qui leur impose quoi faire, quoi dire, quoi aimer, quoi penser « pour leur propre bien et celui de tous ». Un ouvrage d'anticipation longtemps considéré comme visionnaire, à tort.

 

 

2018 : finalement, Orwell avait un peu surestimé l'Etat et un peu sous-estimé la bêtise humaine. Non pas que l'Etat n'ait pas essayé de formater les masses pour s’assurer leur plein contrôle, et surtout étouffer la contestation dans l’œuf, bien sûr, mais au fond de lui, il sait qu'il n'est pas de taille. Quand il s'est rendu compte que pour imposer une pensée unique et pour faire taire les moutons noirs, il suffisait de laisser les masses en question se censurer les unes les autres, balancer leurs coordonnées mutuelles sur la toile au moindre désaccord, se surveiller, s'afficher sur Twitter (et y afficher autrui sitôt qu'il leurs déplait), faire de la délation, tronquer les discours, tordre les raisonnements, se harceler, se menacer, s'agresser « pour la bonne cause », il a trouvé beaucoup plus reposant de se mettre sur la touche et de compter les points. Et comme on le comprend.

 

 

- 1953 : Ray Bradbury, géant de la science-fiction anglophone, publie Fahrenheit 451, autre roman maintes fois cité en exemple, dans lequel les pompiers n'éteignent plus les feux mais les allument, brûlant tous les ouvrages que l'Etat (décidément, il est sur tous les bons coups, lui) a jugé dangereux. Là encore : cruel manque de clairvoyance de la part du bonhomme.

 

 

2018 : finalement, l'Etat n'a même pas eu besoin de former des fonctionnaires ou de lancer une politique de recrutement de pompiers incendiaires. Les honnêtes citoyens se chargent bénévolement de la chasse aux sorcières. Vu les chiffres du chômage en France, on ne peut que le déplorer. Au nombre des premières œuvres fascistes aspergées de gazoline, entre toutes les productions humaines présentes, passées et à venir (parmi lesquelles on compte, quand même, les textes du Marquis de Sade et la biographie de Moundir), on compte les pamphlets propagandistes « Friends » et « The Big Bang Theory ». La lie racisto-phallocrate en tremble sur ses bases. Comment ? On ose s'en prendre à ses textes fondateurs ?

 

 

- 2015 (mais pas que) : des fondamentalistes religieux détruisent des œuvres préislamiques dans un musée à Mossoul, sous prétexte qu'elles ne sont pas compatibles avec leurs convictions idéologiques et leur conception de l'histoire. Le monde entier s'indigne et parle de "crime contre le patrimoine de l'humanité". Manuel Valls déclare qu'"une part de l'esprit humain (...) s'écroule" (s'écroule, oui, mais pas assez pour lui valoir un poste au gouvernement, faut pas déconner). En 2001, c'était des Bouddha géants en Afghanistan. En 2012, quatorze mausolées de Saints Musulmans au Mali.

 

2014 : A Paris, on expose un gigantesque plug anal gonflable place Vendôme. Là encore, le message est fort. On a beau anéantir des œuvres historiques à la valeur inestimable, les artistes ne courberont jamais l'échine, ils continueront qui, de sculpter avec son caca, qui, de passer les dessins d'autrui au filtre triangulaire. The show must go on.

 

 C'est quelque chose, quand même, l'Art.

 

LE MONDE DEPUIS LES MILLENIALS (ILLUMINATION, TRANSCENDANCE, CHŒURS ANGÉLIQUES, HOSANNA, TOUT CA) :

 

 

- 4 janvier 2018 : Twitter découvre le vrai visage d'Alexandre Astier.

 

 

Alors qu'une anonyme lambda a la GENTILLESSE de lui donner quelques conseils d'écriture, histoire de l'aider à affiner un peu son humour (quand même très "oppressif" et "homophobe", quand on y pense), le créateur de Kaamelott a la MECHANCETETÉ de lui RÉPONDRE. Pire : il ne la remercie pas pour ses réflexions éclairantes et ne s'exclame pas tout go "hé mais oui, bon sang mais c'est bien sûr, internaute inconnue et néanmoins sagace ! Comment ai-je pu ne pas m'en rendre compte plus tôt ! J'étais aveugle et maintenant, je vois ! Toutes ces décennies passées à opprimer les minorités en croyant être drôle, alors que je ne faisais que stigmatiser les faibles et les nécessiteux ! Quel connard j'ai été ! Mais grâce à toi, c'est terminé, tout ça ! Tes 140 caractères ont fait de moi un homme nouveau ! En remerciement, je te crédite en tant que co-scénariste et je te cède le rôle d'Arthur dans le film à venir ! Un Roi Arthur femme ! Rends-toi compte ! Quelle victoire ce sera pour le féminisme ! Et tiens, d'ailleurs, puisqu'on en parle... tu ne serais pas black aussi, des fois ? Maintenant que tu m’as montré la lumière, je me sens d'humeur à combattre le racisme en capitalisant sur la couleur de ta peau dis-donc !".

 

Bien au contraire : l'auteur-compositeur-scénariste-humoriste a le toupet de lui répliquer sèchement qu'il n'a pas de leçons d'écriture ou de tolérance à recevoir de la part d'une personne qui se revendique "misandre". Quelle arrogance ! Quelle étroitesse d'esprit ! Ha, ha, le masque tombe ! Monsieur Astier est du genre à répondre quand on l'interpelle (mais pour qui se prend-il ? Tout ça parce que soi-disant, c'est une star ? Mais attends ! Tous les Millenials sont des stars, leurs parents et leurs psy n'ont pas cessé de le leur répéter : "tout le monde est un génie et si ça se voit pas, c'est juste parce que la société est faite par des gens médiocres - les générations précédentes - pour des gens médiocres - les générations précédentes aussi ; et parce que les Millenials c’est juste des poissons à qui on voudrait apprendre à grimper aux arbres").

 

Monsieur Astier est même du genre à répondre publiquement quand on s'adresse à lui publiquement ! Mais que de violence, en cet homme ! Doit-il détester le beau sexe, pour en venir à de pareilles extrémités ! Et en même temps, que pouvait-on attendre d'un mâle hétéro blanc cis-genre pour qui les femmes sont soit des gourdes (Guenièvre), soit des harpies (toutes les autres) ? Heureusement, Twitter veille. Si l'on peut déplorer que des mufles aient pris la défense de l'intéressé (normal. Celui-ci leur a livré la malheureuse en pâture ! Sic), ils sont également nombreux à le condamner pour son acte d'une violence morale inouïe. Il faut dire aussi que quand on a passé vingt ans sans qu'une seule personne n'ose nous dire "non", ou  "zut", ou "merde", au nom de "l'éducation bienveillante", ça pique un peu quand ça arrive la première fois. En sa qualité de plus haut degré de l'espèce humaine, le Millenial est celui qui donne des leçons, mais qui n'en reçoit pas - sans savoir que, comme le chantait Pacsal Obispo (autre pervers phallocrate de son état) : "donner, c'est comme recevoir, mais sans s'en apercevoir".

