"Han ! Nan mais t'as vu sa gueule ?! Sérieux, encore une paire de nichons sur pattes !... J'en ai trop marre de toutes ces bombasses gorgées de lait qui se frittent dans des armures taille XXS ! Nan mais sérieux, elles se ressemblent toutes... Et le pire, c'est le public d'adolescents boutonneux qui est demandeur de ce genre de bimbos. Heureusement, t'es pas comme ça toi Gigan... Toi, les bonnes femmes, tu t'en fous !..."

Je ne dis rien et j'opine du bonnet. Non, je ne suis pas comme ça, et effectivement, les "bonnes femmes", je m'en fous. Non, je ne suis pas du genre à acheter un jeu pour le chara-design de la gente féminine, et ce n'est pas son opulente poitrine qui m'a séduit chez Bayonetta. Non, mon frère n'a jamais réussi à me distraire avec le boing boing d'Ivy lors de nos parties de SoulCalibur et oui, je trouve que Lara Croft est une aristocrate distinguée...

...mais même pour un homme "différent", un homme se situant de l'autre côté de la barrière, la tentation est rude : oui, j'ai acheté Dead Rising parce qu'on pouvait mettre Frank West en caleçon. Oui, je me suis trouvé un bucheron poilu et affectueux pour me réclamer de l'argent dans Fable 2. Oui, les dialogues entre Phoenix Wright et Benjamin Hunter ont résonné différemment dans mes oreilles. Et oui, j'ai acheté Disaster : Day of Crisis uniquement pour Raymond Bryce !

Beaucoup se déchainent contre le culte de la beauté dans lequel nous baignons, mais personnellement, je ne refuse jamais de contrôler un corps masculin agréablement modélisé ! Si le sexe et l'érotisme deviennent petit à petit des mécanismes obligatoires de l'industrie du jeu-vidéo, il ne faut pas croire qu'ils n'apparaissent que par le biais de charmantes demoiselles ! Combien de chemises ouvertes, de pantalons moulants et de muscles saillants pointent le bout de leurs nez chez les messieurs ? Pléthore ! Moult ! Maintenant est-ce que cette avalanche d'homo-érotisme est voulue ? Le chara-designer de Chuck Greene a-t-il eu une pensée émue envers la communauté gay lorsqu'il a décidé de tripler le volume du postérieur de son personnage une fois celui-ci en sous-vêtements ? Ben pour être franc, on s'en fout comme de notre premier Goomba écrasé (encore que cela puisse être un événement marquant...) ! L'homo-érotisme est omniprésent dans les jeux vidéo et on en est bien content !

Dans le podcast #172, il a été dit que les homosexuels se foutaient
complètement de la sexualité des héros de jeux vidéo, les imaginant
gays par défaut. C'est sans doute à moitié vrai... Dans un monde où les joueurs dirigent des héros et héroïnes hypersexualisés, il est évident que ceux qui savent tenir un crayon ou une plume vont rapidement coucher sur papier fantasmes et autres lubricités. Aussi, si des centaines de stylos ont déjà écarté les cuisses de Tifa
Lockheart, il en va malheureusement de même pour celles de son
bien-aimé. Il suffit de farfouiller 15 secondes sur le célèbre 4chan pour trouver du Léon S.
Kennedy et Chris Redfield en pleine bataille de polochons ou du Isaac
Clarke combattant de manière bien particulière les tentacules de
l'Ishimura... Internet is for porn, mes chers amis ! Mais peut-être pas celui que vous attendiez !


Contrairement à ce qui a été dit dans ce même podcast #172 (vous allez voir que je me gourre et que c'est pas celui-là...), s'il existe bien des hommes émoustillés à la vue de deux jolies donzelles s'enduisant le corps de crème solaire, cela peut également fonctionner dans l'autre sens. Ainsi, énormément de romance entre personnages masculins normalement hétérosexuels sont écrites par des femmes. Nous venant tout droit du Japon (comme tous les autres trucs bizarres au monde...), ces illustratrices se plaisent à dessiner leur vision Ô combien fantasmée de l'homosexualité où une simple amitié ou mieux, une rivalité, devient rapidement le point de départ d'ébats pas souvent justifiés. Ce courant, le yaoi, arrive petit à petit en Europe. Jetez un oeil sur n'importe quel étalage de manga pour vous en convaincre ! Les seme, uke et autres bishonen sont parmi nous...


