Non, ne cherchez pas la note ! Comme d'habitude avec les MMO, nous "oublions" de donner des étoiles, tant il est futile de vouloir catégoriser un produit qui peut changer du tout au tout, parfois très rapidement, et pas toujours en bien... Aion ne fait pas exception à la règle et rien que ses débuts, placés sous le signe d'une attente interminable pour se connecter aux serveurs, pourraient influencer négativement la note de manière disproportionnée. Lisez, réfléchissez et tirez vos conclusions !

Ombre et lumière

Dans Aion, tout commence par le choix de votre faction : Elyséen ou Asmodien ? Base du scénario, la dualité de ces deux races descendantes de la même souche est la raison d'être du titre. C'est elle qui explique la guerre permanente qui règne sur Atreia, le monde de ce MMO. Pour le joueur, les raisons du choix sont uniquement cosmétiques. Les Elyséens sont "angéliques" alors que les Asmodiens personnifient le côté obscur, avec un look plus griffu et des ailes noires. Des ailes ? Oui, j'y reviendrai... Une troisième faction existe, gérée par les serveurs, et elle a une place prépondérante dans le scénario : les Balaurs. Ces vrais vilains de service sont l'ennemi commun des Asmodiens et Elyséens. Apportant une touche de science-fiction à cet univers avec leur vaisseau mère qui ferait saliver Darth Vador, ils représentent les monstres les plus coriaces à abattre. Notez qu'en fonction de votre choix, vous évoluerez dans des zones de départ et des capitales différentes, mais les classes et pouvoirs sont strictement les mêmes.

Too sexy for my hat

Vient ensuite le choix des personnages. Les classes sont expliquées en détails sur le site officiel mais rien de très nouveau à l'horizon : on retrouve les classes de dégâts au corps à corps (Gladiateur et Assassin), les DPS (classes à dommages) à distance (Sorcier, Spiritualiste et Rôdeur), le tank de service (Templier), la trousse de soin (Clerc) et le couteau suisse (Aède), capable de vaguement tanker / soigner et surtout là pour donner ses buffs (des bonus divers) aux autres héros. Dans le tas, seul le Spiritualiste dispose d'un familier pour se battre à ses côtés, ce qui en fait une excellente classe de joueur solo. Mais dans Aion, il faut toujours garder le JcJ (Joueur contre Joueur) à l'esprit : vos ennemis, ce seront les joueurs d'en face, et ce, dès le niveau 25 sur les 50 que comporte actuellement le jeu. Du coup, choisissez bien votre classe en fonction de votre style de jeu. Si vous êtes du genre à paniquer en situation de stress, évitez de jouer un sorcier...

La création du personnage lui-même est bien plus large que dans les autres titres du genre. Guerrier beau gosse parfait et bimbo sexy sont évidemment possibles, mais vous pourrez aussi vous lâcher pour faire du grand black à la coupe afro ou une magicienne mesurant à peine un mètre de haut (et horriblement difficile à cibler en combat de groupe...). Attention, la taille influence la rapidité de vos animations et avoir un géant qui semble courir au ralenti (à cause de ses foulées plus grandes) pourra en saouler certains.

Sortir du nid

Les dix premiers niveaux sont une mise en jambe : votre choix de classe n'est pas encore définitif, et surtout, vous n'êtes pas encore un (ou une) Daeva : un être immortel, doté d'ailes ! Mais ces ailes ont un problème de conception : votre temps de vol est limité. 60 secondes, plus avec des potions et autres petits objets magiques. Cet aspect du jeu est primordial : quêtes, combats, tout passera par votre maîtrise du vol. Et ce temps limité, qui fait tant grincer les dents, se révèle une excellente idée. Outre le fait que certaines classes comme l'assassin sont plus puissantes en vol, l'aspect stratégique est passionnant. Bien géré, c'est la clé du succès pour une fuite réussie ou une attaque-surprise. Rien de plus jouissif que de voir un poursuivant tomber dans les limbes des Abysses parce qu'il a mal jugé sa capacité de vol. Car cette zone de combat principale est un ensemble d'îles flottantes, parsemées de reliques et de forteresses que les trois factions vont s'arracher. Cela constitue l'essentiel du jeu à haut niveau, le "End Game" comme disent les anglophones. Et entre ces îles, il existe des anneaux qui, si vous passez dedans, rechargent un peu votre temps de vol. Bien exploiter le terrain donne alors un avantage intéressant et cela pimente vraiment les combats.

Grisé par la brise

La plus grosse limitation du vol, c'est qu'il n'est pas possible dans la plupart des zones de quêtes. On doit alors se contenter de planer, en appuyant sur espace, en sautant d'un point élevé. Anecdotique au départ, cette capacité est encore une fois redoutable : voir un ennemi prendre le large parce qu'il a réussi à "décoller" plus que vous est frustrant au possible. Inversement, s'il se rate, lui tomber dessus est un plaisir. Mais la notion à retenir c'est que le feeling offert par tout ça est excellent. Et visuellement, voir décoller une cohorte de 24 joueurs (4 groupes de 6, le raid maximum dans Aion) qui part à l'assaut de l'ennemi, c'est un peu la megaclasse.