 

 

- 9 janvier 2018 : le metteur en scène Leo Muscato s'offre un coup de pub dans l'air du temps en réécrivant la fin de Carmen (mais si, tu sais, celle qui est tuée par Sephiroth à la fin du CD1).

 

 

 

Dans cette nouvelle version [attention, spoilers ! Mais enfin, c'est pas comme si t'allais lire le bouquin un jour, non plus...], au lieu d'être assassinée par Don José, la plantureuse bohémienne renverse les rôles et zigouille son Jules (enfin, son José, vous m’avez compris) en bonne et due forme (#balancetonporc. Sur la lame d'un couteau, si possible).

 

Ce n'est certes pas la première fois qu'une oeuvre est réécrite (à quoi bon avoir du talent ou des idées personnelles quand on peut s'approprier le travail d'autrui ? Ne lui fait-on pas au contraire un honneur immense en s'appropriant culturellement sa merde des années wesh et en l’améliorant ?), mais ce sont les raisons de l'homme qui forcent le respect (ils le forcent même tellement qu'il devrait aller porter plainte).

 

"On ne peut pas applaudir le meurtre d'une femme", dixit.

 

Jamais auparavant on n'avait fait preuve d'une telle puissance intellectuelle, d'une telle faculté de recul, d'une telle connaissance des principes symboliques qui régissent le domaine de l'Art !  Dans la tête de Muscato, ce n'est en effet pas celui-ci, qu'on applaudit, ni la performance, ni la musique, ni les chorégraphies, ni l'écriture, ni même sa putain de mise en scène, non : c'est ce qui se passe sur les planches (enfin, ça ne se passe pas vraiment, hein, c'est tout du faux, mais les gens le savent-ils seulement ?). Ce qui recoupe plutôt bien ma théorie comme quoi il faudrait mettre tous les fans de Saw en prison. D'ailleurs si Mérimée a choisi ce dénouement, ce n'était absolument pas pour des raisons dramaturgiques, des questions de structure ou de thématiques, non, c'est juste parce que c'était un putain de mâle blanc hétéro-cis-genre et qu'il adorait voir les femmes mourir sous ses yeux. Nonobstant, il semble que pour Muscato, applaudir le meurtre d'un homme ne pose pas de problème, par contre. Ben oui, la femme est l'égale de l'homme mais c'est plus grave de la tuer elle. Narmol.

 

 

Il reste un peu de place pour lui dans la cellule des fans de Saw, ou pas ?

 

 

- 13 janvier 2018 : Vous pensiez que Friends n'était qu'une inoffensive sitcom des années 90 racontant sur un ton humoristique le quotidien de six jeunes New-Yorkais ? Vous n'êtes pas Millenial, vous appartenez au passé - un passé honteux où on portait des peaux de bêtes et où on traînait les femmes par les cheveux. Car sous ses dehors bon enfant, la série ne trompe personne (personne de moins de trente ans, en tout cas) : elle est raciste, sexiste, homophobe et grossophobe. Pas étonnant qu'elle ait été si populaire auprès des gros connards arriérés des générations précédentes ! Heureusement que la nouvelle est là pour prendre la relève, avec son 15 en français au BAC niveau 5ème !

 

 

Fort de ce constat édifiant, gageons qu'elle ne s'arrêtera pas en si con chemin (pardon pour la coquille) et qu'elle va s'atteler à décortiquer TOUT ce que le monde a jamais produit de films, séries, romans ou autres, jusqu'à ce qu'il n'en subsiste plus un seul susceptible de proposer, directement ou indirectement, du contenu à caractère potentiellement « oppressif ». Ou du non-contenu, d'ailleurs. Parce que s'il n'y a pas quelque chose dans une œuvre, c'est qu'il y a son contraire, évidemment, ça tombe sous le sens ! Par exemple s’il n’y a pas de militants anti-nazis dans un film, c'est qu'il est pro-nazi, comme dans Raiponce ou l'Âge de Glace. Hé oui ! Faut réfléchir, un peu !

 

 

On estime donc qu'au printemps 2063, ne seront plus autorisées que les pubs Benetton et les sketchs de Raymond Devos. Mais ne nous réjouissons pas trop vite ! La tâche est grande, le chemin sera long. Nos Avengers de la Justice Sociale vont devoir s'attaquer à des super-vilains de taille, en comparaison desquels Thanos et Ultron font figure d'enfants de chœur. Jugez plutôt : les Inconnus, les Nuls, les Monty Python, … - mais si on pouvait commencer par Laurent Gerra et Jean-Marie Bigard, ça m'arrangerait assez.

 

 

Par conséquent, le cours du Pop-Corn à la Bourse devrait grimper en flèche dans les années qui viennent, si bien qu'en 2064, le président directeur général de la société Baff devrait accéder au trône d'Imperator Millenialis et régner sur le monde d'une main de fer "dans un gant de petits morceaux de nuages". Alors oui, bien sûr, il y aura toujours des esprits rétrogrades pour dire que oui, bon, y'a pas de noirs dans Friends mais y a pas de blancs non plus dans le Prince de Bel Air ou dans le Cosby Show, et qu'on n'en a pas fait tout un foin pour autant MAIS C'EST PAS PAREIL, t'as compris ? Dans Friends, les personnages sont tous issus de la classe des privilégiés et profitent ouvertement des bienfaits du racisme ! Alors que dans les deux autres séries mentionnées, ce sont des minorités opprimées qui souffrent du diktat des blancs et ça, ça-change-tout (les personnages du Prince de Bel Air sont opprimés dans leur palace avec des piliers en marbre - et d'ailleurs, notez bien que leur majordome est NOIR ! Les personnages du Cosby Show, eux, sont opprimés dans leur apart' de douze pièces en plein centre de New York. Je pleure de rage à chaque fois que je regarde ces deux séries, face à tant d'injustices).

 

Alors bien sûr, dans l'une comme dans l'autre, il n'y a pas non plus d'asiatiques ni de portoricains (ni d'inuits non plus, j'ai vérifié), qui sont des minorités opprimées aussi, mais... euuuuhhh... non, c'est pas raciste quand même, parce que... euuuhhhh... c'est pas pareil ? !

