Les aventures narratives horrifiques pullulent ces derniers mois et après Maid of Sker, Amnesia Rebirth ou le décevant Remothered : Broken Porcelain, voici que The Medium pointe le petit bout de son nez, fort d'une aura assez imposante. Eh oui, puisqu'il n'y a pas que CD Projekt RED qui fait resplendir la Pologne, The Medium est très attendu car il vient de chez Bloober Team, studio de Cracovie à qui l'on doit les plus ou moins réussis Layers of Fear, Observer et Blair Witch. Nous l'avons retourné sur Xbox Series X et on vous dit pourquoi il nous a tapé dans l'oeil...

Double vie

Sous ses faux airs de Gray Matter, The Medium est donc le nouvel univers horrifique à sortir des têtes créatives de Bloober Games, et il est très surveillé puisque présenté comme étant le projet le plus personnel et original créé jusqu'ici chez nos amis polonais. On y suit les aventures de Marianne, qui a grandi dans un funérarium, après la mort de son père adoptif. Notre héroïne est spéciale. Elle a un pouvoir. Celui-ci lui permet de voir deux mondes en même temps : le nôtre, et celui des morts. Et puisqu'elle se sert de ses capacités pour aider les esprits à "partir", elle devra bien évidemment effectuer le rite de passage pour son paternel, soit ici le tutoriel. Puis assez rapidement, elle recevra un coup de fil qui la mettra sur la piste de son passé, dans la version soviétique d'un Center Parcs abandonné depuis des lustres.

L'occasion de faire la lumière sur le destin de plusieurs personnages secondaires dont un en particulier, qui semble posséder les mêmes particularités que Marianne, tout en échappant aux mystérieux monstres qui semblent hanter les lieux... C'est une vraie enquête dans le passé que nous allons mener. Et là où les choses s'avèrent vraiment originales, c'est avec la vision simultanée des deux mondes, que ce soit en jeu ou en phase narrative avec l'écran qui se scinde. Les cinématiques sont plutôt nombreuses et bien ficelées, et si les décors du monde réel sont plutôt stylés, notamment en extérieur, le monde obscur est parfois digne des folies d'un Alice Madness Returns.

Silent Medium

Malgré tout, The Medium, sorti de quelques jump scares, ne fait pas vraiment peur. Par contre, l'ambiance qui s'en dégage est démentielle, du début à la fin. La Pologne est décidément un terrain de jeu propice à bien des horreurs. La narration se montre vraiment efficace et les passages entre deux réalités bien gérés. Quelques fantômes du passé vont nous en apprendre plus - un classique du genre éculé depuis The Vanishing of Ethan Carter ou plus récemment Déraciné - ainsi que des logs papier et audio, et ce sera à nous de faire la lumière sur un scénario au final assez alambiqué et obscur, qui ne s'ouvrira qu'aux plus téméraires, tout comme avec la fin... qui risque de diviser.

Contrairement aux jeux narratifs du studio, The Medium se déroulera majoritairement avec des angles de caméra fixe, un peu à l'ancienne, en hommage aux vieux survival horror, avec du hors champ et ce genre de joyeusetés qui excite l'imagination. Quelques passages en vue subjective seront occasionnellement de la partie, et le tout est souligné par une piste sonore de haute volée. En effet, un certain Akira Yamahoka est venu prêter main forte aux artistes de Bloober Team, et la bande-son n'en est que plus puissante, et fortement connotée "Silent Hill". On croirait presque parfois entendre les musiques d'un des jeux de la série dans The Medium ! Et ça fonctionne. Le reste des bruitages, comme des chuchotements, est lui aussi très inquiétant et participe à l'ambiance, tout comme les doublages anglais, sous-titré en français. Ah, et si les vibrations ne sont pas aussi folles que celles d'une DualSense PS5, la manette de la Xbox Series fait des merveilles avec The Medium qui propose des secousses maitrisées du début à la fin, qui soulignent très bien l'action.