Imaginer tel ou tel personnage nageant allègremment dans les mêmes eaux que soi est un réflexe qu'on peut retrouver des deux côtés. Notre ami le gamer hétérosexuel peut toujours dessiner à sa guise une héroïne pourtant lesbienne dégustant goulûment une délicieuse glace à l'eau (*clin d'oeil clin d'oeil*). Mais qu'en est-il des romances ? Difficile pour le gaymer d'imaginer Squall Leonhart gay alors que celui-ci fait un frotte-frotte constant à la jolie Linoa, à moins que celle-ci ne nous ait caché un petit secret (oui, ce genre d'illustration existe aussi...) ! C'est sans doute pour ce genre de raisons que Zevran Aranai existe, que l'on peut draguer des Sims masculins ou bien tout simplement que l'on dirige bien souvent des personnages à la sexualité ambigüe, lorsqu'ils ne sont pas complètement assexués ! Pas mal de développeurs ont clairement pensé à cette question d'identification, de libre-arbitre. Le gaymer peut, s'il le souhaite, diriger un personnage qui ne sera pas homosexuel uniquement dans les marais sombres et inquiétants des fandoms. Mais sommes-nous alors voués à diriger des personnages gays "désincarnés" ? Des personnages que nous aurons créés nous-mêmes et dont la sexualité se fera au gré de celui ou celle qui le dirige ? A quand un Nathan Drake, un Kratos ou un Hershel Layton homosexuel ? Encore que pour ce dernier, ses relations avec le jeune Luke me semblent être quand même bien limite...


Pour s'ouvrir à la sexualité, il faut d'abord que le jeu vidéo s'ouvre au sexe, probablement hétéro. Une fois que l'industrie, que le monde entier aura compris qu'il est normal et sain d'avoir des relations sexuelles et de les représenter de manière intelligente dans le jeu vidéo, alors nous aurons franchi la première étape, et pourrons passer à la seconde : la diversité.

Une fois que le jeu vidéo sera suffisamment mature et la diversité des sexualités bien entrée dans les moeurs, alors nous pourrons sauter l'étape sexe (lol...). Beaucoup de personnes sont réfractaires à l'arrivée de personnages ouvertement homosexuels car nous vivons dans un monde hétéronormé. En voyant votre collègue hétéro, vous ne l'imaginez pas tringler joyeusement sa femme. Tandis que, bien malheureusement, beaucoup de personnes vont immédiatement répugner à décortiquer les habitudes sexuelles des gays, mais le faisant quand même... L'homosexualité reste tabou dans de nombreux domaines car elle transpire le sexe et cultive, bien malgré elle, l'imaginaire de personnes qui vont s'en voir dégoutées. Qu'elle soit féminine ou masculine, l'homosexualité a toujours été très
sexuellement imagée dans les esprits, avec pour différence qu'une
d'entre elles est plus aisément acceptée que l'autre. Or, pas besoin de passer par l'étape sexe pour représenter un personnage gay.


Vous saviez que Dumbledore d'Harry Potter était gay ? Cela a-t-il une influence sur l'histoire ? Absolument pas. La force, et le coup de maitre de J.K. Rowling, est de présenter l'homosexualité sans cette étape sexe, comme un trait de caractère parmi tant d'autres. Il en va de même pour le manga "Tokyo Babylon" du studio Clamp, où les deux protagonistes sont homosexuels, vivent un semblant de romance mais évoluant dans un contexte où leur sexualité n'a aucune importance.

La communauté des gaymers a fêté l'arrivée d'un nouveau venu il y a un bon bout de temps avec le personnage de Ike, de Fire Emblem, l'imaginaire aidant plus ou moins, bien entendu. Une scène relativement équivoque (ou pas) permettait au joueur de mettre un gros point d'interrogation sur la sexualité du personnage. Pourtant, lorsqu'on a abordé le sujet auprès de nos compatriotes hétérosexuels, on a eu droit à "je m'en fous qu'il soit gay ! Ca ne change rien au fait que ce soit un p*tain de guerrier !".

Voilà où je veux en venir. Dumbledore est gay, mais il est avant tout un guide. Subaru Sumeragi est gay, mais il est avant tout exorciste. Ike est (probablement) gay, mais c'est avant tout un p*tain de guerrier ! La sexualité d'un personnage fait partie de lui, le complète, voire influence quelques décisions, mais n'est pas obligée d'être le fil conducteur de l'histoire.


Mais au cas où elle le deviendrait, le jeu deviendrait-il un jeu de niche ? Se limiterait-il à la communauté homosexuelle ? Combien d'entre vous joueraient à un Bayonetta au masculin, malgré un gameplay excellent et addictif ? Massacreriez-vous toujours autant la manette si c'était Ganondorf que Link devait aller sauver des griffes manucurées de la princesse Zelda ? La vérité est que les personnages homosexuels, ou du moins gay-friendly, se multiplient ces derniers temps, mais qu'un jeu mettant clairement en scène une romance entre hommes serait un pari risqué pour le développeur.


L'homosexualité dans l'univers vidéoludique reste un chemin bien exempt de tout pas. Le gaymer est sans doute en attente de personnages homosexuels car ceux-ci marqueraient une reconnaissance dans un domaine qui le passionne. Toutefois, certains audacieux ont déjà réussi quelques incursions timides mais courageuses dans le milieu, ce qui est annonciateur d'un avenir plus riche pour le gaymer... ou pas ! Reste à voir si ce genre de jeu trouvera son public ou se limitera à la communauté homosexuelle, forcément minoritaire. Mais au pire, il nous reste toujours notre imagination ! Si le public hétéro trouve son compte à chaque bout de sein dévoilé, nous, du moment que nos héros gardent leurs chemises ouvertes, on est contents !