 

 

Bon et puis on est tous d'accord, hein : la grossophobie, c'est mal. Bon, après, y'en a pas un (ou une) seul(e) d'entre nous qui accepterait de sortir avec une personne un peu forte sans y être obligé, hein, ou à moins d'avoir un coup dans le nez, mais c'est parce que "ça ne colle pas sur le plan de la personnalité", bien sûr, quoi d'autre ? Celles et ceux avec qui ça colle sur le plan de la personnalité sont comme par hasard toujours sveltes et bien gaulés mais ça, c'est pas notre faute ! C'est pas de la grossophobie, c'est juste une GROSSE coïncidence (mais on peut être amis, si tu veux, Ô, être peu gâté par la nature sur le plan morphologique, mais néanmoins très sympathique malgré tout !).

 

Ceci étant, vous l'avez compris, j’ai conscience que je suis un salaud et j'essaie de changer, de me mettre à jour niveau "système de valeur", histoire de pouvoir moi aussi intégrer le camp des gentils et pouvoir donner des leçons aux méchants sans en recevoir en retour ; mais c'est pas toujours simple avec toutes ces nouvelles notions sophistiques et contradictoires, parce qu'on ne sait jamais trop bien ce qui y relève de la pensée rationnelle ou de la folie furieuse. Alors je me demandais, juste : si les blancs qui écrivaient Friends avaient développé des personnages blacks, est-ce que ça n'aurait pas été une forme d'appropriation culturelle ? Genre du whitesplaining ? Des blancs qui prétendent savoir expliquer aux blacks ce que c'est que le quotidien des blacks ? Du coup, les auteurs de Friends ne mettent pas de perso blacks dans leur série, ils sont racistes, ok. Mais s'ils en avaient mis, ils auraient été racistes aussi. Ils auraient pu se licencier eux-mêmes et engager des scénaristes black à la place, mais l’ont-ils fait ? NON votre honneur ! Non, ils ne l’ont pas fait ! Si ça, ça ne prouve pas objectivement qu'ils sont racistes, je ne sais pas ce qu'il faut aux gens, moi.

 

Alors par contre, juste, ça me gêne un peu, si on pouvait trouver un autre terme pour désigner l’action qui consiste à pendre un individu à un arbre à cause de sa couleur de peau ou de le vendre sur un marché comme une bête de somme, ce serait plus décent, je trouve, parce que je ne crois pas que les gens qui y ont un jour laissé la vie apprécieraient qu'on mette leurs souffrances sur un pied d'égalité avec "ne pas inclure de personnage de couleur au casting d'une série de divertissement humoristique".

 

Mais hé, qui suis-je pour oser la ramener, moi qui suis blanc comme le cachet d'aspirine d'Elric le Prince de Melnibonë ?

 

 

 

- 19 janvier 2018 : puisqu'on en parle, ça tombe bien, AJ+ (entité de la chaîne AljazeeraTV) consacre un reportage à « pourquoi c'est grave, l'appropriation culturelle ».

 

Une femme d'origine maghrébine qui travaille, ne porte pas de voile, s'exprime en langue française via un média occidental et passe à la télévision (sans que visiblement sa vie n'en soit menacée) nous apprend pourquoi c'est grave de s'« approprier » des éléments de la culture d'autrui, faisant ainsi fi de plusieurs millénaires de brassages humains, génétiques, culturels, qui ont constitué la Grande Histoire et ont permis à l'humanité d'avancer (un peu), préférant pour sa part ajouter aux frontières dessinées sur les cartes un surplus de frontières mentales, arbitraires, afin de s'assurer que les communautés ne se rejoindront jamais et resteront bien chacune dans leur coin à se haïr mutuellement.

 

On ne fait pas que t'opprimer au quotidien, individu d'une minorité sociale évidente, on cherche aussi à te déposséder de ce qui définit ton identité culturelle. Te déposséder de tes tresses, c'est se rendre maître de tout ce qui fait de toi ce que tu es. Parce qu'il te reste quoi, culturellement, si on te prend tes tresses, hein, le noir ? Ben rien, c'est bien connu, la culture black se réduit à une coupe de cheveux, tout le monde sait ça dans les milieux non-racisants.

 

Moi, là, comme ça, à brûle pourpoint, je trouve ça d'un racisme larvé absolument dégueulasse, mais c'est parce que je ne suis pas un Millenial, je ne peux pas comprendre toutes les subtilités du monde des gens qui sachent. J'essaie, vraiment, mais j'ai beau faire, je me heurte à mes blocages de vieux con réactionnaire. Par exemple, je sais bien que je ne devrais plus utiliser les chiffres arabes (à commencer par le zéro) et poser toutes mes divisions en chiffres romains mais rien que d'y penser, ça me colle des crises d'angoisse. Remarque, les arabes non plus ne pourront plus les utiliser vu qu'ils les avaient piqués aux Indiens.

 

 

Et puis je devrais arrêter de dire « mes ancêtres les gaulois », aussi, vu que le seul descendant de gaulois qui reste en France et dont l'héritage génétique ne fait aucun doute, c'est José Bové. Oui, c'est un peu compliqué, ces histoires d'appropriations culturelles. Comme je vous le disais, je maîtrise pas tout, encore, mais j'y travaille.

 

 - 29 septembre 2017 : sortie de Cuphead sur PC et Xbox One.

 

 

La polémique ne se fait pas attendre. Le graphisme si particulier de ce platerformer sans pitié serait raciste. Non pas parce qu'il comporterait des éléments racistes, non, enfin, lecteur, ce que tu peux être premier degré par moments, mais parce qu'il serait inspiré d'un vieux dessin animé comportant des éléments racisants.

 

28 janvier 2018 : Dragon Ball Fighter Z sort en fanfare et fait l'unanimité.

De toute évidence, tout le monde a oublié Monsieur Popo.

 

 

 

 

 

 

 

 

Et voilà donc grosso merdo à quelle profondeur nous étions tombé en début de semaine dernière.

 

Sans plus tarder, donc, il est temps de continuer à creuser :

 

 

- 1er février 2018 : la conservatrice d'un musée de Manchester fait décrocher une toile préraphaélite au motif qu'elle présente des corps de femmes dénudées mis en scène « de façon passive-décorative ».

 

 Et en plus c'est trop moche.