Héritée de Lineage II, il faut aussi parler de la gestion de la mort dans ce titre ! Chaque fois que votre personnage meurt, il perd des points d'expérience. Suffisamment pour être prudent lors de ses aventures. Ces points peuvent être rachetés en cas de drame, mais cela coûte de plus en cher avec les niveaux. En revanche, mourir par la main d'un joueur de la faction opposée ne coûte qu'un Kinah, la monnaie locale, soit rien du tout. Dans les deux cas, on réapparaît à la dernière statue que l'on a liée à son personnage, une action qui n'est pas gratuite non plus, du reste. En cas d'expédition lointaine et risquée, il faut donc prendre avec soi un Kisk, un objet (cher) qui permet de ressusciter là où il est placé. Indispensable en cas de guerre chez l'ennemi !

L'enfer de la routine

Côté gameplay, Aion offre des combinaisons de pouvoir évidentes, avec des séquences récurrentes, comme tout MMO à base de ciblage classique. Le feeling est bon, et certaines classes comme l'assassin et le gladiateur sont très plaisantes à voir et super dynamiques à jouer. Mais la grosse différence avec un World of Warcarft, qu'il copie sur de nombreux points, c'est le ratage complet que constitue l'aspect "quête" du jeu. Outre les "Missions", qui font avancer le scénario et sont agrémentées de cinématiques, les quêtes classiques sont souvent un maquillage pour du simple "grind" (tuer des monstres à la chaîne). Pire, les récompenses de quêtes sont trop souvent insignifiantes, pour ne pas dire carrément minables. Alors que l'on retrouve la codification d'objets bien connus de WoW (blanc pour du normal, vert pour du peu commun, bleu pour le niveau de qualité supérieure, etc.), les quêtes osent rarement faire plaisir au joueur. Et en termes de points d'expérience, c'est également assez pauvre. Bref, autour du level 25, il sera bien plus rentable de monter des groupes pour aller "farmer" la première instance (ce que l'on peut faire toutes les 18 heures) et certaines zones avec des monstres élites. J'en suis au level 28 et je sens ma motivation s'effilocher à cause de ces choix de design, ce n'est pas bon signe...

Shopping

Dans Aion, votre avatar reçoit des bonus de statistiques par les titres qu'il gagne (vous pouvez choisir à tout moment celui qui vous intéresse le plus) et les "Stigma". Ces pierres nécessitent un PNJ (personnage non-joueur) spécifique pour être placées sur votre personnage et vous confèrent des pouvoirs supplémentaires (et différents) selon les pierres utilisées. Évidemment, chaque classe dispose d'un choix limité sur ces pierres et au level 50, on peut en utiliser 8 en même temps. Pas aussi souple que le système de talents d'un WoW (encore lui), il reste intéressant et le butin que représente ces pierres pimente pas mal les visites dans les donjons.

Je passe rapidement sur les métiers d'artisanat (le crafting) possibles (cuisine, fabricant d'armes, d'armures, de potions, etc.) pour une bonne raison : c'est aussi pénible qu'ailleurs. Monter ses talents est long, chiant (oui oui, chiant), et si l'intérêt pour votre personnage est bien là, le fun est dans une autre galaxie. On peut rater ses créations (et perdre ses matériaux), ce qui pimente l'affaire, mais risque aussi d'en décourager plus d'un. Pire, monter ses capacités passe uniquement par votre endurance à cliquer sur un personnage, accepter sa commande de fabrication, aller faire ces objets (avec des matériaux fournis ou à acheter à 2 mètres de là) et à livrer le tout. 500 fois de suite. Pour commencer. Le démineur de Windows est 1 milliard de fois plus fun que cet aspect du jeu. C'est dire... Mais comme le crafting souffre de ces mêmes problèmes dans 99% des MMO, difficile d'en vouloir à Aion sur ce point.

Soleil dans l'œil

Le MMO de NCsoft dispose d'un avantage sur la concurrence : il est visuellement très réussi sur certains points. Les personnages, leurs armures, leurs armes, tout est détaillé, travaillé. Dès le niveau 20, on est content de son avatar, ce qui est rarement le cas ailleurs. Le seul point moyen concerne les décors qui sont parfois bien vides et insipides. Ça manque de vie. Je ne parle même pas des Abysses, assez moches, il faut l'avouer. Ce défaut présente néanmoins un avantage : le jeu tourne très bien même sur des configurations très moyennes, et gère très bien les affrontements avec plusieurs dizaines de joueurs. Techniquement, tout fonctionne plutôt bien malgré des erreurs de traduction et autres broutilles qui seront patchées rapidement. Les musiques oscillent entre le grandiose et le très raté, mais tout joueur de MMO sait qu'elles sont rapidement coupées pour éviter la crise de nerfs...

La voie du guerrier

À l'heure du bilan, les imperfections d'Aion et les choix crispants de ses développeurs ne sont pas suffisants pour gâcher la fête. L'amateur de PvP veut arriver au niveau maximum pour juger par lui-même du potentiel du titre. Sur mon serveur, à l'heure actuelle, il existe une petite dizaine de levels 4x qui va bientôt y goûter. Et les amuse-gueules disséminés pendant que l'on monte son personnage fonctionnent à plein régime. La notion de fissure / brèches (rift en VO) qui permettent à intervalles réguliers à une poignée de joueurs de passer en territoire ennemi (parfois pour y accomplir des quêtes au passage) offre une montée d'adrénaline que je n'avais clairement pas eue depuis mes sessions de Lineage II.

Et ce point est révélateur : Aion est avant tout un formidable terrain de jeu pour les guildes organisées orientées joueur contre joueur. L'amateur d'instances JcE (joueur contre environnement) devrait attendre un titre plus pacifique comme Final Fantasy XIV Online pour étancher sa soif de nouveauté. Mais si vous aimez le risque et les combats d'envergure, Aion mérite clairement votre attention.