Mac-Do-le-jeu-vidéo ne sort pas d'un happy meal. Pas de tache de gras, c'est sûrement un énième plan marketing de la multinationale américaine pour séduire les jeunes générations, avec son clown Ronald McDonald entouré d'enfants gloutons comme Hänsel und Gretel, les deux bambins germaniques pris au péché de la gourmandise.

 

 

 

Hansel et Gretel

Après quelques minutes, le doute s'installe et la satire saute aux yeux. Très fins, les développeurs entretiennent la confusion et reprennent les codes institutionnels : des personnages mignons, multicolores et souriants, les esclaves parfaits du mondialisme. C'est par son contenu et ses règles que Mac Do renverse le message politiquement correct du monde globalisant pour dévoiler l'envers du décor et glisser vers une satire sournoise.

 

Dans la pure tradition du jeu de gestion satirique à la Theme Hospital ou Theme Park, Mac Do utilise l'humour noir pour divertir et faire passer ses messages.

La chaîne de production, divisée en quatre pôles, pointe tous les abus dont fait preuve la multinationale de l'agroalimentaire : scandales sanitaires, corruption des gouvernements et des institutions locales, turn-over des salariés précaires, management sauvage et autoritaire.

 

Le joueur apprend à faire du profit sans foi ni loi et l'ensemble des choix de gestion qui s'offrent à lui sont là pour le pervertir. Toutes les interactions proposées par le jeu sont synonymes de pratiques frauduleuses ou répréhensibles moralement. Un salarié, on le félicite, puis on le discipline, et enfin on le débauche. Plus assez souriant et efficace, il sera remplacé par une nouvelle main d'œuvre fraîche et enthousiaste. Les pâturages peu productifs sont blindés de vaches jusqu'à devenir stériles, les OGM contaminent les champs voisins, la déforestation et la destruction de villages tribaux entraînent des protestations altermondialistes et écologistes.

Ce sont les réactions des lobbies qui rendent compte des dérapages et des perversions de la société capitaliste. Par leurs boycottes et manifestations, les comptes de la société filent dans le rouge faute de clientèle. Malgré toute l'ardeur mise en œuvre pour faire du profit, le camp du bien finit par obtenir la faillite de l'enseigne.

Corruption de nutritionniste

Néanmoins, en faisant un tour du côté du site officiel du jeu, on remarque la poursuite de ce militantisme. Il y a, en quelque sorte, un passage de relais entre le militantisme vidéoludique (dénonciation par l'utilisation du genre du jeu de gestion) et le militantisme traditionnel, ou plutôt porté sur Internet. Du texte, des vidéos, des références.

Dans la rubrique, Why this game ?, on peut lire un éditorial de Ronald MacDonald :

« Depuis des dizaines d'années, Mickey's a été vivement critiquée pour son impact négatif sur la société et l'environnement.


Il y a d'inévitables dommages collatéraux liés à notre secteur d'activité : destruction de forêts, désertification, précarisation des salariés, intoxications alimentaires, etc... Nier ces faits effectivement fondés serait impossible, aussi nous avons décidé de créer un jeu en ligne pour expliquer aux jeunes que tout ceci n'est que le prix à payer pour conserver notre mode de fonctionnement.

Nous continuerons dans cette voie avec la même détermination. Rejoignez-nous et amusons-nous ensemble !

Ronald McDonald »

Le discours reprend le principe de la satire présente dans le jeu, un détournement de codes a priori vertueux pour montrer toute la perversité que ces normes cachent. Ici, le bon clown Ronald tient un discours enjoué et amère à la fois sur l'impact de la multinationale Mac Donald, comme si on ne pouvait faire autrement (la fatalité pour faire passer la pilule, une méthode applicable en politique pour les réformes). Les quelques images, affublées de liens, juste à droite de l'éditorial permettent de poursuivre cette critique acerbe. Chaque image renvoie à un documentaire ou un livre portant sur le sujet. On citera, par exemple, No Logo de Naomi Klein ou encore Super Size Me de Morgan Spurlock. Molleindustria reprendra ce concept du site comme extension critique d'un jeu déjà critique. Une sorte de grand tout au service d'une cause.


Conclusion

Bien réalisé et riche en contenu pour un jeu flash, amusant et compétitif, s'il ne fait pas réagir de prime abord, Mac Do a le mérite de rappeler toutes les pratiques scandaleuses dont sont responsables les multinationales ainsi que leur mépris des consommateurs et de leurs institutions.


Jeu jetable par essence, le format flash ne manque pas son objectif. Avec sa durée de vie limitée mais son message politique et militant clairement exposé, McDonald's Video Game est une leçon de ce qu'un jeu mineur peut interpeler en reprenant des codes vidéo-ludiques pour les adapter à une situation réellement équivoque.

L'article d'origine : https://levelfive.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=180:chronique-mcdonalds-video-game-pc&catid=40:pc&Itemid=28

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