 

A la place, l'espace est laissé libre pour que les visiteurs puissent coller des post-it, sur lesquels ils auront écrits leurs réflexions sur la place du sexisme dans l'Art - afin, soi-disant « d'ouvrir le débat » (et quel progrès intellectuel, mes amis ! Avant, on ouvrait le débat en… euuuhh… ouvrant le débat, mais c'était laborieux, les gens argumentaient et contre-argumentaient, ça durait des plombes, on n'en finissait plus, c'était so 2017. Alors que maintenant que la vérité tient en 140 caractères, on gagne du temps et puis on se fâche moins parce qu'on est tous d'accord et que ceux qui ne le sont pas ils ont qu'à fermer leur gueule d'abord sinon on les fait virer de leur fac).

 

Par ailleurs, le décrochage du tableau est présenté comme faisant partie d'une "performance artistique" (lol) qui donnera lieu à une exposition dans ce même musée en mars. Et ça par contre c'est fascinant parce qu'avant, pour être un artiste, il fallait peindre. Alors qu'aujourd'hui, il suffit de décrocher le tableau des autres. C'est donc bien vrai qu'en chaque Millenial, il y a un génie qui sommeille (et qu’est-ce qu’il ronfle, putain, le saligaud ! On n’entend plus que ça !) ? ! Non parce que techniquement, décrocher un tableau, c'est à la portée d'à peu près tout le monde et ça, c'est une bonne nouvelle parce que ça veut dire que l'art se démocratise et qu'il n'est plus l'apanage de vieux croûtons blancs ci-genres qui se sont cassé les gonades oppressives à apprendre des techniques bidons de dans le temps. C'est pourquoi je propose qu'on poursuive sur cette saine lancée en prenant plein de bouquins au hasard et en les cramant sous l'Arc de Triomphe. Bien sûr, le tout sera filmé et fera partie d'une exposition à Beaubourg en juillet. Hé ouais, leçon de vie, les gens.

 

C'était pas d'humanité, qu'ils manquaient, les nazis. C'était de webcams.

 

Pendant ce temps, France 4 diffuse un reportage dans lequel un poisson de trois centimètres (dont le cerveau doit faire à peu près le millième de celui d'une conservatrice de musée) se livre à une performance autrement plus artistique que le décrochage d'un tableau. Bon ok, c'est pour niquer, mais même ! ça reste plus classe que de casquer au restaurant pour pouvoir s'envoyer en l'air.

 

Après, pour en revenir à notre histoire de tableau, si l'on peut me permettre un chouia de mauvais esprit, je dirais que faire disparaître l'objet du débat pour amener à en débattre, ça me paraît un tantinet contre-productif, comme démarche. Genre : "et alors aujourd'hui, je vous propose de tous débattre au sujet du tableau que vous avez tous sous les... euuuhhh... attendez, non, c'est vrai, on l'a enlevé. Bon alors, euuuh... à la place, je vais vous le décrire et... euuuhhh... vous l'imaginerez dedans vos têtes... ou non, tiens... Gontrand va vous distribuer des repro de l'oeuvre, voilà, oui... des repros couleur sur papier glacé... fais-en 350, Gontrand... et distribue-les à tout le monde, hein...". Comme quoi, y'a des musées qui gagneraient à être comme certains aliments : sans conservateurs (badum tsss !) (humour non oppressif, n'empêche).

 

Bon et puis tant qu'à ouvrir le débat, soi-disant, on pourrait commencer par se demander si la femme elle-même ne devrait pas donner l'exemple en cessant de passer des heures devant la glace à faire de son corps une oeuvre passive-décorative, ou d'investir chaque mois plusieurs centaines d'euro pour se mettre en valeur à la manière d'un peintre préraphaélite (quand bien même en a-t-elle tout à fait le droit. Moi, perso, elle fait ce qu'elle veut, je m'en bas les steaks) ; mais ça risquerait d'ouvrir un vrai débat d'avant 2018, ceux où tout le monde n'était pas forcément d'accord avec tout le monde, ou de dépasser le stade confortable de la réalité en noir (ça, ça va encore) et blanc (ouuuh, cochons racistes, ça, par contre). Selon la formule consacrée : Y'en a qui ont essayé (coucou, l'Odieux Connard !), ils ont eu des problèmes. Faut dire, aussi, pourquoi le Millenial se ferait chier à argumenter alors que dans la mesure où il a raison, ceux qui sont d’accord avec lui sont subversifs, et ceux qui ne sont pas d’accord sont réactionnaires. 

 

 

- 1er février 2018, toujours (et quelle douce ironie, ma foi)  : la justice française examine enfin la plainte déposée en 2011 par un utilisateur de Facebook, suite à la censure d'un post reproduisant la toile "l'Origine du Monde (bien connue des anciens de la communauté Gameblog pour des raisons semblables).

 

 

Vite, vite, l'internaute ! Haro sur le Sopalin !

 

Son avocat déclare que « censurer ce tableau, qui est aussi un hymne à la liberté de créer, c’est une attaque contre la démocratie, contre la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Si Facebook a une vision différente de celle qui est contenue dans les textes de loi sur la liberté d’expression, il n’a pas à l’imposer ».

 

Aussi ne saurions-nous trop conseiller aux représentants de Facebook de prétendre avoir supprimé ce post au motif qu'il présentait le corps d'une femme dénudée de façon « passive-décorative » (qui plus est les jambes écartées, ce qui est vachement passif-décoratif, pour le coup), que c'était pour "ouvrir le débat" et que cela s'inscrit dans le cadre d'une "performance artistique", que la suppression du post a été filmée et qu'elle fera l'objet d'une diffusion à l'échelle mondiale lors de la journée internationale de promotion de l'Art Libre et Démocratique (avec une petite animation musicale y intégrant les photos de vacances des utilisateurs). ça devrait passer crème.

 

 

Où se situe la différence, alors ? Le préraphaélisme serait d'un sexisme insoutenable, et le tableau de Courbet, un hymne à la liberté de créer ? C'est Jacquie et Michel qui vont être content de l'apprendre. Pour un peu, ils étaient à deux doigts de... euuuh... non, oubliez la formulation avec les doigts, je vais essayer d'en trouver une autre plus... moins... euuuhhh... passive-décorative. Pour un peu, donc, ils envisageaient de porter plainte contre les peintres préraphaélites pour concurrence déloyale. Parce que c'est bien connu, hein : les gens ne fréquentent les galeries d'art que quand les strip-clubs sont fermés, comme palliatif, juste pour se chauffer le zizi, et il est plus facile pour eux de se pougner sur du préraphaélite que sur du Courbet. Décidément, ces intellos ont tous les vices.

 

Cela ne leur suffit donc pas, d'aller à l'opéra pour applaudir le meurtre d’une femmes ? 