The Medium Graphics options

Tournant sous Unreal Engine, The Medium fait visuellement très bien son boulot, et ce d'autant plus que le design global fait mouche Les éclairages se révèlent réussis et, en extérieur, la végétation resplendit. Avec le bon écran, on en prend plein les mirettes. Et si les intérieurs sont plus banals, cela reste tout de même globalement très beau. Mais pas exempt de tout reproche. En effet, de nombreuses chutes de frame rate sont venues perturber notre expérience, tout du long, pourtant sur Xbox Series X. Quelques retard d'affichage de textures furent aussi à déplorer, et le jeu est clairement moins beau lors des phases de gameplay que pendant les cinématiques, notamment lorsque l'écran doit afficher les deux mondes en même temps. Quelques animations de type "balai dans le fondement" sont aussi à noter, mais globalement cela reste tout de même très flatteur pour nos rétines.

Niveau gameplay, malgré la présence des deux mondes à explorer qui agissent l'un sur l'autre, une idée géniale sur le papier, on rentre un peu plus dans le rang avec des mécaniques très classiques et répétitives. On peut absorber de l'énergie dans l'autre monde pour activer des systèmes dans le nôtre. On peut carrément sortir de son corps un instant et ne diriger que le fantôme pour passer un obstacle. On dispose aussi d'un sixième sens qui nous permet de voir quelques objets cachés. Globalement, le jeu est un gros entrainement individuel de chaque mécanique avant le grand puzzle final qui fera appel à toutes en même temps.

The Easiest

Mais en vérité, on est plus ou moins toujours sur "l'objet manquant" à chercher et ramener à sa place. Souvent pas très loin. Le tout reste très simple, pas besoin de se creuser la tête, même cette énigme où il faut deviner la combinaison d'un digicode, habituellement ô combien complexe pour votre serviteur. Quelques scènes d'action - de fuite - viennent rythmer un peu la partie, et d'autres, d'infiltration, n'auront que de très peu d'intérêt devant leur déroulement complètement téléphoné. Notez aussi que le même genre d'énigme va globalement se répéter tout au long du jeu, et que vous vous perdrez probablement à de nombreuses reprises dans certains donjons plus que labyrinthiques. Dans ses dialogues, le jeu se moque parfois lui-même bien involontairement de ses mécaniques répétitives et agaçantes à souhait.

Aussi, sachez qu'on a aussi réussi à ramasser toute une famille de collectibles sans soluce, et qu'il nous a fallu un peu plus de 10 heures - deux grosses soirées - pour en voir le bout. Le voyage offert par The Medium s'est révélé très appréciable, mais on aurait aimé un degré de finition autre, et une jouabilité un peu moins... classique, au final. Cela aurait pu le faire entrer dans la catégorie des chefs-d'oeuvre. On n'en est tout de même pas loin. Et aussi, le coup des mondes, d'autres jeux l'ont déjà plus ou moins fait avant lui, mais sans afficher les deux versions avec un écran partagé...

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L'AVIS DE LA RÉDAC'

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GIANNI "PLUME" MOLINARO : Pratiqué avec tous les paramètres poussés à fond sur un PC assez costaud (Ryzen 3900X, 32 GB de RAM, Nividia 2080 Super, stockage SSD NvMe), The Medium n'éprouve aucune difficulté à éblouir par son rendu, très fin, très détaillé et bourré d'effets de lumières saisissants, et sa direction artistique absolument sublime. Ayant opté pour des angles de caméra fixes et une rigidité perceptible qui rappellent une certaine époque du Survival-Horror, ce projet de Bloober Team se distingue comme un très bon Walking-Simulator, à l'ambiance - mystérieuse, angoissante, glauque - tout simplement extraordinaire. Le classicisme et la facilité volontaires de ses "énigmes" n'occultent pas une narration très réussie. La volonté de progresser dans une histoire qui, si elle s'avère archi-prévisible sur certains aspects, arrive à nous accrocher et choquer par moments, est réelle. Pour la faire court : ce n'est pas avec ce jeu que vous allez redresser un moral en berne, mais c'est du tout bon.