Pour le grand public, le film d'animation japonais est lié à Hayao Miyazaki. Il faut dire que le Maître est auréolé des trophées de ses succès... Mais pour le moins grand public, d'autres noms sont évoqués lorsqu'on pense au cinéma d'animation : Isao Takahata (pour rester dans le Ghibli), Mamoru Oshii, et celui qui nous intéresse aujourd'hui : Mamoru Hosoda. Que de chemin parcouru par le bonhomme. Un film Digimon qui bien que très oubliable (la faute à un scénario mal branlé qui évoque les fameux nanars deux-en-un) pose les bases d'un très sympathique Summer Wars, l'un des meilleurs films One Piece (Le Baron Omatsuri et l'île aux mystères), le très réussi La traversée Du Temps...la filmographie de ce brave Hosoda n'a à envier à celle de Miyazaki que sa longueur (dû à l'âge avancé du papa de Nausicaa). On retrouve chez Hosoda une vraie patte reconnaissable, dans sa façon de dépeindre le quotidien avec une sorte de poésie mélancolique qui fait mouche, une sorte de sobriété qui donne à ses films une douce saveur à laquelle j'accroche toujours. Alors quand à l'été 2012 le dernier né d'Hosoda : Les enfants-loups Ame et Yuki a sorti sa frimousse dans les salles obscures, je me suis rué au cinéma (piégeant un pote qui m'accompagnait et voulait voir à la place un truc de coursier avec Joseph Gordon-Levitt mais passons...)

                                              Hana, la petite Yuki et Ame sont le coeur de l'histoire

             Hana est une jeune étudiante timide et gentille qui tombe sous le charme d'un camarade de fac. Alors que se noue entre les deux jeunes un lien d'amour très fort, le jeune homme dévoile son secret à la jeune femme. Il est le dernier représentant de la race des Hommes-loups, des hommes qui peuvent se transformer en loup (ou vice-versa) cela ne gêne pas la belle qui aura de son jules deux enfants : Yuki et Ame qui tiennent de leur père leur nature fantastique. Suite à certains évènements, la brave Hana se retrouve à devoir élever seule ses deux mouflets. Mais si élever des enfants en bas-âge est déjà en soi un travail aussi difficile que gratifiant, la tâche s'avère plus ardue quand en plus les petiots prennent l'apparence de louveteaux. Afin de les élever à l'abri des regards indiscrets et d'offrir à sa progéniture le choix de leur destin, Hana décide de quitter la ville pour s'installer à la campagne. Le film couvre une période de treize ans au cours desquelles on suit Hana, mais aussi ses enfants qui se retrouvent à choisir ce qu'ils veulent être : des humains, ou des loups.

                                   

                                          OUUUUUUUUH Comment c'est trop choumignon °3° 

             Ame et Yuki est un film qui traite de la maternité. Hosoda a affirmé avoir eu l'idée de ce film alors que son entourage commençait à découvrir les responsabilités parentales. On suit donc Hana, personnage féminin qui se retrouve seule avec deux enfants à charge. Véritable mère courage, on la voit affronter des situations et difficultés de la vie courante et cela, sans se départir de son sourire. Le personnage est très bien écrit, et ce, même si on frise parfois le syndrome de la Mary-Sue. Elle est terriblement attachante, apprenant de ses erreurs, et faisant tout le temps de son mieux. Les enfants aussi sont juste adorables. Peut-être est-ce le fait de les voir grandir, ou bien le fait qu'ils sonnent si justes, mais ils sont super attachants, parvenant à être drôles quand ils sont facétieux ou touchants dans les moments les moins joyeux. La petite famille d'Hana est telle qu'en tant que spectateur, on se sent concerné par leur sort. Les personnages secondaires sont bien sympas, bien qu'ils soient en retrait par rapport au trio principal.

                                  Le vieux Narasaki est un cousin très éloigné de Clint Eastwood.

             L'intrigue est bien contée et à aucun moment elle ne patauge dans le mélo outrancier. On rit, on s'émeut, on a même peur pour les héros, mais on n'a jamais l'impression que le film nous pousse à ressentir ces émotions. Il se dégage un naturel simple qui rend le tout très crédible. Les problèmes que rencontre Hana trouvent un écho dans la réalité. Nourrir ses enfants, les soigner (d'ailleurs, un enfant-loup ça se soigne chez un pédiatre ou un vétérinaire ?) les éduquer, les protéger...il en va de même pour les enfants qui doivent apprendre à s'intégrer dans la société en réfrénant leur coté bestial ou bien choisir une vie dans la nature, mais en sacrifiant alors le confort et les liens forgés lors d'une vie humaine. Le film joue sur plusieurs tableaux : la tranche de vie, le film de préadolescent ainsi que le conte écolo dans la mouvance d'un Miyazaki (oui on revient toujours à ce brave Hayao). Et bien qu'il pioche dans plusieurs registres, il parvient à parfaitement s'en tirer, sans se prendre les pieds dans le tapis, grâce à un scénario habile qui parvient à éviter les écueils de la facilité.

       

                            Le film bénéficie d'une atmosphère champêtre et pastorale très rafraîchissante.

             Techniquement, c'est beau. C'est vraiment très beau. Le studio Chizu, créé par Hosoda à la faveur de ce film peut être très fier de son fer de lance. Le chara-design est épuré sans être simpliste, avec des personnages charismatiques, à l'image du vieux Narasaki, le Clint Eastwood japonais. On retrouve chez Hosoda ce soin dans la représentation du quotidien, il y a une âme dans ces dessins. Ajoutons à cela l'incrustation très discrète d'éléments 3D. Et quand je dis que c'est discret, ça l'est vraiment. L'animation n'est pas en reste et dévoile des moments de bravoure, comme par exemple cette scène dans laquelle Hana et ses enfants courent dans la neige. Visuellement, le film est à l'image du scénario : simple, beau, sans ostentation outrancière. On en prend plein les yeux, mais pas besoin pour cela d'artifices inutiles.

       

L'histoire d'amour entre Hana et l'homme-loup est superbement racontée (et explose en une dizaine de minutes la saga Twilight dans sa totalité en ce qui concerne la narration d'une histoire d'amour entre une humaine et une créature surnaturelle)

              Les musiques sont très belles, avec beaucoup d'utilisation du piano, ce qui évoque un peu La Traversée du Temps. On est hélas très loin des envolées lyriques inoubliables d'un Joe Hisaishi, mais l'OST reste très agréable à l'écoute. Il en va de même pour les doublages, qu'ils soient français ou japonais.

                               

                                                Une chanson à l'image de l'OST : très belle et délicate.

             

                                                          Mais va le voir ! Va l'acheter !

           Les Enfants-Loups Ame et Yuki est un beau film. Et quand je dis beau, c'est dans tous les sens du terme. Beau graphiquement, mais aussi une belle histoire. C'est un vrai plaisir de se plonger dans ce récit qui parvient à mêler avec habileté le fantastique et un réalisme parfaitement retranscrit. Et comme tous les films d'Hosoda, ce long-métrage parvient à véhiculer un message terriblement optimiste et philanthrope qui fait vraiment du bien, à l'heure ou la mode est de se faire passer pour un méta misanthrope pour s'acheter une sorte de caution pseudo-intellectuelle. Les Enfants-Loups Ame et Yuki, comme Mon Voisin Totoro en son temps est un vrai film familial dans le sens où il touchera vraiment tout le monde, sans distinction d'âge, c'est aussi un film généreux qui mérite d'être vu. Alors si ce n'est pas déjà fait, courez l'adopter.

       

                                                      Ca donne envie de faire des enfants °3°