 

 

- 1er février toujours : depuis un peu plus d'un mois, la France redécouvre les violences conjugales et pourquoi c'est grave.

 

 

 

Une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint depuis des décennies, hélas, et on ne compte plus les assoc' qui se sont battues sur le terrain durant tout ce temps pour venir en aide aux victimes de violence, allant jusqu’à mettre leur propre sécurité en jeu, mais il a fallu attendre fin 2017 pour que tout à coup, cela devienne un problème d'intérêt public (puisque retweetable), et plus une vague statistique dont tout le monde s'osef.

 

L'occasion pour le tout-venant des sites sponsorisés de ressortir leurs vieux articles clicbait et cashtonner sur la souffrance du monde (il n’y a pas de sot métier, dit-on, il n’y a que de sottes gens. Ce qu’on ne dit pas, c’est que les sottes gens se comptent par paquets de dix mille). Cette indécence ne suffisait pas, bien sûr, c’eut encore été trop décent, et par conséquent pas assez vendeur. On est en 2018, bordel. La déontologie, c’est devenu un gros mot.

 

Les violences domestiques, c’est bankable, coco, comme tous les faits divers sordides, mais si tu veux vraiment faire un carton, va falloir en rajouter une couche dans le tragique et le sensationnaliste ! Quoi, coco ? « Est-ce qu’on ne risque pas de donner aux gens une idée fausse du problème et d’entretenir des clichés nuisibles à tous les niveaux de la société » ? Ha ha, t’es un marrant, coco, je t’aime bien, toi. Pourquoi tu crois qu’ils cliquent, les gens ? Tu veux manger à ta faim ce mois-ci, ou pas ?

 

"En France", titre notamment Slate, "on meurt parce qu'on est une femme". Pas parce qu'on a un conjoint déséquilibré et dangereux, non. Juste parce qu’on n’a pas enseigné aux petits garçons à respecter les petites filles, tu penses. Le même conjoint déséquilibré, en couple avec un autre homme, il serait doux comme un agneau. Et d’ailleurs il ne tape jamais non plus sur d’autres hommes quand ils le regardent de travers dans la rue, ou au bar, ou dans les gradins du stade. Il aide même les petites vieilles à traverser. C’est vraiment parce qu’il a une femme en face de lui qu’il frappe. Sans ça, comment expliquer qu’il n’y ait que les femmes qui soient victimes de violences conjugales, ou qu’il n’y ait jamais d’agressions sauvages d’hommes dans la rue ? Qu’est-ce qu’il y a, coco ? T’as quelque chose à dire ? Non ? C’est bien ce qu’il me semblait.

 

Alors pardon, je sais, je casse un peu l’ambiance, on rigolait bien et puis là, patatra, ça vire au brulot mais à sa grande tristesse, le Comte Zaroff est aussi un être humain, ce qui implique que certaines choses peuvent lui rester coincées en travers de la gorge (généralement : d’autres êtres humains, mais c’est une autre histoire). Parce qu’autant on ne peut que se réjouir que les langues se délient, qu’on aborde les problèmes de façon frontale, enfin, qu’on leur accorde de l’importance, oui… autant dans les faits, si ça doit juste se concrétiser par des chaînes Facebook (utilité : zéro, mais ça donne bonne conscience) ou des individus qui ne s’intéressent aux faits que pour voir jusqu’où ceux-ci peuvent légitimer leurs convictions personnelles, autant laisser les assoc’ et la police continuer leur boulot comme avant, hein.

 

Parce que bon, je suis pas psychologue, hein, mais j’ai quand même un scoop : c’est pas parce que le mec qui bat sa femme il va voir passer sur Twitter un montage Paint avec inscrit dessus « taper sa moitié, c’est se taper soi » qu’il va se dire « bon sang mais c’est bien sûr ! Comment ne m’en suis-je pas rendu compte plus tôt ! Tout ce temps, je lui faisais mal et je ne m’en rendais pas compte ! Si seulement à l’école, on m’avait enseigné que taper sur les filles c’était pas bien ! Mais pourquoi, pourquoi, pourquoi mes parents m’ont-ils emmené voir Carmen à l’opéra quand j’avais douze ans ? ! ».

 

Et de la même façon, en s’attaquant à un problème en le prenant non pas pour ce qu’il est, mais pour ce qu’on voudrait qu’il soit, on ne risque pas de régler quoi que ce soit - ou bien il faut tout de suite prévenir les médecins généralistes, qu’ils arrêtent de prescrire des antibios en cas de grippe, et proposent plutôt une amputation des doigts de pied. Alors, non, coco, on « ne meurt pas parce qu’on est une femme ». Il y a des femmes qui meurent, oui, et c’est déjà bien assez dégueulasse comme ça sans que tu viennes en rajouter. Oui, il y a plus de femmes que d’hommes qui sont victimes de violences conjugales. Mais ce n’est pas la même chose, loin s’en faut. Être une femme n’est ni le mobile de ces meurtres, ni leur cause première, pas plus que ce n’en est une conséquence. Il faut lutter contre la violence conjugale, point, voire contre la violence tout court. Quand on veut traiter un problème, on le traite dans son ensemble, on ne s’empare pas d’une petite partie de celui-ci pour essayer de la régler en loussedé parce que même si on y arrive, le problème, lui, subsistera.

 

Mais tu as raison, Jean-Eudes, c’est moi qui n’ait rien compris, c’est moi le monstre. Continue de tout mélanger, de tout amalgamer, juste pour te coller le grand frisson du Super Héros Marvel par procuration. Et continue aussi de croire tout ce que tu lis sur les réseaux sociaux, tant que t’y es, et de les laisser façonner ta vision biaisée de la société dans laquelle tu vis et dont tu profites, quelle que soit ta putain de couleur. Comme ça, pareillement, au lieu de t’atteler à régler les problèmes de façon rationnelle et efficace, tu perdras déjà cinq ou six ans à réinventer la roue – ou plus explicitement : à préconiser ce qui se fait déjà.

 

Pour preuve : le grand référendum public lancé par Make.org, à la manière des post-its de la conservatrice du musée de Manchester (parce qu'au cas où vous n'auriez toujours pas pigé, les grandes vérités sociétales tiennent en 140 caractères) :

 

Là encore, une initiative plutôt louable - même si le but premier est de faire connaître cette toute jeune start-up, ça ne peut pas faire de mal, c’est toujours bien d’en parler et c’est toujours mieux que pas d’initiative louable du tout. Mais enfin, il en ressortira quoi ?

 

Non parce que j’ai peut-être pas eu de bol au moment du tirage au sort mais tout ce que j’ai lu comme proposition était soit d’une naïveté criminelle (« il faut apprendre aux hommes que les femmes sont leurs égales »), soit fondées non pas sur la réalité, mais sur une idée caricaturale de la réalité vraisemblablement entretenue par les « esprits libres » d’internet, ceux qui arrivent toujours à râler quel que soit le sujet comme quoi on nous ment et on nous spolie (« il faut que les policiers prennent les plaintes des femmes battues au lieu de les ignorer », « il faut que la justice condamne les meurtriers au lieu de les relâcher au bout de six mois ». Putain mais oh. C’est bon, au bout d’un moment. Les chansons de Booba, c’est pas des documentaires. D’ailleurs par les temps qui courent, même les documentaires, c’est pas des documentaires, alors c’est bon, si tu trouves que les flics ou les magistrats font pas leur boulot, deviens flic ou magistrat, ou au moins va faire un stage chez eux, ou au moins renseigne-toi avant de poster ce genre de conneries. Et quand j’écris « renseigne-toi », je sous-entends : « ailleurs que sur lemondeestroppourri.com »).

 

Toute cette énergie et cette bonne volonté déployée pour, au final, enfoncer des portes ouvertes ou exiger qu’on fasse ce que l’on fait déjà  (« mais plus »). C’est sûr que le boulot des assoc’, à côté, c’est que dalle. Maintenant qu’il y a Twitter, elles devraient mettre la clé sous la porte. Et sur celle-ci, coller un post-it avec un gros « allez vous faire foutre » dessus.

 

Et puis bon, tout ça, c’est grave, c’est même très grave, mais surtout, que ça ne nous empêche pas de nous précipiter au cinéma le 7 février pour la sortie du troisième volet de 50 Nuances de Grey, hein. La violence et la réification (au sens littéraire, Jean-Eudes) de la femme, c'est un peu comme tout le reste : ce n'est pas un problème si elle est librement consentie et s'il y a éjaculation à la fin. Narmol.

 

 

 Ce qui ouvre un autre débat (attendez, je vais décrocher un cadre dans mon salon) : celui de la limite entre le cyber-militantisme et le divertissement malsain. Mais j’imagine bien qu’on préfèrera : « l’homme est-il un gros violent ? Cochez la case correspondante : « oui », « oui », ou « oui ». Merci de votre participation » (« regardez les chiffres ! Selon ce sondage absolument pas biaisé dans sa formulation comme la plupart des sondages, 100% des personnes consultées considèrent que l’homme est un gros violent ! Et la justice qui s’obstine à faire l’autruche ! C’est scandaleux ! Donne à mon Patreon ! »).

 

 

- Vendredi 2 février : selon le rapport d’une député « La République en Marche » et de sa collègue d'« Agir et Indépendant » (je ne sais pas pourquoi, ces noms de partis, ça me fait toujours marrer, je n’arrive pas à savoir si c’est du troll, du second degré, de la com’ ou s’ils y croient vraiment mais si c’est le cas, leur place est à l’asile), les professeurs seraient déconnectés de la réalité de leurs élèves, ce qui créerait un fossé social et de la discrimination.

 

 

 

Pour y remédier, en substance, elles proposent de… faire un couscous.

 

Enfin, ça, c'était le 31 janvier. Le 2 février, le temps que l’idée fasse son chemin, la mention du couscous a disparu, peut-être parce que quelqu’un d’un peu plus futé dans un cabinet quelconque s’est dit que lutter contre le racisme par le racisme, c’était certes novateur, mais pas forcément la bonne solution non plus parce que bon, même si c’était pas méchant (et proposé sans arrière-pensée, n’en doutons pas), c’est quand même un peu réducteur d’un point de vue culturel.

 

Ceci étant, vous connaissez la chanson : qui suis-je pour juger ? Je suis blanc comme Casper les jours de lessive. Hein ? Quoi ? Comment ? Elles aussi ? Ha oui, merde, c’est vrai. Bon… heuuuu… hum… changeons discrètement de sujet et recentrons-nous, s’il vous plaît.

 

Les profs seraient donc déconnectés de la réalité, ce sont des politiques qui le disent et ok, d’accord, on sait pas trop à quoi ils sont bons, les politiques, la plupart du temps, mais s’il y a bien une chose dont on est sûr, c’est qu’ils s’y connaissent en déconnexion de la réalité, ils la pratiquent au niveau Olympique. Le jour où Morpheus distribuait ses pilules, ils pouvaient pas être là, ils avaient aqua-détournement-de-fonds.

 

Ceci étant, il faut leur reconnaître qu’elles ont bien bossé leur sujet. Elles n’ont pas approché un établissement scolaire à moins de cent mètres, mais qu’est-ce qu’elles en ont lu, des pages Twitter ! Sans ça, je ne vois pas comment expliquer que les trois quarts de leurs propositions soient appliquées depuis des années. Est-ce à dire que les politiques sont déconnectés des réalités des professeurs, et que pour combler le fossé qui les sépare, il faudrait organiser un brunch truffes-caviar ?

 

Non parce que c’est vrai, à quoi ça sert de se renseigner un peu ? On s’adresse à l’électorat, pour qui l’Ecole est là pour former de la main d’œuvre pas chère, étouffer le génie de nos chères têtes blondes, leur enseigner des contre-vérités pour pouvoir mieux les contrôler, les formater, trier les bons et les mauvais, jeter au rebut les contestataires, stigmatiser, briser, brimer, contraindre, mettre plus bas que terre. D’ailleurs l’Education Nationale ne recrute que chez les anciens waffen SS ou les ex-barbouzes de la guerre du golfe. Il n’y a ni médiation, ni rencontres, ni projets personnalisés, ni avs, ni lien social avec les associations, ni soutien, ni humanité, ni heures supp’ bénévoles, rien de tout ça, qu'est-ce que tu crois, ils sont toujours en congé ces grosses feignasses. Dès qu’un élève parle sans lever la main, paf, il est viré et on coupe les allocs à sa famille. C’est des tarés, ces mecs, ils notent les enfants, t’entends ? Quel genre de malade fait ça, sérieux ?

 

Au contraire : il faut apprendre à l’enfant que tout se vaut, c’est ça, la philosophie Millenial. Qu’on travaille ou ne travaille pas, qu’on fasse des efforts ou qu’on n’en branle pas une, que se tienne tranquille ou qu’on foute le ouaille, qu’on écoute l’adulte ou qu’on l’envoie se faire foutre, on est tous égaux, t’entends ! C’est ça, la bienveillance ! C’est apprendre aux enfants à surtout, surtout, ne jamais se fouler le cul ou respecter les autres, hein, c’est trop contraignant, ce sont des usages totalitaristes dignes des pires goulags de la Sibérie. Ok, on les laisse déjà sortir de cours à chaque fois qu’il ont mal au ventre, ou à la tête, ou quand ils ont un cil dans l’œil, même que ça dérange la classe à chaque putain de fois, et peut-être que c’est pas toujours le cas dans les goulags, ADMETTONS. Mais ça reste quand même très oppressif, comme milieu, pour nos enfants. On ne les laisse pas boire quand ils veulent ni utiliser leurs portables en cours. Et puis des fois, on les PUNIT. Alors que bon, oh, je connais bien mon fils, jamais ô grand jamais il ne ferait la moindre bêtise quand j’ai le dos tourné, JAMAIS, alors ap-pe-lez-moi-le-di-rec-teur !

 

Mais hé, on le sait, qu'ils sont oppressifs, les profs, on en a encore eu la preuve objective récemment avec le #Ouiouigate (oui, oui - c'est le cas de l'écrire -, vous ne rêvez pas, c'est un authentique hashtag, à la mesure de nos nouvelles élites intellectuelles), rendez-vous compte ! Un prof ose se moquer ouvertement de ses élèves sous prétexte que ceux-ci n'avaient pas lu le pavé infame DE PLUS DE CINQUANTE PAGES qu'il leur avait arbitrairement imposé (avec des ours qui parlent en plus, mais jusqu'où va la perversité ? !). Ceci, en préparant un faux contrôle, humiliant et discriminatoire (relevant, à mon sens, du pur génie - mais je suis un connard alors mon avis ne compte pas), du sur-mesure pour ces feignasses incultes  et fières de l'être qui, déjà, sans doute, jouent aux grand intellectuels sur les réseaux sociaux... alors que tout bon pédagogue (moderne) aurait pris deux heures de son temps pour leur expliquer en quoi lire est important et en quoi "nique sa mère les ours qui parlent" n'est ni drôle, ni intelligent, ni respectueux de l'ouvrage, de l'auteur, du prof, de son travail et de l'institution. Puis il aurait mis 18 à tout le monde et aurait filé 20 euros à toute la classe pour les remercier d'avoir écouté - un peu. "Et le droit des élèves au respect, alors ?", a-t-on tweeté très fort avec plein de fautes dans les mots (normal, nique sa mère les ours polaires et les livres de plus de cinquante pages). A quoi je répondrai très finement qu'il est comme tout le reste en général, et les DEVOIRS des élèves en particulier : dans mon cul en particulier, et dans celui de la société en général. Parce que ouais, les gens, aujourd'hui, ils sont prompts à invoquer leurs droits, et beaucoup moins à s'acquitter des devoirs qui vont avec, hein. Tu penses, c'est fatigant. On veut bien réclamer, mais rendre en retour ? Non mais ça va pas, sale réac' de merde ? Non et puis surtout, le prof du OuiOuiGate, à un moment, il s'est vaguement moqué des handicapés et ça, c'est pas tolérable (parce que j'ai des  amis handicapés, t'entends ! Je passe ma vie à traiter les gens de triso et d'autistes sur le net, mais chez moi c'est pas oppressif, vu que je suis un Millenial et que je suis dans le camp des bons !). Et pendant ce temps, sans que ça ne dérange personne, le groupe Trisomie 21 s'apprête à remplir le Transbordeur.

 

 

Bref, vu que le rapport va dans le sens de tous les préjugés débiles qui font recette dans les discussions de parents d’élèves, nul doute qu’il va avoir son petit succès et qu’ils seront nombreux, comme France Culture, à s’engouffrer dans la brèche… en demandant, comme ici, s’il ne faudrait pas apprendre aux profs à parler aux parents. Parce que le problème, c’est les profs, hein. Ces petits connards blancs hétéro cis-genre qui vivent dans des châteaux de la Loire. Apprendre aux parents à parler aux profs ? Vous n’y pensez pas, enfin ! L’Education Nationale, c’est comme chez Babou : le client est roi.

 

 

- J'éviterais d'épiloguer sur les chasseurs, qui ont désormais le droit de coller un silencieux à leurs pétoires, parce qu'ils n'abattaient pas assez de promeneurs comme ça lorsqu'on les entendait à deux bornes à la ronde (et du coup, ça les déprimait), ni sur les émeutes dans les Intermarchés pour du Nutella à 1 euros 40, parce que quand même, c’est beau, des gens prêts à se battre pour ce qui leur tient à cœur. Dommage que ce soit de la pâte à tartiner, et pas la fin des violences conjugales.

 

 

 

Pendant ce temps, ailleurs dans le monde :

 

 

- Vendredi 2 Février, toujours (ça ne s’arrête jamais, les conneries ?) : polémique au sujet, tenez-vous bien… du pull d'hiver de l'équipe de Norvège de ski. Et ouais, carrément. Là on est dans du grand combat d’idées, c’est clairement pas la même. Et tout ça pour quoi ? Parce que sur le pull en question figure une rune nordique jadis récupérée par l’imagerie nazie (et néo, itou).

 

Parce qu’on veut bien chialer quand Miley Cyrus se fait des tresses, hein. Par contre, quand un peuple veut légitimement se réapproprier la culture dont il a jadis été dépouillé par des mabouls, ça chiale aussi.

 

 

Il va vraiment falloir qu’on m’explique une bonne fois pour toutes comment ça marche, cette histoire d’appropriation culturelle. Je suis curieux.

 

 

 

 

- Samedi 3 Février : colère des « grid girls », évincées des circuits de Formule 1 où elles avaient coutume de compter les tours en tenue sexy.

 

Il faut dire qu’à l’heure de #balancetonporc, certaines professions font plus tâche que d’autres, alors pour ne pas faire de vagues, on suit le courant et advienne que pourra. Du coup, ben, tant pis pour ces miss, elles feront autre chose de leurs dix doigts et de tout ce qui va avec.

 

Et moi qui croyais naïvement qu’avec le Féminisme (le vrai, hein, pas celui sur Twitter), la femme avait gagné le droit de disposer de son corps comme elle l’entend ?

 

 

Comme elle l’entend, oui, mais seulement si elle l’entend comme les féministes d’aujourd’hui. C’est beau, la non-oppressivité, quand même. Quelle avancée sociale. A croire qu’il en va des causes comme de la terre elle-même : si on avance jusqu’au bout, on revient à son point de départ.

 

Bon, finalement, aux dernières nouvelles, ils ont décidé de les remplacer par des enfants (qu'il est illégal de faire travailler, mais ce n'est qu'un détail).

 

 

A venir :

 

 

- 17 février : Autre avancée sociale du même acabit, et non des moindres, cette belle initiative du collectif Mwansi : une projection du film Black Panther non mixte réservée aux noirs, pour leur permettre d'échanger sur leur condition de racisé sans pression ni se sentir jugés (parce que c’est sûr que les blancs qui vont se taper les deux heures de film sont ceux qui ne peuvent pas voir un black en peinture, évidemment).

 

 

Et alors ça, par contre, franchement, c’est une très bonne idée, je ne vois pas bien ce que le Licra trouve à y redire. Au contraire, c’est très bien que les noirs aient des espaces à eux dans lesquels ils peuvent être ensemble et confronter leurs expériences sans qu’un blanc ne vienne leur faire de réflexions désobligeantes. Il faudrait étendre ça à d’autres lieux publics.

 

Par exemple, on pourrait imaginer un espace non-mixte pour les noirs au fond des bus, des logements non-mixtes en périphérie des villes et des débouchés professionnels non-mixtes dans les champs de coton. Après, voilà, ça choque des gens, mais est-il besoin de préciser la couleur des gens que ça choque ?

 

Tout ça parce qu’eux, quand ils se réunissent entre eux et excluent toute autre pigmentation que la leur, généralement, c’est pour enfiler des cagoules pointues et chasser le métèque. Mais hé ! Faut pas non plus qu’ils prennent leur cas pour des généralités ! On peut très bien exclure tout ce qui ne nous ressemble pas et est susceptible de ne pas être d’accord avec nous sans pour autant faire preuve de discrimination ! Eux, ils sont blancs, donc ils sont racistes ! Mais comme le racisme anti-blanc n’existe pas, la réciproque ne peut pas être vraie. Et oui, l’internaute. C’est logique, enfin.

 

 

Comment ça, « sauf que du coup, l’accès est également interdit aux asiatiques, au portoricains et aux inuits (j’ai vérifié), et par conséquent c’est bien du racisme quand même » ? Mais… euuuh… attendez, je vérifie mes fiches… euuhh… ça existe, le racisme anti-jaunes, déjà ? Et le racisme anti-aye-caramba ? On en est sûr, au moins ? C’est que bon… ils ne m’ont pas l’air très opprimés non plus, quoi… euuuh… bon, je demanderai à Chef Twitter à l’occasion. Mais pas maintenant. Il est très occupé. On vient de choper une grid girl en pull norvégien au premier rang lors d’une représentation de Carmen, il faut qu’on la fasse exclure de sa fac.

 

Non mais voilà.

 

Ce qu’il faut retenir, c’est que ce sera un espace de parole privilégié dans lequel les frères noirs de toutes origines pourront échanger sur un pied d’égalité sans avoir à souffrir de discrimination. Enfin, à part la discrimination inter-pays d’origine ou inter-ethnies, hein, qui est quand même vachement marqué dans la communauté mais… euuuh… bon... ce sera un espace sans blancs, voilà. Comme ça, on pourra tous apprécier tranquillement un bon film hollywoodien, inspiré d’une BD écrite par un blanc et dessinée par un blanc.

 

Oui parce que non, c’est pas un documentaire sur les Black Panthers. Vaut mieux le préciser, y’en a qui pourraient  être déçus.

 

 

- Soon : stupeur dans le milieu théâtral US (et sur les sites fachos de France et de Navarre) : la prochaine Jeanne d’Arc sera noire.

 

 

 

 

Ça, ils vont faire une sale gueule chez les Front-Nationaleux.

 

 

Encore une idée géniale pour lutter contre les a priori (et faire le buzz par la même occasion, mais de façon très involontaire, hein, évidemment, c’est tout à fait fortuit,  qu'est-ce que vous allez vous imaginer, enfin). Bon, on pourrait arguer (comme l’a fait un très bon ami à moi) que ce choix n’est pas très heureux puique Jeanne, rappelons-le, est une fanatique religieuse qui finit cramée à la fin. Historiquement, le parallèle est un peu limite quand même. Le bon côté des choses, par contre, c’est que si l’on s’en tient à la théorie de Muscato, les spectateurs qui achèteront leurs billets viendront pour « applaudir l’immolation d’une femme ». Du coup, il suffira de leur passer les menottes sitôt entrés dans la salle et de les coffrer pour racisme et exaltation de la violence raciale.

 

Alors bien sûr, il est regrettable qu’en 2018, on engage une actrice davantage pour la couleur de sa peau que pour son talent (dont de toute évidence, Condola Rashad ne manque pas), ce qui est quand même un chouïa raciste aussi, mais accordons le bénéfice du doute au directeur de casting et partons du principe qu’il a fait totalement abstraction du coup de pub qui s’ensuivrait au moment où il a arrêté son choix (c’est qu’à force, on en deviendrait cynique dites donc !).

 

Et puis tant qu'on y est, c'est dommage qu'ils n'aient pas plutôt pris une grosse, ça aurait été encore mieux. Mais bon, on ne peut pas tout avoir non plus. Cette version sera antiraciste, mais grossophobe. ça aurait pu être pire (genre le contraire). Tant pis si ça fait râler quelques vieux fachos réactionnaires, sous prétexte que ça ne colle pas trop à la réalité historique : heureusement, les Millenials ont davantage d’ouverture d’esprit, ils en ont terminé avec ces clivages archaïques, ils ne pourront que saluer cette décision courageuse.

 

Pas sûr, par contre, qu’ils ne râleraient pas comme des vieux fachos réactionnaires si on collait Francis Huster dans le rôle de Nelson Mandela ou de Martin Luther King, mais bon, comme j’ai l’honnêteté de le reconnaître plus haut, je pige vraiment pas comment ça fonctionne, l’appropriation culturelle. Comme dirait Jean-Eudes :

 

 

Et voilà, je crois qu’on a fait le tour. Ou disons que je suis certain que non, mais que je vais m’en persuader quand même parce que j’en ai ras-le-bol et que c’était vraiment une idée à la con. En tout cas, une chose est sûre, je tiendrais jamais un rythme hebdomadaire, y'a des nouvelles conneries qui tombent toutes les trois minutes, c'est infernal, j'ai déjà trois jours de retard sur mon planning de publication initial.

 

A une prochaine, donc, et dans l’attente, n’oubliez pas :

 

« ne changez rien, changez les autres. C’est pas du fascisme tant qu’on porte pas des vestes en cuir ».

 

 

Hé ouais les gens.

 

 

 Heureusement que la bêtise peut être rafraichissante, également. ça équilibre un peu.